Carte blanche

L’année financière 2025 en trois questions cruciales

À l’aube de 2025, le paysage économique et financier semble prometteur.

Bien que le monde traverse une phase de croissance économique faible, le risque de récession semble (pour l’instant) écarté. L’inflation semble enfin sous contrôle, permettant aux banques centrales de maintenir des taux d’intérêt bas afin de soutenir l’économie. Toutefois, dans un contexte de tensions géopolitiques et de protectionnisme croissant, il convient de rester prudent. Trois questions cruciales seront déterminantes pour l’année financière de 2025.

1. Trump 2.0 : une bonne nouvelle pour les marchés ?

Tout au long de 2024, le discours sur les perspectives économiques des États-Unis s’est progressivement amélioré. Ce qui avait commencé par des craintes d’un « atterrissage brutal », où la lutte contre l’inflation aurait compromis la croissance économique, laisse place à un scénario de « non-atterrissage », marqué par des chiffres de croissance solides. Au troisième trimestre de 2024, le PIB enregistrait encore une progression de 2,8 %.

Dans ce contexte, les marchés d’actions américains ont réagi positivement à la victoire républicaine : les mesures fiscales de stimulation, la dérégulation et les tarifs d’importation annoncés par le nouveau président alimentent les attentes d’une croissance accrue des bénéfices des entreprises américaines. Toutefois, si ces mesures peuvent avoir un effet stimulant à court terme, elles comportent également des risques. Les tarifs douaniers devraient faire grimper les prix à la consommation, réduisant ainsi le pouvoir d’achat des ménages américains.

De même, les restrictions sur l’immigration pourraient exercer une pression sur le marché du travail, augmentant les salaires et, à terme, l’inflation. Les effets à long terme de cette pression inflationniste pourraient freiner la croissance économique et peser sur les marchés financiers. L’histoire récente offre une leçon précieuse : lors du premier mandat de Trump, une politique similaire avait entraîné une stimulation éphémère, mais la guerre commerciale avec la Chine avait finalement provoqué un net recul de la croissance des bénéfices des entreprises.

2. Banques centrales : les baisses de taux vont-elles se poursuivre ?

Aux États-Unis, la Réserve fédérale (Fed) joue un rôle central dans le scénario économique de 2025. Les perspectives sont complexes : bien que le marché reste optimiste quant à de nouvelles baisses des taux, avec une baisse attendue à 3,5 %, la résilience de l’économie américaine incite à la prudence. La combinaison des mesures de stimulation fiscale et d’une pression inflationniste potentielle sous Trump pourrait obliger la Fed à adopter une approche plus mesurée. Cela se reflète également dans la hausse du taux à 10 ans, qui a atteint 4,5 % juste après les élections.

Un autre défi réside dans l’indépendance de la Fed. Trump a déjà exprimé sa volonté d’influencer les décisions de politique monétaire, ce qui pourrait nuire à la capacité de la banque centrale à contrôler efficacement l’inflation (1). Cela crée une incertitude autour de la politique monétaire pour le second semestre de 2025.

En Europe, la BCE fait face à un autre défi : soutenir une économie en stagnation. Le moteur industriel allemand continue à s’essouffler, tandis que l’inflation salariale – tirée par l’Allemagne – atteint son plus haut niveau depuis 1993 (2). Parallèlement, l’incertitude géopolitique continue à poser un risque pour les prix de l’énergie… Contrairement aux États-Unis, la mise en place de mesures budgétaires de stimulation économique reste politiquement sensible en Europe, ce qui pousse davantage la BCE à intervenir. Après avoir annoncé une quatrième baisse consécutive des taux en 2024 le 12 décembre, Christine Lagarde, présidente de la BCE, a déjà laissé entendre que cette tendance pourrait se poursuivre en 2025.

3. L’Europe trouvera-t-elle le chemin de la reprise économique ?

Les perspectives de croissance en Europe restent incertaines, mais quelques signes positifs apparaissent. Les dépenses des consommateurs semblent se redresser grâce à une hausse des revenus et à une baisse prévue du taux d’épargne en raison de taux d’intérêt plus bas. Par ailleurs, la croissance du crédit pourrait soutenir la demande intérieure, portant la croissance économique à environ 1 % d’ici la fin de 2025.

Cependant, l’Europe reste confrontée à des défis structurels, notamment une faible productivité et un manque d’investissements. Ces difficultés s’accentuent dans un contexte mondial marqué par des barrières commerciales croissantes et des interventions dans les secteurs stratégiques. Pour rester pertinente face à la montée des tensions entre les États-Unis et la Chine, l’Europe doit renforcer sa compétitivité et faire preuve de plus d’affirmation.

Le rapport Draghi fournit un cadre d’action avec des recommandations pour consolider la position de l’Europe (3). Toutefois, la capacité des pays européens à les appliquer varie fortement. L’Allemagne continue de lutter contre des contraintes budgétaires internes, tandis que des pays comme la France et la Belgique sont sous la surveillance de la Commission européenne en raison de leur politique budgétaire, limitant ainsi leur marge de manoeuvre pour des mesures de soutien à la croissance (4).

En conclusion

Les perspectives économiques pour 2025 sont porteuses d’espoir, mais avec des disparités régionales et des risques bien identifiés. Les décisions politiques des dirigeants américains et européens, ainsi que les politiques monétaires des banques centrales, joueront un rôle déterminant dans les mois à venir. Avec des mesures appropriées et une coopération renforcée, 2025 pourrait être une année riche en opportunités. Cependant, la prudence reste de mise.

Marc Danneels, Chief Investment Officer chez Beobank

(1) abcnews
(2) Euro Area Negotiated Wage Growth Q3 2024: 5.42%
(3) European Commission “EU competitiveness: looking ahead”
(4) Consilium Europe : la procédure de déficit excessif est un mécanisme conçu pour garantir que les États membres de l’UE maintiennent une discipline dans leurs budgets publics, avec comme valeurs de référence un ratio de déficit de 3 % du PIB et un ratio de dette de 60 % du PIB

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