Tous manager comme aux USA: pourquoi ce n’est pas une bonne nouvelle

Selon une étude, de nombreuses entreprises américaines créent à foison des postes de managers parfois farfelus. Et ce n’est pas pour flatter l’ego des employés. En effet dans la loi du travail américaine, lorsqu’on est manager, on ne peut pas facturer des heures supplémentaires. Qu’en est-il en Belgique ?

Aux États-Unis, obtenir un poste de manager n’est pas toujours une bonne nouvelle. Cela peut même signifier une perte sèche de salaire. La loi intitulée The Fair Labor Standards Act §7 (FLSA) exempte en effet les entreprises de payer des heures supplémentaires aux managers qui ont un salaire qui dépasse un certain montant (455 dollars la semaine ou 23 660 dollars l’année). Or selon l’étude publiée en janvier par le National Bureau of Economic Research, les postes de managers seraient presque cinq fois plus nombreux autour de ce seuil réglementaire fédéral. Concrètement, pour une même fonction, le fait d’être intitulée, parfois très pompeusement, manager, fait que le salaire moyen est en moyenne 13,5% plus bas que l’employé qui n’a pas été gratifié d’un titre de manager.

En jouant sur cette subtilité de la loi, les entreprises américaines épargneraient jusqu’à 4 milliards de dollars sur les heures supplémentaires. Et la tendance n’est certainement pas à la baisse puisque ces managers fantoches ont explosé ces dernières années.

Des réceptionnistes, des caissières et des coiffeurs se sont vu requalifier en “directrice de la première impression”, de “gestionnaire du contrôle des prix” ou encore de “responsable des soins capillaire”.

Ce serait surtout les grosses entreprises qui emploient beaucoup de main-d’oeuvre qui sont tentées d’utiliser ce procédé pour réduire les coûts précise . Par exemple, selon CBSNews, Starbucks, UPS, Walmart ou encore Facebook, mais aussi JPMorgan Chase ou Bank of America. Le procédé est parfois tellement gros que certains employés ont intenté des procès contre leur entreprise. Régulièrement avec succès, puisque rien qu’en 2019, les entreprises ont dû payer un total de 229 millions de dollars d’heures supplémentaires. Mais ces montants ne sont qu’une infime partie des gains engrangés par les entreprises.

Et en Belgique ?

Selon la réglementation belge, qui est relativement stricte sur le sujet, un employé ne peut pas prester plus de 8 heures par jour ou 40 heures par semaine. Cette limite quotidienne pouvant être portée à 9 heures si le régime de travail comporte par semaine un demi-jour, un jour ou plus d’un jour de repos, autre que le dimanche. Le dépassement de ces limites est toutefois autorisé par convention collective de travail conclue conformément à la loi du 5 décembre 1968 ou par règlement de travail. Néanmoins lorsqu’on dépasse ces heures, celles-ci sont considérées comme des heures supplémentaires.

Selon Acerta, la limite pour la prestation d’heures supplémentaires est fixée à un total de maximum 50 heures par semaine (horaire normal + heures sup) et à 11 heures par jour (soit trois heures en plus par rapport à sa journée de travail normale). Il existe quelques exceptions à cette règle, comme dans certains cas de force majeure où aucun maximum absolu ne s’applique. Il y a aussi un plafond de 143 heures cumulées (bien que celui-ci puisse varier selon les secteurs). On notera aussi que le personnel ne peut prester des heures supplémentaires que dans des situations spécifiques lors de transports ou liées à certaines circonstances. Il ne peut pas décider unilatéralement de faire des heures supplémentaires, celles-ci se font avec l’accord ou à la demande explicite de l’employeur.

La modification de la loi sur le travail a également introduit un nouveau type d’heures supplémentaires dites “volontaires”. Celle-ci permet au travailleur de prester des heures supplémentaires pour compléter sa rémunération, mais ne doit pas dépasser 120 heures supplémentaires volontaires en plus par année civile bien que certains secteurs peuvent augmenter ce nombre jusqu’à 360 maximum. Celles-ci doivent être obligatoirement payées et ne peuvent être récupérées.

Les heures supplémentaires c’est pour tout le monde ?

Selon l’arrêté royal du 10 février 1965 sur la réglementation du temps de travail, les personnes investies d’un poste de direction (soit des personnes qui exercent une autorité effective et qui ont la responsabilité de l’ensemble ou d’une division importante de l’entreprise) ou de confiance (soit des personnes qui peuvent, sous leur responsabilité, engager l’entreprise vis-à-vis des tiers) dans les secteurs privés de l’économie nationale sont dans certaines conditions pas soumises à la législation en matière de durée du travail. Elles ne sont donc pas limitées dans leurs heures supplémentaires et celles-ci ne doivent pas être payées.

Contrairement aux États-Unis, cette distinction n’est donc pas liée au salaire et il faut que la fonction réelle corresponde à la définition de poste de direction ou de confiance. Le fait de ne pas prendre en compte les heures supplémentaires doit aussi être précisé dans le contrat de travail qui ne contient pas d’horaire de travail précis. Il doit aussi être pris en compte dans le salaire. Ou pour le dire plus prosaïquement : une rémunération suffisamment élevée peut indiquer qu’une plus grande variabilité des prestations a été convenue entre les parties.

Il y a donc peu de risque que l’on se retrouve face à une explosion de manager factice en Belgique. Par contre la liste des professions concernée n’a plus été modifiée depuis et commence à être datée et parfois même obsolète (chefs d’écurie, chefs porions, boutefeux, chefslampistes). Ce qui a pu, dans certain cas, ouvrir une zone grise juridique et pousser quelques employés à intenter des procès à leur souvent ex-employeur.

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