Quelques mois après avoir constitué son gouvernement en demandant un effort budgétaire de 23 milliards d’euros sur la législature, Bart De Wever doit déjà corriger son épure à gros traits rouges. La rentrée politique se fait, en effet, sous le signe des gros sous. Pour le patron du MR, Georges-Louis Bouchez, il faut réaliser un effort budgétaire de 20 milliards supplémentaires. Le patron des Engagés, Maxime Prévot, projette plutôt 8,6 milliards d’euros. Et la N-VA est entre les deux, avec 12 milliards.
S’il faut à nouveau tout remettre à plat, quelques mois seulement après la formation du gouvernement, c’est en partie parce que le monde bouge à une vitesse folle. Entre le moment où l’Arizona s’est mis d’accord sur le budget et aujourd’hui, l’Otan a demandé à ses membres de porter ses dépenses de sécurité (au sens large) à 5% du PIB, les États-Unis ont imposé des droits de douanes de 15% à l’Europe et des soubresauts économico-politiques secouent nos voisins immédiats, et plus spécialement la France.
La correction était aussi nécessaire parce que le premier plan budgétaire n’était pas suffisant. En présentant en juin ses perspectives économiques, la Banque nationale estimait déjà que malgré les mesures de l’Arizona, le déficit budgétaire allait continuer à déraper, pour atteindre 5,7% en 2027…
C’est tout à l’honneur du gouvernement de vouloir corriger sa copie le plus vite possible. Mais à vrai dire, il n’avait pas le choix. Car tout ce qui n’est pas fait aujourd’hui devra être réalisé demain, avec bien davantage de douleur. Une petite simulation aide à mettre les choses en place. Notre pays affiche un PIB de 640 milliards d’euros, une dette publique de 107% du PIB et un déficit public d’environ 5,3%. Imaginons qu’il navigue dans les sept années à venir avec une croissance réelle de 1,1% et une inflation de 2%. Quel serait l’effort à faire pour revenir à un déficit de 3% en 2032 ?
Si nous ne faisons rien pendant les six premières années et que nous décidons de retrousser nos manches la dernière année, l’effort budgétaire dépasserait les 75 milliards d’euros ! Et encore, la simulation ne tient pas compte de l’impact de la hausse des taux d’intérêt à payer sur le stock de dette. Mais si nous répartissons l’action équitablement sur les sept années, l’effort cumulé ne sera plus “que” d’une vingtaine de milliards – le chiffre avancé par le MR – car les mesures d’économies réalisées dès le départ viendront réduire le déficit et alléger l’effort des années suivantes.
“Tout effort qui n’est pas structurel est un coup d’épée dans l’eau.”
On peut tirer trois leçons de cette histoire. D’une part, tout effort qui n’est pas structurel est un coup d’épée dans l’eau : vendre une partie des participations de l’État peut rapporter quelques milliards, mais ne modifie pas l’équation. Deux : plus on s’y prend tard, plus l’effort est important. C’est ce que l’on avait déjà reproché au premier plan budgétaire de l’Arizona, qui ne déploie vraiment ses effets qu’à la fin de la législature. Trois : si, en prime, la conjoncture est incertaine et que le taux moyen payé sur le stock de dette est amené à s’élever, on est encore plus poussé à agir vite.
La seule limite est celle de ne pas trop frapper sur la tête des entreprises et des ménages, pour ne pas casser la machine : on s’aperçoit que, déjà, les ménages puisent dans leur épargne pour continuer à consommer et investir, ce qui n’est pas sain à terme. Comme l’a souligné le ministre des Finances, Jan Jambon, il n’y a que trois manières de procéder pour restaurer les finances publiques : réformer, économiser ou taxer. Et encore, de ce dernier côté, la marge est faible, surtout si, comme la taxe sur les plus-values le démontre, on s’en prend à nouveau à la classe moyenne. Il reste donc à s’atteler à reformer et économiser. Et très vite.
Suivez Trends-Tendances sur Facebook, Instagram, LinkedIn et Bluesky pour rester informé(e) des dernières tendances économiques, financières et entrepreneuriales.