De plus en plus de jeunes acheteurs dans l’immobilier de luxe : « Certains secteurs comme l’IT génèrent aujourd’hui de gros revenus »

La demande pour l’immobilier de luxe reste intacte malgré l’incertitude économique et fiscale. Un prix correct est néanmoins primordial, selon Christie’s Belgium. Seule Knokke fait figure d’exception, avec ses propres règles du jeu.

“Pas de nouvelles” ne signifie pas toujours de “bonnes nouvelles”. L’accord de Pâques du gouvernement De Wever n’a pas apporté de clarté sur les modalités de la taxation des plus-values. Cette incertitude se ressent aussi indirectement sur le marché de l’immobilier de luxe, indique Roel Druyts, CEO du groupe Hillewaere. « Le segment haut de gamme de l’immobilier évolue en partie avec l’activité du marché des acquisitions », explique-t-il. « Lorsque de nombreuses entreprises sont vendues, cela libère des liquidités qui sont ensuite investies dans l’immobilier. C’est là qu’intervient la possible taxation des plus-values, un sujet récurrent dans les discussions avec nos clients. Il y a pour l’instant beaucoup d’incertitude, ce qui engendre aussi une certaine inquiétude. »

« Cela la dit, le sentiment général reste positif », ajoute Bart Van Delm. « Les chiffres de vente dans le segment luxe au premier trimestre 2025 sont en ligne avec ceux de la même période l’an dernier. » Van Delm est CEO Immobilier chez Hillewaere Groep, également actif dans les assurances et les prêts hypothécaires. Hillewaere Immobilier se concentre depuis près de 30 ans sur le segment luxe du marché. Depuis 2023, l’entreprise détient la licence exclusive de Christie’s International Real Estate en Belgique, un réseau mondial de 1 350 bureaux dans 48 pays, étroitement lié à la célèbre maison de ventes Christie’s.

L’incertitude économique et géopolitique a-t-elle un impact sur l’immobilier de luxe ?

BART VAN DELM. « Indéniablement, même si cet impact reste pour l’instant limité. »

ROEL DRUYTS. « Donald Trump a récemment commencé à hausser le ton. Il est encore un peu tôt pour en mesurer les effets. Mais en général, l’incertitude économique n’est jamais favorable à ce segment. On espère une stabilisation. En 2008, pendant la crise financière, le segment du luxe a pris un coup. On ne souhaite pas revivre une récession mondiale. »

Avez-vous constaté une évolution dans le profil des acheteurs ?

VAN DELM. « Le profil reste globalement stable ces trois dernières années. Mais depuis que nous travaillons avec Christie’s, nous avons accès à une clientèle encore plus fortunée. »

DRUYTS. « Ayant plus de recul, je constate un changement clair : le public est plus jeune. Il y a 20 ou 25 ans, c’étaient surtout des quinquagénaires ou sexagénaires. Aujourd’hui, des trentenaires achètent des biens de luxe. Certains ont fait fortune dans l’IT. Nous avons aussi vendu des biens exceptionnels à des personnes ayant bâti leur patrimoine grâce aux cryptomonnaies. »

Cette jeunesse s’accompagne-t-elle de nouvelles attentes ?

DRUYTS. « Le niveau de finition attendu est plus élevé, notamment en domotique ou systèmes de chauffage avancés. Ces technologies, désormais standard, rendent les biens plus coûteux mais aussi plus sujets à la dépréciation. Un système domotique de 15 ans doit être remplacé, ce qui représente un coût. D’où l’importance de l’emplacement : une maison luxueusement rénovée mal située se revend plus difficilement. »

Comment évoluent les prix dans l’immobilier de luxe?

DRUYTS. « Les prix dépendent fortement de la région. Dans ce segment, l’offre et la demande comptent plus que les moyennes statistiques, car les volumes sont faibles et les prix très variables. L’engouement post-Covid, où la demande dépassait l’offre, est clairement passé. Il faut aujourd’hui proposer de la qualité et le bon prix, sinon on ne vend pas. »

Que penser des montants astronomiques à Knokke, comme la villa de 30 millions d’euros achetée par Marc Coucke ?

