Scandale Petrobras: la bombe du géant Odebrecht va exploser…

Manifestations en réaction au scandale de Petrobas, impliquant la présidente Dilma Rousseff, le 15 mars 2015 à Sao Paulo © Reuters

Odebrecht, le plus puissant groupe de BTP du Brésil, au coeur du scandale de corruption Petrobras, du financement des partis, des chantiers du Mondial-2014 et des prochains JO de Rio, a décidé de révéler ses secrets explosifs.

Harcelé par la justice, le groupe a annoncé mardi soir la “collaboration définitive” de ses dirigeants impliqués avec les enquêteurs dans le but d’obtenir de futures remises de peine.

Le parquet fédéral a eu beau tempérer que les négociations avec le groupe n’avaient pas commencé, un nouveau vent de panique a commencé à souffler dans les couloirs du pouvoir à Brasilia.

Le scandale Petrobras, carburant volatile d’une crise politique historique qui menace de renverser la présidente de gauche Dilma Rousseff et les principales figures du pouvoir, couve une nouvelle bombe à retardement.

L’enquête a démontré qu’Odebrecht avait pris la tête d’un cartel regroupant les autres géants brésiliens de la construction pour truquer et surfacturer les marchés de sous-traitance du géant étatique pétrolier.

En contrepartie, des pots-de-vin étaient versés aux directeurs indélicats de Petrobras, désignés par les partis politiques de la coalition de centre-gauche au pouvoir.

Des rétro-commissions finançaient en retour les campagnes de partis ou de candidats, quand elles ne garnissaient pas leur comptes bancaires secrets à l’étranger.

Au moins deux milliards de dollars ont été siphonnés des caisses de Petrobras, le fleuron industriel du Brésil.

L’ancien patron d’Odebrecht et patriarche de la famille, Emilio Odebrecht, enrage en privé depuis que l’enquête éclabousse le groupe, à en croire les confidences des médias brésiliens.

“S’ils arrêtent Marcelo (son fils), ils devront construire trois cellules de plus, une pour moi, une pour Lula et une autre pour Dilma”, ruminerait-il en privé devant ses interlocuteurs.

Marcelo Odebrecht, qui avait succédé avec succès à son père, a bien été arrêté. Il croupit en détention provisoire depuis juin 2015. A l’inverse de nombreux inculpés, il s’est muré dans le silence.

Le couperet est tombé le 8 mars: une condamnation en première instance à 19 ans et 4 mois de prison!

Cette sentence, suivie d’une nouvelle opération de police mardi contre les dirigeants du groupe soupçonnés de gérer l’argent des pots-de-vin, semble avoir convaincu Odebrecht à collaborer.

Lors de perquisitions effectuées au mois de février, les enquêteurs ont découvert une intéressante comptabilité des largesses du groupe en faveur de 200 politiciens de 18 partis politiques entre 2012 et 2014.

‘Crabe’ et ‘Petit nerveux’

Mais selon le journal O’Globo, citant des sources policières, d’autres documents montrent que ces financements remontent à 1988, bien avant l’arrivée de la gauche au pouvoir en 2003.

Sur les colonnes de ces listes, face aux montants versés, on trouve alignés les noms de certaines des plus importantes figures politiques du pays, comme celui du chef de l’opposition Aecio Neves (centre-droit).

Les cadres facétieux d’Odebrecht en ont affublé beaucoup de surnoms pittoresques.

Le président de la Chambre des députés, Eduardo Cunha, fer de lance du processus d’impeachment contre Mme Rousseff, est ainsi surnommé “le crabe”.

Le président du Sénat Renan Calheiros, du grand parti centriste (PMDB) de la coalition au pouvoir, est “l’athlète”.

L’ancien président José Sarney (1985-1990) passe pour “l’écrivain”, le maire centriste de la ville olympique de Rio de Janeiro, Eduardo Paes, pour “le petit nerveux”, et Jaques Wagner, le chef de cabinet personnel de la présidente, “le passif”.

Ces documents ne révèlent pas forcément des financements illicites. Odebrecht est en effet l’un des plus gros contributeurs légaux des campagnes électorales au Brésil.

La plupart des intéressés ont d’ailleurs immédiatement allégué qu’il s’agissait bien de financements autorisés. C’est ce que les enquêteurs tentent maintenant de vérifier.

Les marchés obtenus par Odebrecht dans des conditions suspectes vont bien au-delà du secteur pétrolier.

Les enquêteurs ont de sérieux soupçons sur certains chantiers olympiques à Rio, comme le chantier de revitalisation du port et la construction de la ligne 4 du métro.

Le marché de construction du stade Arena Corinthians de Sao Paulo, de la cérémonie et du match d’ouverture du Mondial-2014 de football, a aussi donné lieu à des versements de pots-de-vins selon les enquêteurs.

Et le site satirique brésilien Sensacionalista.com.br de railler: “l’accord de collaboration d’Odebrecht peut révéler la corruption des travaux du Jardin d’Eden”.

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