‘Trop tôt pour savoir si les ouragans provoqueront une hausse des primes d’assurance en Belgique’

© Reuters
Bart Vereecke Rédacteur MoneyTalk et Trends

MoneyTalk pose régulièrement trois questions sur l’actualité à un spécialiste. Cette semaine, nous nous entretenons avec Wauthier Robyns, le porte-parole de la fédération d’assurance Assuralia, concernant les conséquences des ouragans sur les primes d’assurance dans notre pays.

Les Caraïbes et certaines parties de la côte est des États-Unis font face à d’énormes dommages suite au passage d’Irma. Les dégâts des eaux ne sont pas compris dans la ‘homeowner insurance’ américaine et ne sont couverts que par une assurance supplémentaire. En Belgique, l’assurance incendie ordinaire suffit-elle pour les inondations dues à des catastrophes naturelles ?

WAUTHIER ROBYNS: Pour les particuliers et les PME, l’assurance contre les inondations dans notre pays est, depuis dix ans, un élément obligatoire de l’assurance incendie. Pour eux, il n’est donc pas nécessaire de souscrire une police séparée. Pour les grandes entreprises, ce n’est pas le cas: elles doivent elles-mêmes prendre la décision de se couvrir contre les inondations. Les personnes qui sont allées construire récemment dans une zone d’inondation ou qui planifient de le faire ne disposent pas d’un droit juridiquement protégé à une telle assurance.

Quels facteurs déterminent la prime des assurances dommages?

Le prix d’une assurance consiste en plusieurs composantes. Le facteur principal est la charge des sinistres. C’est le montant pour lequel l’assureur doit intervenir en cas de sinistre. Cette composante de la prime dépend des souhaits spécifiques du client. Ainsi, lors de la détermination de la prime, on se soucie du contenu précis de la police: cela concerne-t-il par exemple une assurance incendie comprenant le vol ou justement pas ?

Les caractéristiques spécifiques du bâtiment pour lequel l’assurance incendie est demandée jouent également un rôle. Ainsi, les immeubles d’appartements sont plus sensibles aux dégâts des eaux qu’aux dégâts du vent, et pour les fermes, c’est précisément le contraire. Les personnes qui habitent près de l’eau paieront en général une prime plus élevée. Pour finir, on tient également compte des matériaux de construction, de l’état du bien et de son éventuel contenu. Au plus la valeur de l’édifice est élevée, au plus haute est la prime.

Ensuite, il y a les frais généraux de l’entreprise d’assurance. Ceux-ci consistent majoritairement en frais de personnel et en dépenses pour l’infrastructure utilisée. Il y a également la commission du courtier d’assurance. Dans le monde des entreprises, on travaille plutôt avec des honoraires qui sont facturés séparément des primes. Pour les particuliers, la prime est en général majorée d’un pourcentage destiné au courtier, mais tout est calculé ensemble. Pour finir, il y a aussi des taxes sur les primes, que l’assureur prélève pour le compte du Trésor.”

Les primes des assurances dommages en Belgique pourraient augmenter en conséquence des ouragans aux États-Unis. Pourtant, les assureurs belges ne sont pas directement concernés. C’est notamment dû au principe de réassurance. Pourriez-vous expliquer ce concept ?

Les consommateurs belges ne paient bien sûr pas pour les risques encourus par un habitant de Floride. Il est toutefois vrai que nos assureurs, tout comme leurs collègues aux États-Unis, se protègent contre les dommages extrêmes via une réassurance. À cet égard, ils souscrivent à leur tour une assurance auprès de réassureurs actifs à l’international comme Munich Re, Swiss Re et Berkshire Hathaway. En échange des primes payées par les assureurs, leur capacité financière est agrandie. La réassurance est donc destinée à donner aux assureurs davantage de moyens que s’ils utilisaient uniquement leur capital propre.

Les assureurs construisent en outre aussi des provisions techniques pour couvrir leurs engagements. Elles le font en investissant avec les primes perçues. Mais du fait de la faiblesse des taux d’intérêt, ces investissements ne rapportent pas beaucoup. La réassurance n’est pas obligatoire, mais dans certains secteurs, c’est le choix le plus raisonnable. Ce n’est assurément pas un luxe superflu pour les assureurs actifs dans des branches où les dommages peuvent grimper très haut et où les clients risquent des surprises désagréables.

Ces dernières années, le prix des réassurances était particulièrement bas. Cela s’expliquait par l’absence de catastrophes très graves, mais aussi par un afflux de capitaux dans le secteur. Dans le sillage des crises financières d’il y a dix ans, l’intérêt pour des produits qui ne sont pas soumis aux caprices de la bourse a grandi chez les investisseurs. Dans le secteur de l’assurance, des obligations sont émises qui sont liées à la survenance ou non d’une catastrophe naturelle. Toujours plus d’investisseurs dotés de grandes fortunes ont acheté ce type d’obligations, avec lesquelles ils ne perdent leur argent que si une vraie catastrophe se produit.

La question est maintenant de savoir si quelques violents ouragans sont suffisants pour induire à nouveau une hausse des primes de réassurance. Si c’est le cas, les coûts devraient en effet se répercuter sur les clients.

Pour l’instant, il est néanmoins trop tôt pour tirer des conclusions. Les réassurances ne seront renouvelées que début janvier et les négociations doivent encore commencer. En outre, la saison des ouragans dans la région des Caraïbes et de la côte est américaine n’est de loin pas encore terminée. Après Halloween, nous aurons une meilleure vue de l’impact des tempêtes sur le prix des assurances et des réassurances. Pour l’ouragan Irma, le montant des dégâts occasionnés est en outre au final inférieur aux scénarios, bien pires, sur lesquels se sont basés les météorologistes et les assureurs.

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