À moins d’un mois d’une nouvelle salve de surtaxes américaines, les entreprises européennes n’ont d’autre choix que de revoir à la hâte leurs chaînes d’approvisionnement. Coûts en hausse, délais rallongés, incertitudes juridiques : face au retour offensif du protectionnisme américain, l’Europe est en première ligne.
L’expiration ce mercredi 9 juillet de la trêve tarifaire décidée par Donald Trump marque un tournant pour les entreprises européennes. En pleine recomposition des échanges mondiaux, elles doivent désormais composer avec un environnement commercial américain de plus en plus hostile. Et le plus dur reste à venir : à partir du 1er août, Washington prévoit d’imposer des surtaxes pouvant aller jusqu’à 50 %, voire 70 %, aux pays jugés « récalcitrants ».
L’export européen sous pression
Cette escalade douanière n’est pas un simple coup de semonce. Selon un récent article de la BBC, les entreprises à travers tous les continents ont déjà réorganisé leurs chaînes d’approvisionnement pour s’adapter à une politique commerciale américaine redevenue imprévisible. C’est notamment le cas du producteur espagnol Oro del Desierto, qui exporte environ 8 % de sa production d’huile d’olive vers les États-Unis. Confrontée à des droits de douane américains de 10 %, l’entreprise a été contrainte de répercuter cette hausse sur ses clients américains. « Ces droits de douane affectent directement le consommateur final », explique Rafael Alonso Barrau, directeur export de la société à la BBC. Face à cette pression, Oro del Desierto envisage désormais de réduire ses exportations vers les États-Unis, au profit de marchés plus stables en Asie ou au Moyen-Orient.
Un impact bien au-delà de l’agroalimentaire
Mais le secteur agroalimentaire n’est pas le seul concerné. Partout en Europe, des entreprises— notamment en France, en Allemagne ou en Italie — tirent la sonnette d’alarme. Elles doivent faire face à une flambée des coûts logistiques, à des délais d’acheminement rallongés, et à la nécessité de trouver en urgence de nouveaux débouchés commerciaux.
Selon Les Brand, expert mondial en chaînes d’approvisionnement, cité par la BBC, repenser une chaîne d’approvisionnement ne se fait ni rapidement ni à bon marché : « Il faut identifier de nouveaux fournisseurs, tester leurs produits, former les équipes… C’est un processus long et coûteux, qui fragilise des marges déjà sous pression. »
Vers un été commercial explosif ?
Le durcissement annoncé des mesures américaines vient compliquer davantage la donne. L’administration Trump s’apprête en effet à appliquer dès le 1er août une nouvelle vague de surtaxes, ciblant les pays qui n’auraient pas conclu d’accord commercial conforme aux exigences de Washington. Une centaine d’États sont concernés, dont une quinzaine dès les premières salves. L’Union européenne, malgré les discussions engagées, est aujourd’hui incapable de garantir qu’elle évitera cette offensive douanière. En coulisses, l’UE évoque des contre-mesures potentielles via son instrument anti-coercition, mais la riposte risque de manquer d’efficacité, tant le cadre multilatéral de l’OMC est affaibli.
La tentation asiatique et la diversification en marche
En toile de fond, c’est un véritable rééquilibrage mondial qui est à l’œuvre. Des pays comme le Vietnam et l’Inde deviennent des alternatives crédibles pour contourner les surtaxes américaines. Certaines entreprises, comme Learning Resources, fabricant américain de jouets éducatifs cité comme exemple par la BBC dans son reportage, ont déjà pris les devants. Sa facture douanière est ainsi passée de 2,5 millions à plus de 100 millions de dollars lorsque Trump a temporairement relevé les droits de douane sur les importations chinoises à 145 %. Pour éviter une catastrophe industrielle, l’entreprise a relocalisé 16 % de sa production en Asie du Sud et entamé des poursuites judiciaires contre l’administration américaine.