Investir: les erreurs à ne pas commettre

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Investir n’est pas une sinécure. L’exercice exige des modes de pensée et d’action qui ne correspondent pas aux qualités naturelles de l’être humain. Les pièges possibles sont nombreux et le risque d’erreur est grand. Nous avons dressé la liste des principaux écueils, accompagnés de conseils pour les éviter.

Avant de se pencher sur les erreurs fréquemment commises par les investisseurs, il est nécessaire de revenir brièvement sur le fonctionnement du cerveau humain et la façon dont il va à l’encontre d’une stratégie d’investissement efficace. L’être humain possède deux systèmes de pensée. Le premier est porté par les émotions et nous aide à décider très rapidement sur la base de préjugés, de préférences et d’expériences passées. Mais nous possédons également un système de pensée plus lent, plus rationnel, dans le cadre duquel la prise de décision est précédée d’un traitement de toutes les informations disponibles et d’une réflexion logique. Ce second système demande cependant plus de temps, d’énergie et de volonté. Voilà pouqruoi, pour des raisons d’évolution, le système de pensée émotionnel est largement dominant aujourd’hui. Or, c’est bien du système rationnel dont les investisseurs ont besoin. Ils éviteront les erreurs en domptant leurs émotions et en laissant s’exprimer leur raison.

Nos enfants sont toujours les plus beaux. Idem pour nos idées. Veillez donc à ne pas tomber amoureux de vos placements…

Excès d’informations

En informatique, on considère que plus on dispose d’informations, plus le résultat sera précis et de qualité. Pour les êtres humains, c’est l’inverse. Plus nous avons d’informations, moins nous sommes en mesure de l’analyser… mais plus grande est notre confiance en nos capacités d’analyse. C’est ce que révèle une expérience dans le cadre de laquelle des analystes financiers ont été invités à analyser des entreprises à partir d’informations de plus en plus nombreuses. Plus ils pensaient en savoir sur l’entreprise, moins leur analyse et leurs prévisions étaient correctes, mais plus grande était leur assurance les concernant.

Un excès d’information brouille notre vision de la situation globale. Le plus grand service que vous pouvez vous rendre en tant qu’investisseur est de définir à l’avance vos objectifs généraux et de construire une stratégie d’investissement à long terme centrée sur ceux-ci. Si vous êtes un peu plus âgé et souhaitez surtout conserver votre capital, vous devrez constituer un portefeuille plus défensif, avec davantage d’obligations publiques et d’autres titres de dette que d’actions. Si vous aimez les risques et voulez surtout accroître votre capital à long terme, vous devrez privilégier les actions et les secteurs orientés sur la croissance.

Il est utile de tracer ces grandes lignes à l’avance. Prenez suffisamment de temps pour le faire. Notez-les et revenez-y régulièrement pour vous assurer que vous ne vous en écartez pas et ne prenez pas de mauvaises décisions sur la base d’informations ponctuelles qui n’ont aucun rapport avec votre stratégie générale.

Le processus avant le résultat

L’être humain a naturellement tendance à attribuer un résultat favorable à son savoir-faire et à imputer tout mauvais résultat à autrui ou à des circonstances extérieures à leur contrôle. Ne tombez pas dans ce piège si vous investissez. Ne vous focalisez pas sur des résultats sur lesquels vous n’avez guère d’emprise, même si ceux-ci sont conformes à ce que vous aviez prévu.

Imaginez que vous investissez dans le secteur de l’hydrogène parce que vous pensez que cette technologie est presque au point et que les entreprises qui sont actives dans ce secteur verront leurs bénéfices exploser au cours des années à venir. Après plusieurs années, il se pourrait qu’elles ne soient toujours pas rentables mais que les cours des actions aient énormément augmenté parce qu’une foule de nouvelles réglementations favorise les applications à base d’hydrogène. Le résultat – les cours plus élevés – est bon, mais vous vous êtes trompé sur la raison pour laquelle ces cours ont augmenté.

C’est pourquoi il est préférable de vous évaluer à l’aune du processus que vous avez suivi pour prendre vos décisions d’investissement et non en fonction de vos résultats finaux. Le processus est sous votre contrôle, pas les résultats. Pour y parvenir, vous pouvez par exemple tenir un journal. Notez-y les raisons, vos motivations et vos doutes pour chaque décision d’investissement. Vous pourrez ensuite vérifier a posteriori si votre raisonnement était correct, erroné ou complet.