DRUYTS. « C’est l’effet de l’offre et de la demande. Knokke est un micromarché où la demande dépasse largement l’offre dans le top du segment. Quand un bien d’exception devient disponible, les acheteurs très fortunés sont prêts à payer 15, 20 ou 25 millions. Beaucoup de transactions s’y font d’ailleurs discrètement, hors du marché public. Nous avons aussi un portefeuille confidentiel. À Knokke, cela représente probablement plus de la moitié des ventes haut de gamme. »

« Si l’on regarde le vrai segment haut de gamme, la Belgique reste attractive. Nous avons beaucoup d’atouts : stabilité, situation, qualité de vie. »

Bart Van Delm

Ces prix extrêmes sont-ils tenables ? Dans le contexte belge, ils semblent parfois absurdes.

DRUYTS. « Oui. Comparés à d’autres marchés internationaux, ces prix ne sont pas si exceptionnels. Tant que Knokke plaît à ce public, les prix tiendront bon et suivront l’inflation, voire au-delà. Je ne vois pas de correction de prix à court terme. »

VAN DELM. « Même en cas de ralentissement économique, les transactions baisseront sans forcément faire chuter les prix. Les propriétaires de ce segment ne doivent généralement pas vendre rapidement ou à perte. Le marché se figerait simplement. »

Y a-t-il d’autres zones en Belgique où l’immobilier de luxe prend de l’importance ?

DRUYTS. « Oui, Bruxelles se distingue. On y trouve un marché distinct avec des biens exclusifs et des prix élevés, en partie à cause de son caractère international. De nombreux acheteurs viennent du monde diplomatique, d’entreprises internationales ou d’institutions européennes. Cela fait grimper la demande et les prix. »

VAN DELM. « Bruxelles est aussi fortement orientée vers la France, avec un lien clair avec Paris, ce que l’on ne retrouve pas à Anvers. »

DRUYTS. « À Anvers, les prix ont aussi augmenté, mais de manière plus modérée. Il y a encore un potentiel de croissance, surtout si la mobilité s’améliore. Anvers reste attrayante, notamment pour les Néerlandais. »

« Même en cas de ralentissement, les transactions peuvent diminuer, mais pas nécessairement les prix. »

Bart Van Delm

Les Néerlandais sont-ils encore très présents dans le nord d’Anvers et le Limbourg ?

VAN DELM. « Oui, toujours. Environ la moitié des achats par des étrangers provient de Néerlandais. Et on constate qu’ils sont à nouveau plus actifs ces derniers mois. »

DRUYTS. « Le marché néerlandais est plus volatile que le belge. Quand tout va bien chez eux — comme c’est le cas actuellement — l’intérêt pour la Flandre repart. Les prix y sont alors plus intéressants qu’aux Pays-Bas. »

Quelles sont vos perspectives pour l’immobilier de luxe en Belgique sur les 5 à 10 prochaines années ?

DRUYTS. « Cela dépend de la définition du ‘luxe’. Si l’on parle de biens au-dessus du million d’euros, la tendance est à la hausse. Les chiffres montrent une progression annuelle, mais cela s’explique surtout par l’inflation : de plus en plus de biens franchissent ce seuil. »

VAN DELM. « Si l’on regarde le vrai haut de gamme, la Belgique reste attractive. Nous avons beaucoup d’atouts pour ce public : stabilité, emplacement, qualité de vie. Certaines régions, comme Anvers et ses environs, restent abordables à l’échelle internationale. Il y a encore un vrai potentiel de croissance. »

« La référence en immobilier de luxe en Belgique »

« Être la référence en immobilier de luxe en Belgique », résume Roel Druyts à propos de l’ambition de Christie’s International Real Estate Belgium. « Et je pense qu’on l’est déjà. » Après le lancement en 2023, l’ouverture du bureau de Bruxelles en mai 2024 fut une étape importante. « 2024 a dépassé nos attentes », indique Bart Van Delm. « Nous avons eu la chance de recruter Jean-Marc Delcroix, ancien directeur commercial de Sotheby’s à Bruxelles, pour diriger notre bureau. C’était la personne idéale. »
Christie’s Belgium est désormais aussi actif dans la province de Liège. « Liège a assurément le potentiel d’une région comme le Limbourg », estime Bart Van Delm. « Nous cherchons encore un emplacement à Gand. Et à Knokke, des discussions sont en cours pour une future implantation. Nous espérons pouvoir en dire plus dans les six mois à venir. Les échanges sont très prometteurs. »

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