Carte blanche

L’avenir du tourisme wallon se décide maintenant

Le 27 septembre, Journée mondiale du tourisme, invite à la réflexion. Une occasion, en Belgique aussi, de s’interroger sur nos manières de voyager, nos choix de destinations, et leur impact réel sur les territoires.

L’Ardenne remporte un succès fou depuis le Covid. Les chiffres en témoignent : chaque année, nous voyons défiler quelque 600.000 vacanciers dans nos gîtes : des amoureux de la nature, des familles et des amis en quête de reconnexion. Mais ce tourisme, aussi local soit-il, n’est jamais neutre.

Wallonie, une longueur d’avance à conserver

Entre “nuisances sonores”, “ville boîte à clés” et “tourisme de masse”, les médias ont mis des mots sur un phénomène de fond : la surcharge touristique en Wallonie. Aujourd’hui, les communes, comme Dinant ou Durbuy, tirent la sonnette d’alarme. Surtourisme, difficulté d’accès au logement, problèmes de voisinage, etc. ternissent désormais le tableau. Ce glissement, ressenti et partagé par les nombreuses communes que nous avons rencontrées, est justifié. Mais il reste difficile, pour elles comme pour nous, de freiner cet engouement puisque nous sommes si fiers de notre territoire, de notre culture, de notre art de vivre, de notre cuisine, de notre nature et de tout ce qui fait l’âme de notre Ardenne.

Heureusement, cette sonnette d’alarme retentit au bon moment. Souvenez-vous de César Manrique, qui avait fait de même et avait ainsi permis de préserver toute la splendeur de Lanzarote. Nous avons encore les cartes en main. En effet, notre environnement naturel et ses paysages restent pour la grande majorité encore intacts, préservés, authentiques et sauvages. Notre bâti, lui, reste unique, a du cachet et du caractère ; il est qualitatif et cohérent. Et c’est bien ce que les vacanciers viennent chercher en choisissant l’Ardenne et une maison de vacances.

En Wallonie, nous avons encore une longueur d’avance sur d’autres régions d’Europe déjà durement touchées par le tourisme de masse. Et si la vraie force de l’Ardenne, c’était d’avoir encore le temps d’agir ? Ici, la nature respire, les villages vivent, et les maisons accueillent. C’est à nous de faire en sorte que cela dure. Chacun à son échelle, chacun à sa manière. Pas besoin d’attendre une grande réforme : nous pouvons commencer par  mieux sensibiliser les vacanciers, de valoriser la création de gîtes plus écoresponsables, ou de soutenir des projets locaux. Agissons maintenant, pour que demain ressemble à aujourd’hui et que les générations à venir aient, elles aussi, un lieu où se perdre pour mieux se retrouver.

Et si le tourisme se pensait comme un soin ?

Non, le tourisme n’est pas un problème, mais doit aussi devenir une attention portée au territoire, à ceux qui l’habitent, à ceux qui y passent, à ce qu’il a de plus vivant. Ce soin peut prendre mille formes. Chez Ardennes-étape, il se traduit par des choix concrets : depuis huit ans, nous soutenons humainement et financièrement Natagora dans la restauration de réserves naturelles, non pas pour les ouvrir au public, mais pour les rendre plus accueillantes pour la biodiversité. Nous avons aussi développé  un écosystème de plus de 350 activités touristiques pour les vacanciers, mais également une base de données de partenaires locaux pour nos propriétaires – artisans, guides, producteurs, réparateurs – pour encourager une économie touristique enracinée, humaine, et plus équilibrée. Nous conseillons les propriétaires à privilégier la rénovation durable plutôt que la construction, à s’installer dans des zones moins saturées, à travailler avec des acteurs locaux.

Mais ce soin se joue aussi en interne. À travers une équipe de 50 personnes, ancrées localement, nous faisons le pari d’un tourisme avec des visages, du dialogue, de la connaissance du terrain, de l’intelligence collective. C’est à cette échelle que se construit un modèle d’entreprise plus humain, et donc un tourisme plus durable – pour les vacanciers, les communes, l’économie locale, la culture et la nature.

Agir ensemble pour un tourisme qui fait du bien

La bonne nouvelle, c’est que rien n’est figé. Le succès d’une destination n’est pas une fatalité ni un danger : c’est une opportunité, à condition de l’accompagner. Aujourd’hui, nous avons encore le temps et les moyens d’éviter les désagréments que d’autres régions ont connus. Cela demande de la lucidité, mais surtout de la volonté.

En tant qu’entreprise, cela passe par des engagements clairs, un accompagnement actif des communes, un rôle d’influence positive auprès des investisseurs, et une écoute constante du terrain. En tant que propriétaire, c’est favoriser des matériaux durables et rester attentif à l’impact sur les riverains. En tant que vacancier, c’est respecter les lieux, consommer local, opter pour des destinations moins connues, et se déplacer autrement.

Mais cela ne suffira pas si nous ne sommes pas rejoints. Le soin n’est pas une idée théorique, c’est une pratique quotidienne : dans le choix d’un gîte, d’un partenaire, d’une destination ou même d’un geste. C’est une attention portée à ce qui fait la vie d’un territoire : sa nature, son économie, sa culture, ses habitants. Le tourisme n’est pas une industrie figée. C’est un écosystème vivant, mouvant, puissant. Et bien guidé, il peut être une formidable force de cohésion, de valorisation et de résilience.

L’heure n’est pas à l’attente. L’heure est à l’audace, au soin, à la responsabilité. C’est le moment d’agir – et c’est ensemble que nous pourrons faire du tourisme un bien commun, un moteur local, un levier d’avenir.

Mario Cabañas, CEO d’Ardennes-étape

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