Gare aux frais qui rognent le rendement d’un fonds

Tous ceux qui investissent en fonds se voient facturer des frais d’entrée et des frais courants. Une récente étude de la FSMA, l’organe de surveillance des marchés financiers belges, montre que ces différents frais peuvent accaparer 30 à 50% de la plus-value brute en 10 ans.

Malgré leurs performances globalement médiocres en 2022, les fonds de placement restent très populaires dans notre pays. La Beama, l’association belge des asset managers, évoque pour fin décembre un actif net total de 235,7 milliards d’euros pour l’ensemble des fonds publics qui peuvent être commercialisés en Belgique. Cela correspond à une hausse de près de 18% en quatre ans.

“Un fonds permet de diversifier aisément un portefeuille sur plusieurs catégories d’actifs, secteurs, régions et entreprises, explique Erik Joly, économiste en chef chez ABN Amro. C’est crucial, en particulier pour ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes pour multiplier les investissements. Mais les fonds recèlent également des possibilités intéressantes pour les plus grands portefeuilles. Ils permettent par exemple d’investir dans des thèmes spécifiques ou dans certains pays exotiques.”

Bien entendu, de tels produits s’accompagnent de frais. Ceux-ci doivent être communiqués clairement à l’investisseur particulier, notamment par le biais du document d’information clé pour l’investisseur (KID) standardisé.

Frais d’entrée

Il y a d’abord les frais d’entrée. Vous ne les payez qu’une seule fois, au moment où vous achetez les parts d’un fonds. Ils sont généralement exprimés en un pourcentage du capital que vous investissez. Selon la Febelfin, la fédération belge du secteur financier, les frais d’entrée sont généralement compris entre 2% et 3%.

“Pour un investisseur particulier, il n’est pas toujours facile d’évaluer ces frais, explique-t-on à la FSMA, l’organe qui supervise le secteur financier belge. Il est parfois difficile de déterminer s’ils sont plus élevés ou plus faibles que ceux de la concurrence. L’impact de ces frais sur le rendement attendu d’un investissement n’est pas plus aisé à estimer.”

C’est pourquoi la FSMA s’est lancée elle-même dans une analyse. Dans sa récente étude comparative qui cartographie les frais moyens par type de fonds, nous pouvons lire que les frais d’entrée maximums pour des investisseurs non professionnels s’établissent en moyenne à 2,2%. Un quart des fonds facturent cependant plus de 3,5% des frais d’entrée. Les fonds mixtes, qui comprennent des actions et des obligations, affichent des frais d’entrée moyens légèrement inférieurs à la moyenne (2,1%), alors que les frais d’entrée des fonds d’actions (2,3%) et surtout de fonds structurés (3,4%) sont plus élevés.

Avec des frais d’entrée élevés, les investisseurs partent avec une longueur de retard. Sachez cependant qu’il est parfois possible de les négocier avec votre banquier ou votre gestionnaire de patrimoine. Les chiffres mentionnés dans l’étude sont les frais d’entrée maximums repris dans le KID.

Frais courants

“Un investisseur en fonds doit également tenir compte des frais courants, embraye Erik Joly.

Ces frais sont dus chaque année. Ils couvrent principalement les frais de gestion et éventuellement de distribution du fonds, ainsi que divers frais administratifs.” Selon Febelfin, ils s’établissent en moyenne entre 1% et 2%. En principe, plus ces frais sont élevés, plus la gestion du fonds est active.

La FSMA a également analysé ces frais. Et découvert le négatif des frais d’entrée. Les frais courants sont en moyenne plus élevés dans les fonds mixtes (1,6%) que dans les fonds d’actions (1,4%) et surtout les fonds obligataires (0,7%). Pour l’ensemble des fonds de placement, la moyenne s’établit à 1,5%.

Autres frais et taxes

“Si vous achetez des parts d’un fonds assorti d’une échéance, vous devrez payer des frais de sortie uniques si vous souhaitez récupérer une partie – ou la totalité – de votre mise avant cette échéance, poursuit Erik Joly. Certains fonds sans échéance en facturent aussi, même si c’est plutôt rare. Dans quelques cas, des commissions de performance sont également facturées si le gestionnaire du fonds dépasse un rendement préétabli.”

