Georges-Alexandre Hanin: “Les entrepreneurs doivent gérer leur énergie, c’est vital”

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Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Au départ de son expérience, Georges-Alexandre Hanin a publié un livre pour aider les dirigeants à se reconnecter. Une vingtaine d’entretiens avec des CEO et des coachs sportifs ont nourri la réflexion: il les publie sur notre site internet.

Georges-Alexandre Hanin est un entrepreneur reconnu de la scène technologique belge. Il est également consultant et accompagne de nombreux dirigeants et entrepreneurs dans leur développement personnel après avoir lancé et dirigé pendant 12 ans la start-up puis scale-up belge Mobilosoft. Il a également fondé le département “productivité” au sein du groupe Virtuology. En 2023, il a publié Re-Connect, un ouvrage qui dispense – au départ de son expérience –des conseils pour faire le lien entre le succès d’un busi­ness, la santé et le développement personnel. Pour valider sa thèse, il a rencontré 20 CEO connus et cinq coachs sportifs réputés. Le site de Trends-Tendances diffuse les podcasts réalisés au départ de témoignages récoltés pour cet ouvrage. “Ce sont des pépites”, dit Georges-Alexandre Hanin, qui nous explique sa démarche.

TRENDS-TENDANCES. Comment sont nés ce livre et ce podcast sur la nécessité pour les entrepreneurs de se reconnecter?

GEORGES-ALEXANDRE HANIN. J’ai publié il y a deux ans un livre intitulé Le Marketing digital et local expliqué à ma fleuriste. Quelques semaines après sa sortie, nous avions une réunion à Madrid avec mon équipe de Mobilosoft pour définir ce que nous voulions faire en vente et marketing. Après nos travaux de la journée, alors que l’on parle du livre au cours d’un petit resto, ma collaboratrice Lucie me dit: “Mais on s’en fout de ce livre, nous, ce que l’on aimerait, c’est que tu nous racontes ton changement parce qu’il y a quelques années, ce n’était pas super cool de bosser avec toi”.

Vous étiez autoritaire?

Oui, autoritaire, directif, je ne laissais la place à personne, je savais ce qu’il fallait faire, à ma manière, sans écouter. Et ma collaboratrice Lucie poursuit: “C’est incroyable parce qu’aujourd’hui, je serais prête à traverser un océan pour bosser avec toi. Je veux que tu m’expliques ce que tu as fait pour changer”. C’est le début de ce processus.

Vous aviez vraiment mené une réflexion pour changer ou cela?

Durant les trois années évoquées par Lucie, j’ai suivi une formation aux techniques de coaching professionnel. Premièrement, il s’agit de travailler sur soi-même pour comprendre mieux d’où l’on vient, ce que l’on fait, comment on fonctionne… Deuxièmement, on appréhende comment coacher les autres. Et troisièmement, comment développer des équipes de telle sorte que les gens travaillent ensemble.

J’ai compris quelque chose d’important. Dans ma carrière d’entrepreneur, j’ai eu énormément de hauts et de bas, avec des succès intenses chez Mobilosoft et une croissance formidable, mais une chute après le départ de deux collaborateurs clés du projet. Je n’avais pas l’énergie suffisante et la capacité de me réinventer, du moins je devais passer par des phases complexes pour y arriver. Cette formation m’a permis de comprendre qu’il est essentiel pour un entrepreneur de gérer sa propre énergie. Et l’erreur que j’avais commise, c’est de vouloir trouver toutes les solutions moi-même.

Vous étiez au bout du rouleau?

Notre énergie est limitée. Il n’y a que 24 heures dans une journée, mais il faut aussi prendre le temps de dormir, de manger, de faire du sport ou de faire des choses qui vous régénèrent. Sans se soucier de cela, on court tout droit au burn-­out. Mais au niveau professionnel également, un entrepreneur doit placer son énergie au bon endroit parce qu’il est soumis à tant de distractions potentielles. La capa­cité à gérer sa propre énergie, cela résume tout.

La question de la santé mentale des entrepreneurs est-elle occultée par le désir de réussite? Est-ce considéré comme une faiblesse?

