Retour de Trump: les conseils des spécialistes pour les prochains mois d’incertitude sur les marchés financiers

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Le nouveau mandat de l’entrepreneur américain est une source majeure d’incertitudes pour l’économie mondiale. Les actions américaines et le dollar constituent les principaux conseils des spécialistes pour les prochains mois.

Le nouveau mandat présidentielle de Donald Trump à la tête des États-Unis ne va pas aller sans provoquer une volatilité importante sur les marchés financiers en raison de ses déclarations fantasques, menaçantes et souvent contradictoires. Samy Chaar, chef économiste chez Lombard Odier, souligne la nette victoire républicaine, synonyme d’une politique économique qui va être dominée par des réductions d’impôts, des assouplissements réglementaires, des hausses de tarifs douaniers et un combat contre l’immigration clandestine. “C’est le retour de la doctrine de l’America First, avec une impulsion qui devrait être positive pour la croissance, mais également pour l’inflation”, estime Samy Chaar.

Hausse des tarifs

À court terme, la politique économique menée devrait être assez favorable aux grandes entreprises et aux classes sociales aisées, et soutenir l’évolution des résultats en 2025. “Nous maintenons notre préférence actuelle pour les actions américaines. Lors de son précédent mandat, Donald Trump avait l’habitude de mesurer son succès à l’évolution des indices boursiers.” Johanna Kyrklund, group CIO chez Schroders, estime toutefois que les perspectives sont moins favorables pour les pays qui vont être touchés par la hausse des tarifs, et notamment l’Europe qui souffre d’un manque d’unité pour être en mesure de répondre à une guerre commerciale avec les États-Unis.

Samy Chaar souligne néanmoins que ces menaces tarifaires seront vraisemblablement utilisées comme un outil transactionnel avec les autres blocs économiques, pour négocier des accords visant l’achat de produits américains. “En définitive, nous pensons que les tarifs ne seront pas mis en œuvre aux niveaux annoncés lors de la campagne électorale.”

Chez Pictet Asset Management, le stratégiste Christopher Dembik estime que le retour de Trump pourrait finalement ne pas être une mauvaise chose pour l’Europe sur le long terme. “Il est certainement plus facile pour le Vieux Continent de gérer l’approche transactionnelle de Trump que la politique de subventions conduite par Biden, qui a abouti à une désindustrialisation à grande vitesse de l’Europe.” Cette dernière pourrait utiliser l’achat d’énergie fossile américaine comme base de discussion.

Lors de son précédent mandat, Trump avait l’habitude de mesurer son succès à l’évolution des indices boursiers.
Samy Chaar

Samy Chaar

chef économiste

Impacts sectoriels

D’un point de vue historique, les courbes de taux ont tendance à se décaler lorsqu’un seul parti prend le contrôle de l’ensemble des branches du pouvoir aux États-Unis, ce qui est généralement positif pour les marges d’intérêt et le secteur financier. Johan Van Geeteruyen, CIO fundamental equity chez DPAM, indique que l’élection de 2016 “avait rapidement bénéficié aux actions financières et aux petites capitalisations. Cette victoire pourrait également bénéficier à court terme aux secteurs plus cycliques (énergie, etc.), tandis que la technologie, la défense et les producteurs de voitures pourraient également bien se comporter.” De même, la volonté de lever certaines réglementations devrait également être de nature à jouer en faveur des banques basées aux États-Unis.

Pour les autres secteurs du marché américain, l’impact est encore difficile à estimer. Le retour de l’inflation devrait être gérable pour les sociétés qui sont en mesure de relever leurs prix sans affecter leur demande, et plus particulièrement pour le secteur technologique. D’un autre côté, la rentabilité de certains secteurs pourrait également être mise sous pression, notamment ceux fortement dépendants des importations en provenance de Chine (comme le textile ou l’électronique grand public) ou ceux qui dépendent d’une main-d’œuvre bon marché issue de l’immigration (comme la construction ou la distribution).

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Changement climatique

Un autre impact à court terme va être le renforcement du dollar face à l’ensemble des devises internationales. Pour les classes d’actifs émergentes, cette élection n’est pas une bonne nouvelle, car les devises vont rester sous pression et l’imposition de tarifs va peser sur l’activité des groupes exportateurs. Cette remarque est également valable pour les groupes européens qui exportent vers les États-Unis, comme les producteurs allemands d’automobiles de luxe.

Enfin, une administration Trump va entraîner un retrait du gouvernement américain des efforts visant à atténuer l’impact du changement climatique, avec des conséquences négatives pour les entreprises exposées sur cette thématique au niveau américain. “Donald Trump a été historiquement opposé aux politiques favorisant les énergies renouvelables, mais ce positionnement s’est considérablement modéré depuis l’arrivée d’Elon Musk à ses côtés”, constate Johan Van Geeteruyen. En outre, de nombreux élus républicains ont bénéficié des importants investissements réalisés dans leur État dans le cadre de l’Inflation Reduction Act (IRA) voté sous la présidence de Joe Biden, et se montreront probablement réticents au retrait de ce programme.

Profil atypique

Pour un investisseur, les fluctuations à court terme ne doivent toutefois pas masquer l’impact de long terme de la politique qui va être menée par le gouvernement Trump, et notamment un niveau plus élevé pour l’inflation, ainsi qu’une potentielle perte d’indépendance de la Réserve fédérale. “L’inflation va probablement se montrer plus résistante que prévu, avec une Réserve fédérale qui va être contrainte de maintenir son taux directeur au-dessus du niveau neutre de 3,5%”, souligne George Brown, senior US economist chez Schroders.

Le cycle actuel de détente monétaire devrait également arriver assez rapidement à son terme, probablement en janvier 2025, avec un taux directeur qui restera au-dessus de 4%. Au niveau des dettes souveraines, la dette à long terme de l’État américain ne va probablement plus s’apprécier de sitôt, ce qui milite pour une préférence vers la dette européenne, qui devrait encore bénéficier de la détente monétaire orchestrée par la BCE, et pour l’or, afin d’atténuer les risques géopolitiques.

“Les perspectives restent positives pour le métal jaune, même si la hausse des taux devrait limiter la hausse à court terme”, indique Samy Chaar, qui annonce un objectif à 12 mois autour de 2.900 dollars par once. “À l’inverse, l’augmentation de la production de pétrole de schiste aux États-Unis est de nature à peser sur les cours du brut, qui pourraient tomber sous les 70 dollars dans le courant de l’année prochaine.”

Conclusion

L’élection de Donald Trump va représenter un défi pour les gestionnaires d’actifs durant les prochaines années, avec un niveau de chaos qui augmentera. Dans l’ensemble, l’impact à court terme devrait toutefois être positif sur les cours des actions américaines, et notamment pour les petites et moyennes capitalisations qui avaient été parmi les principales bénéficiaires de l’élection de Trump en 2016.

Pour Christopher Dembik, “la baisse de la fiscalité pour les entreprises américaines devrait accélérer les investissements des entreprises, notamment dans l’IA, avec un impact positif pour les actions américaines”, avec une volatilité qui va rester présente durant les deux prochains mois, notamment en raison des conflits géopolitiques qui continuent de se dérouler à plusieurs endroits de la planète (Ukraine, Palestine…). À moyen terme, l’impact est nettement moins clair, en particulier si l’inflation venait à grimper fortement et à pousser les taux à 10 ans au-dessus de la barre de 5%.

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