Le cumul de plusieurs jobs, bénéfique pour l’économie, néfaste pour les étudiants et la santé mentale

Le nombre de personnes en Belgique ayant un flexi-job atteint des niveaux records. Si le cumul de plusieurs jobs semble profiter à l’économie, il n’est pas bénéfique au bien-être des travailleurs ni à la réussite des étudiants.

Les flexi-jobs sont de plus en plus plébiscités en Belgique. Le nombre de travailleurs occupant un flexi-job a augmenté de 45% l’année dernière, selon des chiffres du spécialiste de services RH SD Worx. En termes professionnels, ce phénomène est aussi décrit sous le terme « moonlighting ».

Le groupe le plus important parmi les « flexi-jobbers » est celui des 23-30 ans, suivi par les 60 ans et plus. De plus en plus d’étudiants exercent un emploi pendant l’année académique, et non plus (exclusivement) pendant les vacances d’été. De plus, les étudiants veulent travailler de plus en plus d’heures. Selon de nouvelles données de la plateforme de travail Nowjobs, un étudiant sur trois souhaite travailler plus d’heures que les 600 heures actuelles par an.

Mais, travailler plus et plus dur est-il positif pour la santé et l’économie ? Ne devrions-nous pas plutôt chercher à faire travailler davantage de personnes inactives au lieu de faire travailler davantage ceux qui ont déjà un emploi ? “Les flexi-jobs ou jobs étudiants ne menacent pas les emplois réguliers“, déclare le professeur de sociologie du travail à la KULeuven Ludo Struyven responsable du groupe de recherche sur l’éducation et le marché du travail au Nieuwsblad. “Il s’agit de petits emplois avec des horaires irréguliers, souvent concentrés dans le secteur de l’horeca ou du commerce de détail. Ces emplois ne profitent pas aux inactifs. Ainsi, un flexi-job ou un job étudiant ne constitue pas une concurrence pour eux.”

Les flexi-jobs ou jobs étudiants ne menacent pas les emplois réguliers

Ludo Struyven, professeur de sociologie du travail à la KULeuven

Stimuler l’économie

C’est également ce que constate l’organisation patronale Unizo dans le journal flamand. “Étant donné le grand nombre de postes vacants et la demande croissante de personnel, il est difficile de dire que les flexi-jobs  prennent la place des demandeurs d’emploi”, déclare le directeur général délégué Danny Van Assche, soutenu par le professeur en économie du travail Stijn Baert (UGent). “La recherche montre que le travail supplémentaire crée plus d’emplois qu’il n’en déplace. Les personnes qui travaillent davantage gagnent plus, stimulent l’économie et créent ainsi plus d’emplois, ce qui permet de mieux financer les pensions et notre sécurité sociale“, explique-t-il.

Si le ‘moonlighting’ est bénéfique à l’économie, les experts interrogés par Het Nieuwsblad mettent toutefois en garde contre les dangers d’une croissance continue. “Plus le cumul d’emplois devient la norme, plus il sapera les emplois réguliers”, prévient le professeur Struyven. Les flexi-jobs dans n’importe quel secteur, pour n’importe qui, ne sont pas la bonne direction selon le sociologue du travail, qui souligne également le taux fiscal et social avantageux auquel le travail supplémentaire est effectué. “Si cela continue de croître à grande échelle, vous allez effectivement saper la sécurité sociale. De plus, cela donne l’impression que payer des cotisations sociales n’est pas du tout important.” Pour le professeur Struyven, c’est une raison pour laquelle le cumul d’emplois doit être réglementé, tandis que le syndicat socialiste ABVV estime que le phénomène doit être réduit. “Les travailleurs flexibles ne paient pas d’impôts ni de cotisations sociales, tout en accumulant des droits sociaux”, déclare sa présidente Miranda Ulens.

Risque de burn-out

Indépendamment de l’impact sur l’économie ou la sécurité sociale, ce cumul de fonctions n’est pas non plus toujours bénéfique au bien-être des travailleurs. “Les flexi-jobbers sont plus exposés au burn-out“, explique le professeur Baert. “Ce n’est pas parce que quelqu’un travaille plus qu’il court automatiquement un plus grand risque. Ainsi, une personne qui travaille à temps plein n’est pas plus susceptible de faire un burn-out qu’une personne qui travaille à temps partiel. Ce sont les travailleurs qui restent longtemps dans le rouge qui courent un danger.” Et les flexi-jobbers sont toujours dans le rouge, selon le professeur. “Il faut travailleur au moins 4/5e pour pouvoir avoir un flexi-job, ce qui signifie que vous travaillez déjà au moins 30 heures. Avec votre emploi supplémentaire, vous pouvez ensuite cumuler jusqu’à 17 heures supplémentaires. Cette somme de travail met en danger la santé mentale.

Une entrave aux études

L’expérience des étudiants en tant que flexi-jobbers est généralement considérée comme un atout sur le marché du travail, avec les employeurs estimant que cela renforce l’attitude et la motivation des jeunes. Cependant, cette pratique peut avoir des conséquences négatives sur la réussite académique des étudiants qui investissent beaucoup de temps dans leur travail pendant leurs études. Le professeur Wouter Duyck de l’UGent souligne ce problème, notant que ces étudiants sollicitent des aménagements tels que des enregistrements vidéo de cours ou des reports d’examens, ce qui prolonge leur temps d’étude.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content