“Cette année, les prix de l’immobilier baisseront pour la première fois en 40 ans”
Koen De Leus, économiste en chef de BNP Paribas Fortis, estime que le prix moyen de l’immobilier diminuera de 0,2 % en 2023. Il s’agit de la première baisse en 40 ans. En cause : la forte hausse des prix de l’immobilier depuis la crise sanitaire, la quasi-inaccessibilité des logements actuellement, la hausse des taux d’intérêt et les besoins de rénovation. Explications.
Cette année, le prix des habitations diminuera de 0,2 %, selon les calculs du service d’études de BNP Paribas Fortis. En termes réels, cela représente une baisse de 6 %, inflation comprise. La dernière baisse nominale (de 2 %) remonte à 1983. “En raison de l’augmentation considérable du prix des logements après la pandémie et de la forte hausse des taux d’intérêt, l’accessibilité au logement a considérablement diminué pour de nombreuses familles”, explique Koen De Leus, économiste en chef de BNP Paribas Fortis. “Cela a également eu un impact important sur le nombre de transactions.”
Au troisième trimestre 2022, le nombre de transactions immobilières pour les appartements a diminué de 4,7 % par rapport à l’année précédente. Pour les maisons, cette baisse a atteint 7,8 %. Une récession s’accompagne régulièrement d’une baisse du nombre de transactions. Ce fut le cas en 1974, 1980 et 2008.
Trimestres difficiles
Selon Koen De Leus, le marché de l’immobilier s’apprête à connaître plusieurs trimestres difficiles. Les jeunes qui cherchaient à acheter une maison fin 2020, juste avant la hausse de l’inflation, se heurtent aujourd’hui à une augmentation du prix médian de de 30.000 euros (de 250 000 euros à 280 000 euros) et à une hausse des taux d’intérêt de 1 à 3,3 pour cent pour les prêts hypothécaires.
La combinaison de la hausse des taux d’intérêt et de l’augmentation des prix de l’immobilier a fait grimper la charge mensuelle des intérêts de plus de 400 euros, à 1 590 euros pour un logement moyen. Cela représente 36 % du revenu total de 4 479 euros pour une famille avec deux revenus. Fin 2020, les emprunts hypothécaires représentaient à peine 29 % d’un revenu de 4 000 euros. “L’accessibilité aux emprunts est en chute libre”, a déclaré M. De Leus. La possibilité actuelle de paiement échelonné est aussi négative pour les familles qu’elle l’était juste avant 2008, lorsque les prix ont grimpé en flèche.
Cette situation est quelque peu tempérée par l’allongement de la durée des prêts et l’augmentation de l’apport personnel. L’apport personnel moyen des primo-acquéreurs est passé de 40 000 euros en 2019 à 60 000 euros en 2022. L’épargne forcée pendant la pandémie explique en partie cette évolution. Mais en 2020 et 2021, certaines familles ont également reçu plus de dons et d’héritages. “Par le passé, une famille pouvait faire bon usage de ce supplément de richesse provenant d’un héritage pour augmenter son niveau de vie”, soupçonne M. De Leus. “Les baby-boomers semblent transmettre l’héritage de leurs parents à leurs enfants. Les experts immobiliers devront en tenir compte à l’avenir. Quant aux familles aux revenus plus modestes, celles qui ne bénéficient pas d’une aide financière extérieure, elles se verront dans l’impossibilité d’acheter leur propre logement.”
Hausse des prix en 2024
Dans l’ensemble, la baisse prévue de 0,2 % n’est pas trop grave. En fait, M. De Leus prévoit que cette diminution des prix du marché immobilier sera compensée par une hausse similaire des prix en 2024. “Dans nos pays voisins, le marché du logement est actuellement plus durement touché”, explique-t-il. “En Belgique, les prix de l’immobilier sont moins sujets à des pics. Lorsque les prix augmentent dans les villes, les gens ont rapidement tendance à chercher une autre solution à proximité. Cela permet d’éviter les pics de prix excessifs au niveau local, qui disparaissent à la moindre contraction économique. Les Belges peuvent également compter sur une aide fiscale lors de l’achat de leur premier logement. La baisse de 0,2 % n’est donc pas spectaculaire. Mais pour la première fois depuis longtemps, les Belges sont confrontés au fait que le marché immobilier est bel et bien un marché, où le prix – à la surprise de beaucoup – peut aussi baisser”.
L’économiste s’attend également à ce que la baisse des prix se produise principalement, et peut-être plus longtemps, sur le segment des ventes de logements existants. “Le nombre de nouvelles constructions ralentira à mesure que la demande diminuera, parce que les acheteurs ne pourront pas se permettre de payer des prix trop élevés”, estime M. De Leus. “Mais il est difficile pour un promoteur immobilier de réduire le prix de vente, car les salaires et le prix des matériaux ne baissent pas non plus. Le volume diminue donc.
La moitié des maisons existantes en Flandre doivent être rénovées cinq ans après leur vente, conformément aux normes énergétiques récemment introduites. De Leus : “Ces coûts supplémentaires peuvent donc être inclus lors de l’achat d’une maison existante. La baisse des prix se produira principalement sur le marché secondaire.”
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