Quelles alternatives aux Bourses?
Selon le dernier Baromètre des investisseurs d’ING, les Belges se montrent désormais pessimistes envers la Bourse. Dans ce contexte, ils se ruent vers des actifs comme l’or. Est-ce (encore) intéressant d’investir dans le métal jaune, le bitcoin ou les autres placements alternatifs?
Clairement, les actifs alternatifs ont le vent en poupe. L’or a établi de nouveaux records cet été. Le bitcoin s’en rapproche, ayant quasiment effacé sa terrible chute de 2018. Et selon le spécialiste Preqin, le marché des investissements alternatifs devrait croître de 61% d’ici 2025. Tour d’horizon des actifs alternatifs.
L’or, un parcours chaotique
A tout seigneur, tout honneur, nous commençons ce tour d’horizon par l’or, utilisé comme réserve de valeur depuis l’Antiquité en raison de sa rareté et de sa durabilité. Depuis la décision de Richard Nixon de mettre fin à la convertibilité du dollar en or en 1971, le cours du métal jaune s’est nettement apprécié, de 35 dollars à près de 2.000 dollars l’once. Ce qui correspond à un rendement d’un peu plus de 7% par an en moyenne. Le parcours de l’or a toutefois été extrêmement chaotique. Entre 1971 et l’été 1980, le cours s’est envolé jusqu’à plus de 600 dollars l’once. Il a ensuite baissé jusqu’en 2001 et n’a établi un nouveau record qu’en 2007, soit près de trois décennies de rendement nul. Et même négatif si l’on tient compte de l’inflation et des frais liés à la conservation.
Si le bitcoin se fait une place parmi les classes d’actifs, on est encore loin de la réelle alternative monétaire promise.
Avant d’investir en or, il est donc indispensable de prendre conscience du fait que le métal jaune ne constitue pas du tout une réserve de valeur disponible à tout moment. C’est même plutôt tout l’inverse: le timing d’achat et de vente est déterminant pour votre rendement. Est-ce le bon moment pour acheter de l’or, qui vient d’établir un nouveau record de 2.051 dollars l’once cet été? Son cours est avant tout influencé par le rapport entre l’offre et la demande. La baisse des années 1990 peut ainsi être en partie attribuée aux ventes par les banques centrales occidentales alors que le rebond à partir de 2001 correspond aux débuts des ETF sur l’or, ces fonds ayant rendu les investissements dans le métal jaune plus faciles et moins coûteux, les frais d’achat étant élevés pour l’or physique.
Au troisième trimestre, les banques centrales ont globalement vendu 12,1 tonnes d’or, selon le World Gold Council, une première depuis 2010, après des achats assez conséquents, notamment de la part des banques centrales chinoise et russe. Les ventes sont toutefois trop limitées pour en influencer le cours. De plus, les analystes de Citigroup prévoient qu’elles seront temporaires, tablant sur des achats nets en 2021. Dans ce contexte, les investisseurs garderont la main, la demande des ETF ayant été le principal catalyseur du cours ces 10 dernières années.
Pour Michael Blümke, senior portfolio manager chez Ethenea, le principal facteur influençant la demande d’or des investisseurs est le niveau des taux réels, c’est-à-dire des taux après déduction de l’inflation, ce qui est plutôt de bon augure. “Les banques centrales ont déclaré que les taux d’intérêt resteraient faibles pendant une période prolongée, explique-t-il. Sachant que l’expansion rapide de la masse monétaire par le biais de la monétisation des dettes publiques aura certainement des conséquences sur l’inflation, il faut s’attendre à des taux réels en baisse au cours des prochaines années.” Il souligne ainsi qu’une “exposition à l’or calibrée en fonction de la tolérance au risque doit faire partie intégrante de l’allocation d’actifs”. Et épingle que le métal jaune peut stabiliser un portefeuille en cas de forte poussée de l’inflation ou de chute des marchés d’actions par un facteur autre que les taux d’intérêt.
En ce qui concerne l’argent, le cousin de l’or, les analystes sont plutôt confiants. Matthew Miller de CFR Reasearch prévoit qu’il va continuer son redressement par rapport au métal jaune. Une once d’or vaut actuellement 77 fois plus qu’une once d’argent, un ratio en baisse par rapport au pic de 113 au début de la pandémie mais toujours largement supérieur à la moyenne historique d’environ 50. Pour revenir à ce ratio de référence, le cours de l’argent devrait bondir de 50% si l’or reste stable.
Pour investir dans l’or ou l’argent, vous avez le choix entre les pièces et lingots physiques auprès de courtiers (Gold & Forex International, boutique en ligne d’Umicore, etc.), le moyen le plus direct d’investir dans les métaux mais aussi assez coûteux (frais d’achat et de conservation), ou les ETF. Pour l’or et l’argent, il existe des fonds avec réplication physique. Schématiquement: quand vous achetez une part, l’émetteur détient réellement la quantité d’or ou d’argent équivalente en coffre. Les Xtrackers Physical Gold ETC (or, Bourse de Francfort, code Isin: DE000A1E0HR8, frais annuels de 0,45%) et WisdomTree Physical Silver (argent, Euronext Amsterdam, code Isin: JE00B1VS3333, frais annuels de 0,49%) sont dans ce cas (voir le graphique intitulé “Cours de l’or et demande des ETF”).
