Carte blanche
Stop aux politiques contre le burn-out, commencez par votre culture d’entreprise
C’est avec une certaine surprise que j’ai lu, récemment, l’appel du ministre fédéral Pierre-Yves Dermagne à expérimenter une semaine de travail plus courte. Selon lui, cela “permettrait peut-être d’éviter (…) les maladies de longue durée”. Je n’en suis pas convaincue : il s’agit là d’une énième tentative de lutte contre le burn-out, et d’une nouvelle occasion manquée de s’attaquer à la véritable cause du burn-out.
Ne vous concentrez pas sur les symptômes, cherchez plutôt la cause
La tentative de Dermagne – peut-être bien intentionnée – expose un problème sous-jacent plus profond : en tant que société, nous nous concentrons trop sur les symptômes d’un phénomène (le “quoi”) au lieu d’en rechercher la cause (le “pourquoi”). Nous luttons principalement contre les symptômes d’une maladie ou d’une douleur (par exemple, un médicament contre un mal de tête), alors qu’il pourrait y avoir une cause plus profonde (comme le stress, un manque de sommeil, un excès de caféine, etc.) Nous n’éliminons que le symptôme, mais pas la cause plus profonde ou ce que l’on appelle la “cause première”.
Je pense surtout que nous devrions oser chercher la cause profonde d’un problème et nous y attaquer, au lieu de nous “contenter” de traiter les symptômes. Nous devons avant tout nous intéresser au “pourquoi” plutôt qu’au “quoi”. Une telle approche me semble beaucoup plus judicieuse pour lutter contre les maladies de longue durée dans notre société, en particulier pour les personnes qui abandonnent leur travail en raison d’un burn-out. Nous devons regarder en arrière et examiner systématiquement la situation dans son ensemble pour identifier la cause du burn-out. Il vaut mieux prévenir que guérir. Ni les entreprises ni les gouvernements ne pourront continuer à payer pour cela.
Quelle est donc cette image plus large ? Le burn-out peut indiquer un problème dans la relation entre l’employé et son environnement de travail. Mais ce problème n’est souvent pas évoqué, et encore moins étudié. Les gouvernements et les entreprises sont plus enclins à rechercher des “règles” ou une “politique”: mais malheureusement, il ne s’agit que d’un pansement. Ou la fameuse “pilule” en réponse à une plainte. Pourquoi ne pas s’intéresser davantage aux cultures d’entreprise où l’épuisement professionnel est faible et essayer d’en tirer des enseignements ? Si vous avez une bonne culture d’entreprise, les gens se sentent mieux, peuvent être eux-mêmes et s’épanouir. Si la culture d’entreprise est fondée sur la peur et le contrôle, les gens se sentent piégés, stressés et ont peur de ne pas (assez) bien faire ou d’échouer. Cette situation est néfaste pour le bien-être mental de l’employé, mais aussi pour les performances de l’entreprise. Une semaine de travail plus courte n’y changera rien.
Autonomy, Belonging, Competence (ABC) pour lutter contre le burn-out
Je suis convaincue que nous pouvons lutter contre le burn-out de manière plus structurelle en nous concentrant principalement sur les cultures d’entreprise. Les cultures dans lesquelles l’autonomie (A), l’appartenance (belonging, B) et la compétence (C) sont centrales favorisent moins le burn-out, car dans ces cultures, les personnes peuvent être elles-mêmes avec des valeurs partagées, libres de prendre des initiatives et de poursuivre leurs rêves. Ce principe ABC est l’un des principes de base de la psychologie de la motivation et garantit le développement personnel, la motivation et la santé mentale. On peut avoir de nombreuses politiques de lutte contre le burn-out, si la culture d’entreprise n’invite pas à l’épanouissement et à la santé mentale, on ne va nulle part.
Oui, mais il doit quand même y avoir des règles, n’est-ce pas ?
Les règles sont importantes pour faire fonctionner la société et votre entreprise, mais un cadre fondé sur des valeurs partagées est bien plus important. Mon appel est avant tout le suivant : ne laissez pas ces règles devenir le moteur de votre entreprise – ou pire, un frein étouffant. Le moteur, c’est notre personnel, qui se sent libre et en sécurité de prendre des initiatives et, à l’occasion, d’être autorisé à échouer. Je pense que lorsque les cultures d’entreprise font de la place au principe ABC et que les employés ont la possibilité de créer leur propre ABC, cela réduit considérablement le risque de burn-out.
C’est pourquoi je lance un appel chaleureux au ministre Dermagne : au lieu de proposer des “premiers soins” ou des “pansements”, réfléchissez à la manière de vous attaquer à la véritable cause du burn-out et de la maladie de longue durée, à la manière d’encourager les cultures d’entreprise positives en tant que gouvernement. Donnez aux entreprises et aux chefs d’entreprise plus d’outils et de conseils pour créer des cultures positives et proposez moins de règles et d’interférences. En outre, en tant qu’employeur, vous ne pouvez pas déterminer le bonheur de vos employés : c’est leur propre responsabilité. Après tout, l’épuisement professionnel n’est généralement pas uniquement lié au travail, mais aussi à une situation familiale difficile. Mais vous pouvez offrir l’environnement dans lequel ils peuvent trouver ce bonheur (professionnel). L’employeur et l’employé devraient pouvoir travailler ensemble, dans un environnement sain, sur un plan de réintégration. C’est à nous, gouvernements et entreprises, à la manière d’un jardinier, de gérer correctement notre “jardin” avec les engrais et les minéraux nécessaires, suffisamment d’eau, de soleil et d’ombre. Ce n’est qu’à cette condition que notre peuple retrouvera son plein épanouissement.
Anouk Lagae, CEO Accent
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