Par ailleurs, évitez de demeurer trop fasciné par vos actions. On le sait, nos enfants sont toujours les plus beaux. Idem pour nos idées. L’être humain a tendance à tomber amoureux de ses propres idées, à n’être ouvert qu’aux informations qui le confortent dans ses convictions et non aux informations discordantes. On tend à ignorer tout élément qui va à l’encontre de sa thèse et peut provoquer de lourdes pertes.Veillez dès lors à avoir ou rechercher autant d’informations qui contredisent votre hypothèse que d’informations qui la confirment. Imaginez des scénarios qui fragilisent votre thèse et évaluez la probabilité qu’ils se réalisent. Si vous investissez dans une catégorie d’actifs donnée, imaginez ce qui pourrait se passer si ce marché venait à sous-performer au cours des années. Si vous investissez dans une action, imaginez des scénarios dans lesquels cette entreprise serait moins performante.

Investir: les erreurs à ne pas commettre
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Vive le sceptique

Dans le même ordre d’idée, soyez attentif aux excès d’optimisme qui peuvent caractériser les médias financiers et les recommandations des courtiers. Selon le fournisseur de données Factset, les analystes recommandent d’acheter 55% du S&P 500 – l’indice des 500 plus grandes entreprises américaines – et d’en conserver 38%. Ils ne préconisent la vente que pour 7% des actions de l’indice. En d’autres termes, ils conseillent de conserver ou d’acheter 93% du marché. Certes, “l’optimisme est un devoir moral” mais il peut coûter très cher à un investisseur. Une saine dose de scepticisme est nécessaire pour chaque idée ou hypothèse que vous étudiez. Un petit cours de “résistance à la pression du groupe” est toujours utile dans un environnement où la majorité est convaincue que le marché ne peut que s’apprécier.

Changez d’opinion

Ne tenir compte que des informations qui confortent votre thèse peut même vous précipiter dans des visions dogmatiques ou vous amener à vous accrocher à une hypothèse concernant une position donnée alors même que les faits sur lesquels elle repose ont changé. Jusqu’il y a deux ans, sa dynamique et sa croissance faisaient du secteur technologique chinois une opportunité d’investissement prometteuse. Tout s’est effondré quand le gouvernement chinois a déversé sur ces entreprises technologiques une montagne de réglementations qui ont raboté considérablement leurs bénéfices et leurs possibilités de croissance. Les pertes qu’accusent aujourd’hui les investisseurs qui ont conservé leur investissement se chiffrent en dizaines de pour cent.

Soyez attentif aux excès d’optimisme qui peuvent caractériser les médias financiers et les recommandations des courtiers.

Si nous nous accrochons aussi longtemps à nos convictions, c’est parce que nous y avons investi énormément de temps et d’énergie. Plus vous consacrez de temps et d’énergie à une idée, plus il sera difficile de vous en défaire. Mais vous devrez en être capable pour éviter de lourdes pertes sur vos investissements. “Si les faits changent, changez d’avis” ou “Ayez des opinions fortes, mais ne vous y accrochez pas” sont des devises que vous devez vous approprier.

Laissez tomber les perdants

Les investisseurs commettent souvent l’erreur de conserver trop longtemps d’importantes positions perdantes dans l’espoir qu’elles finissent à terme par remonter la pente. Plus les pertes sont importantes, plus la probabilité d’un redressement est faible. Une position qui chute de 100 à 65 essuie une perte de 35%. Mais pour remonter à 100, elle devra gagner 54%. Vendez vos grandes positions perdantes, même si c’est plus difficile psychologiquement. Mentalement, les pertes pèsent deux à trois fois plus lourd que les bénéfices, mais il faut savoir surmonter la douleur.

Vous pouvez atténuer le risque d’un sentiment de perte excessif en ne regardant pas votre portefeuille d’investissement tous les jours. Les marchés financiers subissent naturellement d’énormes fluctuations, mais pour la plupart des investisseurs, c’est le long terme qui compte. Il n’y a guère d’utilité à revenir chaque jour sur votre portefeuille avec le risque de vous émouvoir de pertes qui peuvent n’être que temporaires et ne sont peut-être pas imputables à une erreur d’appréciation dans votre décision d’investissement. Dans ce dernier cas, la valeur de la position finira par remonter à la surface et c’est alors qu’il faudra vendre. A l’inverse, évitez de vendre trop rapidement vos positions gagnantes. C’est une erreur fréquente. “Coupez vos pertes, laissez courir vos gains” est une devise beaucoup trop peu suivie.

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