Dividendes: quelles entreprises belges devraient générer une surperformance?
En matière de dividendes, l’évolution à long terme est plus déterminante que le rendement immédiat. En parvenant à relever encore leur coupon en 2022 malgré d’innombrables sources de tensions, diverses entreprises noir-jaune-rouge paraissent bien positionnées pour générer une surperformance.
A l’exception notable du Dax allemand, la plupart des baromètres boursiers comme le Bel20, le Cac40 ou le S&P500 américain sont des indices de prix. Leur évolution ne reflète que le cours des sociétés qui le composent. Ils n’intègrent pas non plus une autre importante composante du rendement en actions: les dividendes. Une information pourtant pas du tout négligeable: selon une étude de référence du gestionnaire Hartford Funds, ces dividendes représentent par exemple historiquement 40% du rendement du S&P500.
Tous les coupons ne se valent toutefois pas. Et se fier uniquement au rendement peut vous réserver de mauvaises surprises. Un rendement très élevé est en effet le signe que les marchés s’attendent à une baisse du dividende… qui finit souvent par arriver.
Hartford Funds s’est plutôt intéressé à l’évolution des dividendes. Et en cette matière, il a pu observer des tendances claires. Par exemple, les entreprises du S&P 500 qui augmentent (ou commencent à verser) leur dividende ont généré un rendement annuel moyen de 10,68% entre 1973 et 2021, avec une volatilité inférieure à l’indice. Par contre, celles qui ont réduit ou supprimé leur dividende ont affiché une perte (-0,46% par an en moyenne) combinée à une volatilité élevée.
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Ces données, on l’a dit, concernent les Etats-Unis. Mais elles sont largement transposables aux autres marchés boursiers. L’indice mondial MSCI World Dividend Growers Quality, rassemblant les actions d’entreprises qui augmentent leur dividende et devraient continuer à le faire, affiche ainsi une surperformance depuis sa création en août 2008, juste avant le plongeon des marchés pour cause de crise financière. Il a généré un rendement annualisé de 6,43%, contre 4,96% pour l’indice global MSCI World. Sa volatilité est également moindre. Par exemple, l’indice a perdu 39,65% entre sa création et le creux des Bourses du 9 mars 2009 contre -48,79% pour le MSCI World.
2022, année de vérité
Pour dénicher les entreprises les mieux parées afin de continuer à améliorer durablement leur dividende, rien de tel qu’une période de tensions multiples comme 2022. Entre inflation, guerre en Ukraine, crise énergétique et hausse des taux, les entreprises ont dû faire face à une multitude d’aléas. Ce qui a engendré quelques surprises en matière de dividendes. La principale victime sur Euronext Bruxelles est sans aucun doute VGP. La société immobilière a dû raboter son coupon de 60% alors qu’elle a subi une perte nette de 122,5 millions d’euros en raison d’importantes dépréciations sur ses entrepôts, coentreprises et projets de développement (logistiques).
Autre déception, Colruyt a annoncé en juin dernier ramener son dividende à 1,10 euro pour son exercice 2022, la première baisse depuis que le distributeur de Hal a commencé à verser un dividende en 1997!
Proximus, par contre, n’a pas réduit son dividende en 2022, s’en tenant à sa promesse de le maintenir à au moins 1,20 euro par action jusqu’en 2023. Mais l’opérateur téléphonique a déjà prévenu que son coupon sera raboté de moitié à 0,60 euro dès 2024.
Marchés rancuniers et craintifs
L’autre enseignement de la saison des dividendes 2022 sur Euronext Bruxelles, c’est que les marchés ont la mémoire longue. En chiffres bruts, le relèvement de moitié du dividende d’AB InBev est attractif. Mais l’enthousiasme des marchés est resté très contenu, les investisseurs n’ayant pas oublié que le dividende était beaucoup plus élevé il y a quelques années, avant qu’AB InBev ne soit contraint de le réduire en 2018, 2019 et 2020 en raison notamment du lourd endettement hérité de la reprise de SAB Miller.
