Un nouvel ETF veut battre Warren Buffett, mais c’est peut-être plus simple à dire qu’à faire

Des actions de Berkshire Hathaway et des produits dérivés : voilà la recette d’un ETF qui veut battre la performance de l’investisseur légendaire Warren Buffett. Mais est-ce si simple ?

On ne le présente plus : Warren Buffett est déjà une légende vivante du monde de l’investissement. D’aucuns le voient comme modèle et essaient de suivre ses conseils et ses investissements pour construire leur propre patrimoine. La solution la plus simple pour ce faire, c’est d’acheter les actions du conglomérat de Buffett, Berkshire Hathaway. Mais ce n’est pas vraiment si simple, car il faut savoir mettre le prix : une seule action vaut autant qu’une belle maison en Belgique : 700.000 dollars environ, à l’heure d’écrire ces lignes.

C’est que Warren Buffett n’a jamais voulu splitter les actions. Cela veut dire diviser une action en plusieurs. De nombreuses entreprises font cela lorsque leurs titres ont trop gagné en valeur, pour stimuler les investissements avec des actions moins chères à l’unité.

Berkshire a cependant créé des actions de classe B, il y a trente ans environ. C’était pour calmer les demandes de splitting et autres attaques (lire plus bas). La différence avec les actions de classe A est que les classe A ont plus de droits de vote et sont prioritaires pour le versement du dividende. L’action de classe B de Berkshire se négocie à 466 dollars l’unité.

ETF à effet de levier

C’est déjà bien plus abordable, et permet aux investisseurs de suivre le portefeuille de Berkshire. Mais un courtier sud-coréen veut aller encore une étape plus loin : il veut lancer un ETF qui comprend ces actions ainsi que des produits dérivés pour booster leur performance. Ce fonds répliquerait donc le cours journalier de l’action, mais multiplié par 3. Si l’action gagne 5% en une journée, le fonds en gagne 15, en somme. A l’inverse aussi : les pertes seront triplées. La part de l’ETF devrait coûter bien moins que l’action de classe B de Berkshire.

Pour ce faire, Kiwoom Securities s’associe à l’acteur américain Tidal Investments, rapporte Bloomberg. Il y a de plus en plus de tels ETF à une action, appelés ETF avec effet de levier, sur le marché. Mais les autres produits couvrent plutôt des actions plus volatiles, comme Nvidia ou Tesla. “Berkshire y est diamétralement opposé”, note Gavin Filmore de Tidal, cité par Bloomberg. Il s’agit en effet plutôt d’une action réputée stable et de valeur.

Rendement ?

Et voilà un peu la question : les investisseurs qui achètent des parts de ces ETF à effet de levier le font en général uniquement pour une journée, car les actions en question peuvent gagner ou perdre beaucoup de valeur sur cette période (et les investisseurs peuvent donc rapidement doubler ou tripler la mise). Mais Berkshire fluctue en général beaucoup moins sur une journée. Et ces produits dérivés dévient généralement de leur objectif, à plus long terme. Berkshire est plutôt vu comme un actif à conserver pour le long terme – il n’est donc pas sûr qu’on sache décupler son rendement avec un tel fonds.

Kiwoom a entrepris les démarches auprès du gendarme boursier pour lancer son ETF sur le marché sud-coréen. S’il parvient à attirer de nombreux investisseurs, on peut imaginer d’autres acteurs pourraient lancer un tel produit, ailleurs dans le monde.

De quoi vexer Buffett

Il est fort à parier que ce produit déplaise au principal intéressé. Buffett a déjà critiqué les produits dérivés comme étant des “armes financières de destruction massive”.

Ce n’est en fait pas la première fois qu’on essaie de créer un tel fonds, pour répliquer le rendement de Berkshire. En 1995, un homme politique américain du nom de Sam Katz avait lancé un véhicule d’investissement combinant actions de Berkshire et obligations. Il voulait ainsi rendre les titres plus accessibles pour les investisseurs. Mais Buffett a sabordé cette initiative, en lançant ses actions de classe B. Les investisseurs se sont alors jeté sur ces actions et ont vite oublié le fonds de Katz.

Buffett avait vertement critiqué ce type de fonds, à l’époque. Ils seraient “accompagnés de frais élevés” et vendus “en masse à des acheteurs non avertis”, par des courtiers qui ne voient que leur importante commission. Pour Berkshire, ce fonds aurait signifié “à la fois des centaines de milliers de propriétaires indirects mécontents (c’est-à-dire via les fonds) et une réputation entachée.” Il n’en pense sans doute pas moins aujourd’hui.

Autrement, il est d’ailleurs impossible de créer un ETF qui réplique le portefeuille de Berkshire. Le conglomérat détient de nombreuses actions d’entreprises américaines (et asiatiques, dans une moindre mesure). Qu’on pourrait acheter certes, selon la même pondération. Mais il détient aussi de nombreuses entreprises privées, qui ne sont pas cotées en bourse.

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