La connaissance des langues des employés belges se dégrade: “La perte d’un atout essentiel pour l’exportation” 

La maîtrise du néerlandais, du français et de l’anglais en tant que deuxième langue est en baisse parmi les employés belges. Ce déclin des compétences linguistiques met en danger la compétitivité de nos entreprises.  

Les compétences linguistiques professionnelles en Belgique présentent une tendance préoccupante, avec une dégradation notable de la maîtrise du français, de l’anglais et du néerlandais comme deuxième langue. Une analyse portant sur 33 280 tests de langue standardisés effectués par le prestataire de services RH Bright Plus entre 2015 et 2023 révèle cette tendance inquiétante chez les candidats multilingues.  

Les résultats de l’enquête PISA confirment cette baisse continue des compétences linguistiques chez les élèves flamands et wallons, ce qui suscite des inquiétudes également sur le marché du travail. Les tests linguistiques effectués par Bright Plus fournissent un aperçu précieux des compétences linguistiques des employés belges. Ils soulignent une continuité de cette tendance du milieu éducatif au milieu professionnel. 

Concentré sur les employés multilingues, Bright Plus a testé uniquement les candidats supposés posséder de bonnes compétences linguistiques. Cependant, la tendance à la baisse de ces résultats suggère que la situation des compétences linguistiques des employés belges pourrait être encore plus préoccupante en pratique. 

La maîtrise du français, du néerlandais et de l’anglais régresse 

La maîtrise du français des Belges néerlandophones a baissé d’un niveau permettant d’exprimer une opinion et de parler d’expériences (entre B1 et B2), à un niveau inférieur à B1, soit une connaissance d’expressions courantes et quotidiennes. De même, les Belges francophones voient leur maîtrise du néerlandais passer d’un niveau légèrement supérieur à B1 à un niveau inférieur à B1, ce qui signifie qu’en moyenne, ils ont désormais du mal à formuler clairement leurs opinions.  

Dans l’ensemble, la maîtrise de l’anglais a également régressé, passant presque du niveau où l’on peut comprendre les principales idées de textes complexes (proche de B2) à la simple capacité de pouvoir exprimer son propre avis (légèrement au-dessus de B1). Pour les Belges néerlandophones, la connaissance de l’anglais a baissé du niveau B2 au niveau permettant d’échanger des expériences personnelles (à mi-chemin de B1). Quant aux Belges francophones, cette connaissance a diminué d’un niveau supérieur à B1 à plus de A2. 

Les scores en allemand stables

En anglais, les jeunes candidats obtiennent de meilleurs scores que les plus âgés, à la fois en compréhension écrite et orale, tandis que les candidats plus âgés obtiennent de meilleurs résultats en néerlandais ou en français. L’une des explications possibles est que les jeunes sont davantage exposés à l’anglais en raison de l’omniprésence de la langue dans l’enseignement et de la prédominance de la culture anglo-saxonne dans les médias sociaux, les séries et les films. Les scores en allemand sont restés stables, mais le nombre de tests d’allemand que Bright Plus peut réaliser diminue rapidement. En effet, il devient de plus en plus difficile de trouver des candidats qui ont au moins une connaissance de base de cette langue. 

Connaître au moins les langues nationales belges aide les candidats à obtenir un meilleur emploi et facilite les affaires pour nos entreprises, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières.

Violaine Baeten, experte communication chez Bright Plus

La compétitivité des entreprises belges en danger  

Violaine Baeten, experte communication chez Bright Plus, souligne que cette problématique n’est que la partie visible de l’iceberg. Elle met en garde contre la perte d’un atout essentiel pour l’exportation. « Nos cerveaux sont notre principal produit d’exportation belge et le déclin des compétences linguistiques met en danger la compétitivité de nos entreprises. Connaître au moins les langues nationales belges aide les candidats à obtenir un meilleur emploi et facilite les affaires pour nos entreprises, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières. Il est donc urgent de revaloriser les compétences linguistiques.” Pour la spécialiste, les langues devraient recevoir au moins autant d’attention que les disciplines STEM ((Sciences, Technologies, Ingénierie, Mathématiques). “C’est là que le gouvernement et l’enseignement, mais aussi les entreprises et les travailleurs, ont un rôle à jouer. »  

Les compétences linguistiques sont devenues indispensables pour les entreprises internationales. Samuel De Potter de Beaulieu International Group confirme que trouver des candidats compétents prend de plus en plus de temps. Même les jeunes ont des difficultés à s’exprimer correctement, malgré une exposition intensive à l’anglais.  

“Les compétences linguistiques ne peuvent pas être simplement remplacées par ChatGPT ou DeepL” 

Nadine De Donder, enseignante de français à l’HOGENT

Nadine De Donder, enseignante de français à l’HOGENT, remarque, elle aussi, une baisse des compétences linguistiques. En plus d’enseigner, elle conseille les entreprises pour améliorer la maîtrise des langues. Elle soutient que les outils en ligne comme ChatGPT ou DeepL ne peuvent remplacer les compétences linguistiques. Elle critique, elle aussi, la priorité donnée aux matières STIM au détriment des langues, ce qui crée des lacunes chez les étudiants. Elle affirme que cela conduit à des difficultés en lecture et en communication orale, engendrant des malentendus et des conflits. Elle préconise une amélioration de l’enseignement des langues et souligne que les outils en ligne ne sont que des aides. 

Violaine Baeten souligne l’importance de relever le niveau dans l’éducation et de promouvoir le multilinguisme dès le jeune âge. Elle encourage les entreprises et les individus à améliorer leurs compétences linguistiques en créant une culture où parler d’autres langues. “Il faut une culture où les gens s’habituent à parler d’autres langues et osent commettre des erreurs”, avance-t-elle.

En plus de la formation traditionnelle, elle propose des initiatives informelles telles que les déjeuners linguistiques et les réunions où chacun parle sa première langue. Elle mentionne également l’utilisation d’applications ludiques pour augmenter le contact avec la langue au quotidien.

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