Vacances et travail: quand la déconnexion pèse sur la performance collective

/ /

Près d’un salarié belge sur quatre regrette ses collègues pendant les congés. Un indicateur inattendu, mais révélateur du rôle central du lien social au travail, et de ses implications sur la motivation et la performance économique des entreprises.

Pour deux Belges sur trois (66 %), les vacances représentent avant tout une occasion de s’octroyer du temps pour eux-mêmes. Ils en profitent pour pratiquer des activités plaisantes qu’ils ne peuvent pas intégrer dans leur emploi du temps habituel (54%) et pour passer du temps avec leur famille (64%). Pour plus d’un Belge sur six (17%), les vacances représentent avant tout l’occasion de s’occuper de leurs enfants.  Voilà ce qui ressort d’une enquête menée par le prestataire de services RH Tempo-Team, en partenariat avec la professeure Anja Van den Broeck, spécialiste de la motivation au travail à la KU Leuven.

Que représentent les vacances pour vous?
1.           Avoir du temps pour moi (66%)
2.           Passer du temps avec ma famille (64%)
3.           Faire des activités agréables pour lesquelles je n’ai jamais le temps (54%)
4.           J’en profite pour faire ce qui doit être fait (par exemple dans la maison) (36%)
5.           Passer du temps avec mes amis (35%)
6.           M’occuper des enfants (17%)

Mais alors que l’été bat son plein, et que les juilletistes ont croisé les aoûtiens, la question de la déconnexion professionnelle ressurgit, opposant partisans d’une rupture totale avec le monde du travail et salariés qui, au contraire, conservent un œil sur leurs dossiers, voire échangent avec leurs collègues.

Une récente enquête menée par Tempo-Team et la KU Leuven révèle un paradoxe : si la majorité des Belges considèrent les vacances comme un moment pour soi, une part non négligeable continue de penser au travail, voire d’en assurer le suivi. Et pour 26 % des salariés, les collègues leur manquent durant les congés. Derrière cette observation se cachent des enjeux économiques liés à l’engagement, à l’organisation interne et à la productivité des entreprises.

La difficulté de lâcher prise

Pour 43 % des travailleurs belges, le travail continue d’occuper l’esprit pendant les congés. Ce chiffre monte à 50 % chez les moins de 35 ans, soulignant une pression accrue sur les jeunes actifs. Pire encore : 37 % des salariés assurent un suivi de leurs dossiers, souvent sans relais interne organisé. Dans 50% des cas, personne ne prend en charge leurs responsabilités durant leur absence.

Cette organisation déficiente n’est pas sans coût. En l’absence de remplaçants désignés, le risque d’accumulation de tâches au retour de congés peut provoquer du stress, des erreurs ou des retards. Or, un retour stressé est rarement propice à une reprise efficace.

La situation met aussi en lumière le manque de structuration des processus internes dans de nombreuses entreprises, qui peinent à instaurer une culture de la continuité opérationnelle pendant les périodes de repos.

Attachement social et motivation au travail

L’étude met en évidence une autre dimension souvent négligée : l’impact du lien social sur la motivation. Ceux qui regrettent leurs collègues pendant leurs vacances affichent de meilleurs scores

  • de satisfaction professionnelle (8,8/10 contre 7,9/10),
  • d’implication (8,4/10 contre 7,7/10) et
  • de plaisir au travail (8,4/10 contre 7,6/10).

Ce lien affectif joue donc un rôle dans la performance durable des équipes, et son absence temporaire pendant les congés suffit à affecter les perceptions individuelles.

Un salarié motivé est un salarié rentable. À l’inverse, un isolement affectif ou un manque d’alignement avec l’équipe peut peser sur l’efficacité et la fidélisation. Dans un contexte où la rétention des talents est un enjeu majeur, encourager des dynamiques collectives positives peut se révéler aussi stratégique que les incitants financiers.

Vers une culture de la flexibilité encadrée

L’enquête suggère qu’il n’existe pas de modèle unique : certains salariés trouvent du réconfort en restant connectés, d’autres ont besoin d’une rupture totale. C’est la clarté des accords, la répartition des tâches et l’autonomie qui déterminent la qualité de l’expérience de déconnexion — ou de connexion volontaire.

“Pour certains, de brèves connexions pendant les vacances diminuent l’anxiété face à ce qui les attend au retour au bureau. Là où les uns voient leurs congés comme un droit à un repos total, d’autres les perçoivent comme un moment de flexibilité dont ils gardent le contrôle. Les deux visions requièrent des choix réfléchis et des accords clairs”, déclare Aline Bernard, porte-parole de Tempo-Team.

Pour les entreprises, cela implique d’investir dans des processus de remplacement, de former les équipes à la gestion collective de la charge de travail et de reconnaître la diversité des profils en matière de gestion du temps et du stress. La flexibilité ne doit pas se faire au détriment de la santé mentale, ni de la performance collective.

Réconcilier performance et bien-être

Ce que révèle en creux cette enquête, c’est l’imbrication profonde entre bien-être individuel, attachement collectif et performance économique.

Dans une période où les coûts de désengagement sont lourds (turnover, absentéisme, productivité en baisse), les entreprises gagneraient à repenser leur approche du travail saisonnier et des congés : non comme une simple parenthèse, mais comme une opportunité d’optimiser les mécanismes internes, d’écouter les signaux faibles, et de valoriser les liens humains.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content