Opportunités dans les grandes capitalisations européennes
En dépit d’une image souvent écornée par rapport aux performances dégagées sur la Bourse américaine, les actions européennes ont été une source de performances solides durant la dernière décennie.
L’Europe est une zone qui est souvent décriée par les gestionnaires de fonds globaux ou par les spécialistes des fonds mixtes flexibles. Investir dans des sociétés européennes est toutefois rassurant pour les particuliers belges, et il existe de nombreux produits très bien notés chez Morningstar (quatre étoiles ou plus) affichant des performances annualisées tournant autour de 10% sur la dernière décennie.
Tous les fonds du tableau ont dégagé une performance très soutenue depuis le début de l’année, avec une progression moyenne de 18% pour les cinq produits de notre échantillon. Il faut tout d’abord constater qu’en dépit de leurs performances relativement comparables à long terme, les stratégies d’investissement peuvent être très différentes, entre la stratégie basée sur les actions de qualité et de croissance chez Comgest ou Jupiter, et le positionnement plus axé sur les actions cycliques du fonds de Janus Henderson ou JPMorgan Asset Management.
Soutien économique
Tom O’Hara, cogestionnaire du fonds Janus Henderson Continental European Fund, souligne d’ailleurs que son fonds a rarement été aussi axé sur les actions value. “Nous sommes surpondérés sur les perspectives de réouverture des économies européennes, notamment sur les matières premières et l’énergie, précise-t-il, tandis que nous sommes sous-pondérés sur la technologie.” Le gestionnaire constate que la valorisation des groupes pétroliers était tombée sur des niveaux extrêmement attractifs alors que ces groupes seront essentiels pour assurer une transition ordonnée vers la production d’énergies renouvelables.
Les sociétés peu endettées qui sont en mesure de relever leurs prix resteront une proposition d’investissement attractive.”
Alistair Wittet (Comgest)
Tom O’Hara ne se montre pas inquieté par les risques d’une hausse de l’inflation à court terme. “Les programmes budgétaires vont être significatifs durant les prochaines années, que ce soit aux Etats-Unis ou en Europe. Nous tablons également sur un cycle d’investissements très soutenu dans la construction maritime, et certainement dans les équipements miniers pour faire face à la demande de métaux liée à la transition énergétique. Tant que l’actualité politique reste stable et que l’économie s’engage sur la voie d’une transition énergétique ordonnée, nous devrions encore avoir une bonne décennie au niveau boursier.
Alistair Wittet fait partie de l’équipe de gestion de Comgest Growth Europe. Celle-ci affiche la meilleure performance sur 10 ans avec une stratégie qui privilégie la qualité et la croissance. Plus de 50% des actifs sous gestion sont exposés sur la technologie et les soins de santé. Le gestionnaire indique que la bonne performance de 2021 est liée notamment à la présence de plusieurs valeurs exposées sur la normalisation des économies, comme Heineken, LVMH ou Inditex. “Nous faisons traditionnellement peu de rotations dans le portefeuille, confie Alistair Wittet, et nous investissons avec une approche de très long terme sur des groupes qui sont en mesure de dégager une croissance moyenne de leurs résultats tournant autour de 12%. Dans un monde où les taux d’intérêt et les prix montent, les sociétés peu endettées qui sont en mesure de relever leurs prix resteront une proposition d’investissement attractive.”
Nous sommes surpondérés sur les perspectives de réouverture des économies européennes, notamment sur les matières premières et l’énergie.
Tom O’Hara (Janus Henderson)
Parmi elles, ASML, qui constitue un exemple de société qui présente beaucoup de valeur pour un investisseur en actions de croissance. “Ce groupe néerlandais est un maillon essentiel de l’industrie des semi-conducteurs et à ce jour, il ne dispose pas de concurrent immédiat dans l’impression très fine des puces électroniques, ajoute le gestionnaire. Tous les géants mondiaux (comme Intel, Samsung ou TSMC) utilisent aujourd’hui les machines construites par ASML.”
Dans ce contexte, ce groupe est également en mesure de fixer ses prix et de les relever à chaque nouvelle itération de son matériel. “Nous avons constitué cette position à un cours de 160 euros par action en 2018, et nous tablons sur un bénéfice par action de 23 euros en 2025, poursuit Alistair Wittet. Si cette hypothèse se réalise, il est difficile de considérer ASML comme un titre richement valorisé. Le rapport cours/bénéfice que nous payons lorsque nous constituons une position a donc peu d’importance si le groupe est en mesure d’atteindre ses objectifs“.
ASML est également la principale position dans le fonds géré par Michael Barakos chez JPMorgan Asset Management. Ce fonds est toutefois plus diversifié dans l’approche sectorielle, avec une centaine de positions contre une quarantaine pour le produit de Comgest. Michael Barakos met en avant les perspectives d’un groupe comme Volkswagen, qui constitue une immense opportunité en termes de valorisation mais également de croissance à long terme. “Le groupe est en train de se transformer et devrait produire un million de véhicules électriques en 2021, soit plus que Tesla. Et ce chiffre devrait encore doubler d’ici 2025.” Comme Tom O’Hara, Michael Barakos pointe également la transformation des groupes pétroliers depuis 2020 pour améliorer leur durabilité. “Ils ont finalement réalisé la nécessité de réinventer leur modèle d’entreprise.”
Vision à long terme
Toujours dans la thématique de l’électrification et de la transition énergétique, Mark Nichols, cogestionnaire du fonds Jupiter European Growth, rappelle que les voitures électriques sont plus lourdes et accélèrent plus rapidement, ce qui provoque une usure plus rapide des pneus. “Ils devront probablement être changés plus fréquemment. Ceci devrait bénéficier à un groupe qui produit des pneumatiques de qualité comme Michelin.”
Mark Nichols apprécie également les perspectives de redressement de certains secteurs, mais souligne que le potentiel à long terme n’a pas fondamentalement varié. “La pandémie n’a pas changé notre stratégie d’un iota. Nous avons profité de la faiblesse des valorisations sur certaines valeurs (notamment ASML, Ndlr) pour profiter des opportunités uniques qui se sont présentées.” Le gestionnaire met en avant les perspectives de Lonza, un groupe qui permet de s’exposer sur les perspectives de croissance du secteur des soins de santé sans être impacté par les risques liés au développement des médicaments. “A l’inverse, nous avons toujours évité d’investir sur les valeurs biotechs en raison du risque binaire de leur profil d’investissement”, ajoute Mark Nichols.
Son portefeuille reste donc positionné sur des tendances de croissance de long terme. “Les sociétés que nous détenons devraient bien se comporter en 2021, mais également en 2022 et pour les exercices qui suivront. L’analyse récente de notre portefeuille nous a toutefois permis de constater que 80% de nos positions vont être impactées positivement par le thème de la réouverture.”
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