L’or du 21e siècle
On a souvent présenté le bitcoin comme l’or du 21e siècle, la cryptomonnaie étant censée également jouer le rôle de réserve de monnaie, notamment en raison du volume limité. Tant l’or que le bitcoin ne peuvent être “minés” à l’infini. Le bitcoin n’a toutefois pas le bagage historique du métal jaune.
Selon Mike McGlone, stratégiste des cryptomonnaies de Bloomberg, l’histoire de cours de la première cryptomonnaie (lancée en 2009) suffit toutefois à prévoir une hausse à 100.000 dollars en 2025. Globalement, il souligne que le cours du bitcoin a tendance à décupler suivant une période qui double à chaque fois, chacune de ces phases haussières étant suivie d’une lourde chute comme en 2018. Comme il a mis quatre ans pour passer de 1.000 dollars (2013) à 10.000 dollars (2017), il devrait mettre huit ans à atteindre les 100.000 dollars.
Le bitcoin a également profité d’une actualité favorable ces derniers temps avec l’annonce en octobre par PayPal du lancement d’un service permettant d’acheter, de conserver et de vendre des cryptomonnaies. La fintech américaine Square a, pour sa part, indiqué qu’elle commençait à conserver une partie de ses réserves de liquidités en bitcoin. Et cet été, Fidelity a dévoilé son premier fonds d’investissement dédié à la cryptomonnaie, complétant la palette de produits d’investissement après les contrats à terme sur le bitcoin.
Via des courtiers spécialisés
Si le bitcoin se fait une place parmi les classes d’actifs, on est encore loin de la réelle alternative monétaire promise. On notera d’ailleurs que la hausse récente concerne essentiellement le bitcoin, dont la part dans la capitalisation de l’ensemble des cryptomonnaies a quasiment doublé depuis fin janvier 2018, à plus de 64%. Globalement, la valeur de toutes les autres cryptomonnaies (Ethereum, Dogecoin, Tether, Dash, etc.) plafonne actuellement à 174 milliards de dollars, très loin du sommet de plus de 500 milliards de dollars de début 2018, selon CoinMarketCap.
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Même si l’idée, véhiculée notamment par Elon Musk, que les cryptomonnaies pourraient remplacer le cash à l’avenir semble prometteuse, tout investissement demeure très risqué. Premièrement, il demeure extrêmement périlleux de prévoir quelles cryptomonnaies s’imposeront: le bitcoin, l’ethereum, le dash, etc., ou les versions numériques des monnaies officielles actuellement développées par les banques centrales?
Dans tous les cas, veillez à n’investir dans les cryptomonnaies que via des courtiers spécialisés de premier plan comme Kraken, CoinBase, Binance ou des courtiers classiques proposant des CFD sur cryptomonnaies (etoro, IQ option, IG, etc.) mais en veillant à bien faire attention à l’effet de levier qui démultiplie aussi la volatilité. (voir le graphique intitulé “Cours du bitcoin”)
Fonds alternatifs
Historiquement, les hedge funds constituent les principaux fonds alternatifs, leur objectif premier étant de générer un rendement en actions, en obligations ou en devises, peu importe les conditions de marché. Le succès n’a pas toujours été au rendez-vous. Selon nos confrères de L’Echo, 60% des fonds dits à rendement absolu, pouvant être directement proposés aux particuliers contrairement aux hedge funds classiques, étaient ainsi en perte sur cinq ans à la mi-2020. Globalement, Preqin prévoit ainsi que les hedge funds connaîtront des retraits nets de capitaux au cours des cinq prochaines années.
L’actif alternatif le plus plébiscité est clairement le private equity, c’est-à-dire les actions de sociétés non cotées. Preqin prévoit un doublement des actifs sous gestion au niveau mondial, à plus de 9.000 milliards de dollars en 2025. Les taux bas, les valori- sations boursières élevées et la mutation de l’économie avec de nouvelles entreprises ont poussé les investisseurs vers le non coté. On peut y ajouter le durcissement de la régulation bancaire qui a limité la capacité d’action des établissements financiers et a stimulé le marché de la dette privée.
L’investisseur lambda ne peut directement investir dans les fonds de private equity. Vous pouvez vous tourner vers les plateformes de financement participatif comme Look & Fin (prêts), Spreds (actions) ou Ecco Nova (prêts) avec la possibilité de bénéficier de certains avantages fiscaux. Vous pouvez aussi investir dans les actions de firmes actives dans le private equity comme Blackstone, KKR, Apollo Group ou Carlyle cotées à New York. Sur Euronext Bruxelles, les holdings comme la GIMV, Brederode ou Sofina investissent aussi dans les sociétés non cotées. Sur Euronext Paris, Eurazeo est un important acteur dans ce secteur.
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