Vous pouvez également être amené à payer une taxe boursière et/ou un impôt sur la plus-value à la revente de vos parts. Et les montants de plus de 500.000 euros sont soumis à une taxe sur les comptes-titres. Enfin, votre banquier ou votre gestionnaire de patrimoine vous facturera en principe des frais pour la gestion d’un tel compte-titres.

Mais selon la FSMA, un investisseur particulier doit surtout être attentif aux frais d’entrée et aux frais courants. “Les frais de sortie et les commissions de performance sont rares, et les taxes boursières et autres droits de garde sont généralement uniformes pour tous les fonds”, explique-t-on.

Négocier

Nous allons démontrer l’impact des frais d’entrée et des frais courants sur le rendement de votre fonds à l’aide d’un exemple de calcul que reprend la FSMA dans son étude (voir tableau “Rendement des fonds de placement avec différents frais”). Le gendarme des marchés financiers envisage un investissement de 10.000 euros dans un fonds sur une période de 10 ans. Dans l’exemple, le fonds génère un rendement brut annuel de 5%.

Imaginez, de manière purement hypothétique, que vous ne payez aucuns frais. Dans ce cas, la plus-value nette de votre investissement après 10 ans s’établit à 6.289 euros.

Si vous optez pour un fonds dont les frais relèvent de la moyenne basse (2,2% de frais d’entrée et 1,1% de frais courant), votre fonds générera en 10 ans une plus-value nette de 4.338 euros. L’ensemble des frais (1.951 euros) représentera 31% de la plus-value brute.

Si vous payez des frais moyens (2,2% de frais d’entrée, 1,5% de frais courant), la plus-value nette retombe à 3.796 euros. En 10 ans, les frais (2.493 euros) absorbent donc 39,6% de la plus-value brute.

Si les frais qui vous sont facturés appartiennent à la moyenne haute (3,5% de frais d’entrée 1,8% de frais courants), votre fonds générera en 10 ans une plus-value nette de 3.223 euros. Les frais totaux (3.066 euros) représentent alors 48,8% de la plus-value brute.

Les frais ont donc un impact majeur sur le rendement final. Dans l’exemple ci-contre, vous gagnez quelque 1.115 euros sur un investissement de 10.000 euros en optant pour le fonds le moins cher par rapport à un fonds cher, dans l’hypothèse où les deux fonds génèrent le même rendement.

Il est donc important de comparer les frais des fonds de placement, et éventuellement de négocier une remise. Vous trouverez aisément les frais de chaque fonds sur une plateforme indépendante comme MorningStar. “Les frais sont un élément clé pour les investisseurs, peut-on y lire. Les recherches ont systématiquement démontré qu’ils constituaient un prédicteur fiable des futurs rendements d’un fonds.”

“Cela provient du fait que les frais ont un effet cumulatif, et peuvent ainsi absorber une partie significative du rendement, explique Erik Joly. De plus, les frais sont un des éléments les plus aisés à contrôler. Il est impossible de connaître à l’avance les futures performances d’un fonds, mais vous savez exactement ce qu’il vous coûtera.”

“Evitez toutefois de vous focaliser sur les seuls frais, ajoute cependant Erik Joly. La qualité du fonds et de son gestionnaire est au moins aussi importante. Si le gestionnaire parvient à systématiquement surperformer l’indice de référence sur une période prolongée, une rémunération plus élevée est justifiée. En fin de compte, la qualité a un prix.”

Enfin, n’oubliez pas qu’il existe également des alternatives moins chères aux fonds de placement classiques, qui combinent une diversification et structure de frais réduite: les trackers ou ETF.

48,8%

La part de valeur de la plus-value brute absorbée par les frais les plus élevés après 10 ans dans notre exemple.

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Investir en fonds Regardez aussi et surtout les frais.© Getty Images

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