Dans le même segment, Care Property Invest a été lourdement sanctionnée après ses prévisions 2023. La SIR a prévenu que ses résultats allaient baisser cette année en raison de la hausse de ses charges financières. Elle prévoit ainsi de simplement maintenir son dividende à 1 euro en 2023 (rendement net de 6,5% grâce au précompte réduit) en distribuant l’entièreté de ses bénéfices, une situation qui n’est pas soutenable si elle perdure.
Plus largement, les marchés accordent moins d’importance aux dividendes irréguliers. Ce qui dessert les entreprises dont les coupons sont purement basés sur les résultats annuels comme Aperam ou KBC.
Idem chez Cofinimmo qui a pourtant relevé son dividende pour la quatrième année consécutive grâce à la réussite de son repositionnement dans l’immobilier de soins (70% de son portefeuille). La SIR (société immobilière réglementée) verse toujours un dividende inférieur à il y a 10 ans (6,50 euros).
Quelles opportunités?
En tenant compte de l’ensemble des paramètres cités plus haut, trois noms se dégagent pour les amateurs de dividendes élevés.
– Aedifica: la SIR spécialisée dans les maisons de repos parvient à continuer à relever son dividende, ce qui lui permet de maintenir sa prime en Bourse par rapport à ses concurrents Cofinimmo et Care Property Invest.
– Solvay : le groupe chimique parvient à continuer à relever son dividende quasiment chaque année depuis trois décennies tout en gardant une certaine latitude. Il n’a distribué pour son dividende 2022 que 40% de ses flux de trésorerie libres (cash généré par l’activité après déduction des investissements).
– WDP: confirme son profil de croissance du dividende avec un 12e relèvement consécutif prévu pour 2023, ce qui permet à la SIR (immobilier logistique) de mieux résister que la moyenne à la correction du secteur en 2022.
Les trois entreprises suivantes affichent un rendement de dividende plus limité, mais leur engagement à relever leur coupon année après année, y compris en période plus difficile, est (statistiquement) de nature à soutenir leur cours.
– UCB : l’entreprise biopharmaceutique ne distribuait que 20% de ses bénéfices en 2020, ce qui lui offre une certaine flexibilité pour continuer à améliorer progressivement son dividende malgré le recul de ses résultats en 2022-2023.
– Ackermans & van Haaren: malgré les conditions de marché changeantes, le holding derrière Deme (dragage), CFE (construction), Sipef (plantation), etc., relève graduellement son coupon qui a doublé entre 2011 et 2022.
– Barco : le groupe électronique courtraisien privilégie la stabilité en augmentant légèrement son dividende chaque année malgré la très forte volatilité de ses résultats, une stratégie facilitée par un taux de distribution structurel assez limité.
Hors Bel 20, deux sociétés d’investissement belges se distinguent également par le rendement et l’évolution de leur dividende:
– TINC: la société d’investissements en infrastructures est engagée dans une politique de relèvement progressif de son dividende. Elle prévoit de verser un coupon de 0,84 euro pour les 18 mois de son exercice 2022-2023 (afin de clôturer son année comptable au 30 juin par la suite), soit 0,56 euro pour 12 mois (+0,02 euro ou 4%) ou un rendement net de 3,2%. Le coupon annuel est attendu en hausse de 0,02 euro par an pour 2024 et 2025, une stratégie entretenue par la visibilité de ses investissements et le développement de son portefeuille.
– Retail Estates : malgré les tensions, cette SIR active dans l’immobilier commercial (suburbain) est parvenue à améliorer son dividende chaque année depuis son introduction en Bourse en 1998. Son coupon de 4,60 euros pour son exercice 2021-2022 correspond à un rendement net attractif de 4,8% et la société compte le relever à 4,90 euros pour l’année comptable clôturée fin mars 2023.
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