Carte blanche

Le gros fléau des startup : les impayés

Une étude de Graydon estime le montant total des factures impayées en Belgique à 9,15 milliards d’euros (1). Parmi eux, 730 millions d’euros ne sont jamais confiés au marché du recouvrement et sont la cause de faillite.

En réalité, ces chiffres pourraient même être plus élevés. Le montant total des crédits commerciaux octroyés en Belgique s’élève à plusieurs centaines de milliards d’euros. Même un faible pourcentage de crédits impayés peut représenter un montant important pour le marché du recouvrement.

D’ailleurs, il est important de noter que dans le marché de l’impayé un chiffre précis est difficile à cerner étant donné le désert statistique : il n’existe pas de données officielles précises sur la taille du marché du recouvrement en Belgique. Les estimations varient donc d’une source à l’autre. En outre, la définition du marché du recouvrement peut varier, ce qui peut influencer les estimations de sa taille.

La question des impayés concerne toutes les entreprises. D’après un rapport de TCM (2), il y aurait en Belgique près d’un million de créances impayées chaque année. Cela représente 6% des contribuables belges. Les créances impayées concernent tous les secteurs d’activité, ce qui montre que le problème est généralisé.

On considère qu’1 à 3 % du chiffre d’affaires des sociétés n’est jamais rétribué, c’est-à-dire perdu.

En Belgique, il s’agit de la première cause de faillites : 35 % des défaillances d’entreprises seraient dues à des retards de paiement, ce qui en ferait la première cause de faillite selon une étude de la K.U.L. (thèse de doctorat des futurs fondateurs d’une Fintech dédiée au recouvrement) qui sera très prochainement rendue publique.

Pour limiter les risques, il est conseillé de réaliser systématiquement des devis et de faire appel à des services de recouvrement en cas de problème.

Souvent, pour bon nombre d’entreprises, un paiement de la part d’un client peut conditionner le versement de tous les salariés. C’est excessivement anxiogène. Et c’est cher. Les dirigeants sont obligés d’emprunter de l’argent à la banque pour avoir suffisamment de trésoreries. C’est agaçant, parce que fréquemment, les petites entreprises paient des intérêts pour compenser les délais des ETI et des grands groupes qui font des bénéfices colossaux.

Les entreprises belges paient très mal, c’est culturel. On estime que le délai moyen de paiement est de 150 jours au lieu de 45 jours légalement. En Allemagne, il est de trois jours ! En moyenne, les impayés représentent deux mois de trésorerie pour les entreprises victimes. C’est une somme qui leur manque en permanence. Grosso modo, une société qui réalise, par exemple, 5 millions d’euros de chiffre d’affaires peut s’attendre à enregistrer 800 000 euros d’impayés.

Environ 80 % de TPE/PME ne s’équipent pas de solution de recouvrement. D’abord parce qu’elles n’en ont pas les moyens, mais aussi parce qu’elles ne savent pas vers qui se tourner ou ont peur d’entacher leur image si elles font appel à un huissier.

Les petites entreprises doivent donc bien peser le pour et le contre avant de signer avec un grand groupe. Elles doivent anticiper, se poser les bonnes questions avant la vente et savoir si elles peuvent attendre plusieurs mois avant d’être payées.

Si ce n’est pas le cas, les startup peuvent aussi demander un acompte : par exemple, 30 %  dès la signature du contrat.

Et toujours faire signer des devis, afin qu’il n’y ait pas de contestation possible en cas de facture impayée. Sans oublier de s’orienter rapidement vers un professionnel du recouvrement, c’est-à-dire ne pas perdre trop de temps avec les relances. Il ne faut pas rester seul : il faut en parler autour de soi pour se faire aider.

Lorsqu’on paie quelqu’un à faire des relances, on ne le paie pas à aller chercher des clients, ça freine la croissance.

Conclusion : si demain les grands comptes payaient tout ce qu’ils devaient à leurs fournisseurs, la croissance belge changerait du tout au tout ». Car même les entreprises en croissance freinent leur développement parce qu’il leur manque du cash.

Je conseille aux pouvoirs publics deux mesures véritablement disruptives, mais assez simples, pour renforcer les entreprises et les finances publiques:

  1. Concernant les impayés : Imposer le règlement « au grand comptant » des factures, sous peine de sanctions (amendes suffisamment dissuasives). Cela réduira considérablement  le nombre faillites et cela accélérera la croissance de l’économie au sens large.
  2. Concernant l’Impôt des Sociétés : Taxer le revenu et non le résultat brut. Un taux d’imposition dix fois moindre, par exemple 2,5 % au lieu de 25 %, mais sur une base taxable dix fois plus grande ; le chiffre d’affaires. 
    Au lieu du résultat brut, souvent réduit à peau de chagrin après moult manipulations comptables.
    Cela améliorera significativement le rendement de l’impôt (3) et donc les finances publiques. Cela rendra caduques la fraude et/ou l’évasion fiscale des entreprises.
    Sans compter une simplification drastique de la déclaration fiscale des entreprises et des actionnaires.

Carl-Alexandre Robyn, Ingénieur-conseil en valorisation de startup (Cabinet d’expertise VALORO, Bruxelles)

https://www.graydon.be/customer/
https://www.tcmgroup.com/
– Montant total de l’IS versé en 2023 : entre 54 et 56 milliards d’euros

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