‘Les taux bas ne sont pas que positifs pour l’économie’

© iStock

Selon Peter De Keyzer, économiste en chef chez BNP Paribas Fortis, les épargnants regardent surtout le taux nominal et non le taux réel. “En 2011, le taux de l’épargne était beaucoup plus élevé qu’aujourd’hui, mais l’inflation était plus forte. L’épargnant perdait donc à peu près 1% de pouvoir d’achat sur base annuelle.”

Le ministre de l’Agenda Numérique Alexander De Croo (Open Vld) travaille à l’élaboration d’un cadre légal pour les personnes qui désirent gagner de l’argent supplémentaire via des plateformes internet comme AirBnB. Prévoyez-vous que ce que l’on appelle l’économie partagée jouera un rôle important dans l’économie belge ? Et faut-il un système fiscal particulier ou bien des règles particulières sont-elles appropriées ?

Peter De Keyzer: Il est clair que notre législation du travail, notre fiscalité et notre sécurité sociale ne sont pas adaptées à une économie plus flexible. Les citoyens demandent toutefois eux-mêmes davantage de flexibilité et ils continueront à le faire. Ils utilisent Bol.com et HelloFresh pour leurs achats, Uber pour leurs déplacements, AirBnB pour leurs nuitées et O-desk pour leurs activités de free-lance. Les Pays-Bas sont déjà beaucoup plus loin que la Belgique en la matière et il y a aujourd’hui environ un million de free-lances au travail. Ceux-ci ne se laisseront pas arrêter par la frontière avec la Belgique. Il est par conséquent grand temps que nous veillions à un statut flexible pour les personnes désireuses d’avoir des revenus supplémentaires de manière flexible. Il est entre-temps inévitable que cet appel de citoyens entrepreneurs vers plus de flexibilité continuera à se heurter à la résistance au changement de beaucoup de partenaires sociaux.

La semaine passée, l’homme à la tête de KBC, Johan Thijs, remettait en question la viabilité du taux d’intérêt minimum de 0,11% sur le livret d’épargne. Croyez-vous que ce plancher disparaîtra au cours des prochains mois ? Ou bien le taux d’intérêt minimum est-il viable ?

Un intérêt négatif est, pour un très grand nombre de citoyens, une étape particulièrement importante. Le problème est que beaucoup de personnes regardent surtout le taux nominal et non le taux réel. En 2011, le taux d’intérêt sur l’épargne était beaucoup plus élevé qu’aujourd’hui, mais l’inflation était encore plus élevée. En fin de compte, un épargnant perdait donc environ 1% de son pouvoir d’achat sur base annuelle.

Les citoyens ont tout de même laissé leur argent sur les livrets d’épargne et ils ont épargné de manière acharnée. Avec une inflation à zéro pour cent, vous perdriez seulement 1% de pouvoir d’achat si les taux d’intérêt se situaient également à -1%. Cela se ressent toutefois de manière totalement différente pour la majorité des personnes. Rien que pour cette raison, il semble difficile de voir les taux d’intérêt encore diminuer de manière structurelle. Si les banques doivent payer des intérêts négatifs à la BCE alors que les taux d’intérêt de l’épargne restent inchangés, cela pèsera surtout sur leur rentabilité. Il est dans ce cas également évident que les taux d’intérêt historiquement bas ne sont pas que positifs pour l’économie.

Le week-end dernier, l’avenir du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne était en jeu. Quelles seraient les conséquences d’un “Brexit” pour les entreprises belges et pour notre économie dans son ensemble ?

Un Brexit engendrerait surtout énormément d’inquiétude et d’incertitude au sujet de l’avenir de l’UE. Que deviendra le statut du Royaume-Uni ? Cela se limitera-t-il au Royaume-Uni ou d’autres pays suivront-ils ? Pour les investissements internationaux surtout, nous pourrions nous passer d’une telle incertitude. A plus long terme, une UE sans le Royaume-Uni pourrait devenir un continent moins concurrentiel. Des pays comme l’Allemagne, la Suède, la Finlande ou les Pays-Bas ont également conscience de cela. Ensemble avec le Royaume-Uni, ils sont traditionnellement plus orientés vers le marché libre. Ils croient dans l’innovation, la flexibilité, la concurrence et le libre-échange comme sources de croissance et de progrès. Ce sont également les pays de l’UE qui occupent le top 10 du classement compétitif du Forum Economique Mondial. Notre meilleur espoir de plus de croissance en Europe, c’est une Europe avec le Royaume-Uni.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content