L’Europe se dote d’une arme de dissuasion face aux chantages économiques

Réunion à la Commission européenne © Getty images

L’Union européenne a approuvé mardi la création d’un instrument européen commun qui vise à punir tout pays utilisant des sanctions économiques pour faire pression sur un de ses membres, comme actuellement la Chine contre la Lituanie.

Après plus d’un an de négociations, les eurodéputés et les Vingt-Sept ont trouvé un accord sur une législation dotant l’UE de nouvelles armes pour répondre aux menaces économiques de gouvernements étrangers. 

L’entrée en vigueur est attendue cet automne après approbation formelle par le Conseil de l’UE et le Parlement européen.

Différents types de représailles

Dans un objectif de dissuasion, l’UE pourra recourir à différents types de représailles: gel d’accès aux marchés publics, blocage d’autorisations de mise sur le marché de certains produits, blocage d’investissements…

Il s’agira d’un dernier recours, après épuisement des voies de médiation, car le dialogue direct avec l’Etat accusé de chantage économique sera privilégié.

Le commissaire européen au Commerce, Valdis Dombrovskis, a salué “une avancée majeure pour l’UE”. Ce nouvel instrument “nous permettra de défendre avec plus d’assurance nos droits et intérêts légitimes”, a-t-il affirmé.

“C’est un outil de plus au service de notre stratégie pour un commerce européen moins naïf”, a salué le ministre français chargé du Commerce extérieur, Olivier Becht.

Ces nouvelles armes pourraient être brandies dans un conflit du type de celui qui oppose actuellement la Lituanie à la Chine.

Le pays balte accuse Pékin de bloquer ses exportations pour protester contre l’ouverture en juillet d’une représentation diplomatique taïwanaise à Vilnius. La Chine considère Taïwan comme faisant partie de son territoire. Pour l’instant, l’UE a engagé des litiges au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

“Avant tout un effet dissuasif” 

Le nouvel instrument européen “anti-coercition” est un renforcement de la politique commerciale de l’UE, justifié par le contexte de tensions géopolitiques croissantes entre les Etats-Unis d’un côté, la Chine et la Russie de l’autre.

“C’est un nouveau genre d’outil commercial, pour une nouvelle époque (…), il aura avant tout un effet dissuasif (…), dans des circonstances extrêmes, il nous donne le pouvoir de riposter”, s’est félicitée l’eurodéputée grecque Anna-Michelle Asimakopoulou (PPE, droite).

L’Europe, victime de ses divisions, peine encore à utiliser son poids économique pour s’imposer sur la scène mondiale. La prise de décision en matière de politique étrangère européenne requiert l’unanimité des 27 États membres. Cette règle limite les capacités de réaction de l’Europe en cas de crise, chaque pays ayant tendance à défendre ses intérêts propres.

Plus de pouvoirs à la Commission européenne

Le nouvel outil donnera plus de pouvoirs à la Commission européenne, tout en laissant aux Etats membres un contrôle sur l’ensemble du processus. Cette répartition des pouvoirs a été un des points les plus âprement négociés, certains Etats rechignant à abandonner un droit de veto sur les mesures.

Concrètement, une fois saisie d’un cas, la Commission aura quatre mois au maximum pour évaluer s’il y a coercition ou non. Cette décision devra être approuvée par le Conseil de l’UE dans un délai de deux mois à la majorité qualifiée –avec le soutien d’au moins 55% des États membres [c’est-à-dire 15 États] représentant au moins 65% de la population de l’UE–, ce qui permettra de contourner l’opposition d’une minorité de pays.

En cas de feu vert s’ouvrira alors une phase de médiation, sans limite de temps, durant laquelle la Commission tentera de convaincre l’Etat incriminé de faire cesser les mesures contestées.

Faute d’accord, la Commission proposera les contre-mesures les plus adaptées choisies dans son nouvel arsenal. Pour s’opposer, les Etats membres auront besoin de réunir une majorité qualifiée contre la proposition. 

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