Il y a de cela, oui. Dans les classes de coaching où j’ai suivi des cours, il y avait quatre hommes sur une trentaine d’élèves… Les fem­mes s’en soucient davantage et il devrait d’ailleurs y avoir davantage d’entrepreneuses. Cela illus­tre le fait que les hommes n’aiment pas travailler sur eux parce que cela serait, à leurs yeux, une démonstration de faiblesse.

Pour placer l’énergie au bon endroit, il faut pourtant avoir l’envie de travailler sur soi et comprendre ce qui nous nourrit et nous équilibre. En général, il y a huit domaines clés pour l’épanouissement. La carrière et la réussite professionnelle en font partie. Mais si une valeur prend trop de place, il en découle un manque pour les autres et cela rompt l’équilibre. Il faut absolument se demander: “pourquoi je suis là?”. En outre, ce “pourquoi” fluctue au fil du temps. Pour éviter les hauts et les bas dans une carrière, il faut prépa­rer ces moments de transition à l’avance, imaginer la phase suivante sans rester assis sur ses acquis. On doit célébrer ses réussites, et surtout y puiser l’énergie pour écrire la suite.

Cette interpellation par votre collaboratrice a donc généré ce livre, “Re-Connect”?

Exactement. Quelques mois plus tard, j’ai arrêté la collaboration avec Virtuology qui durait depuis 12 ans, le moment était venu de passer à autre chose. Je me suis retrouvé chez moi et je me suis souvenu de ce que Lucie m’avait raconté et j’ai pris le temps d’écrire. Je suis vraiment parti de cette notion de gestion de l’énergie pour développer ce modèle de reconnexion. J’ai aussi décidé de le confronter en rencontrant 20 entrepreneurs de renom comme Eric Domb ou Giles Daoust, et des coachs sportifs comme Felice Mazzu ou Jacques Borlée, pour le valider.

Que vous ont apporté ces rencontres?

En parlant avec Jacques Borlée, par exemple, je me suis rendu compte d’une erreur fondamentale que je commettais : j’avais tendance à casser les gens en considérant que je savais exactement ce qu’il fallait faire. Par ailleurs, et c’est trop souvent le cas en Europe, on a tendance à se focaliser sur ce qui ne va pas, on considère que notre zone de progression se trouve dans nos faiblesses, mais Jacques m’a convaincu que c’était l’inverse: un sportif de haut niveau ne va pas avancer si on le fait travailler sur ses défauts; il faut au contraire mettre l’accent sur ses qualités. Si on vous emmène à un niveau d’excellence là où vous êtes bon, votre énergie vous permettra de débloquer naturellement les aspects problématiques. Cela renforce la confiance en soi et la sérénité. Jamais je n’ai rencontré un entrepreneur qui fonctionnait de la sorte. C’était une révélation pour moi. Quant à Felice Mazzu, il a insisté sur la nécessité de rester soi-même. Quand il est allé entraîner le Football Club de Genk, il a pensé qu’il devait être arrogant pour obtenir des résultats : il s’est planté.

Votre livre vit bien depuis sa parution?

Des organismes soutenant des start-up commencent à nous en acheter en quantité pour leurs entrepreneurs, c’est un outil qui fonctionne bien. Christophe Rousseau, ancien CEO d’Immoweb, valide l’approche. Les enseignants de ma formation de coaching valident, eux aussi.

D’emblée, vous aviez l’intention de diffuser ces entretiens sous forme de podcasts?

Oui, c’était tout de suite l’idée. J’ai rencontré 25 personnes et il y a des pépites dans ce que chacun m’a dit. Ce sont des personnalités aux potentiels multiples. Je trouvais dommage de priver les gens de ces expériences partagées. Le site de Trends-Tendances me permet de les diffuser plus largement et je m’en réjouis. z



Georges-Alexandre Hanin,
“Re-Connect”, Chronica, 2023.

Re-Connect
Le podcast inspiré de l’ouvrage éponyme sera diffusé à partir de ce jeudi 11 janvier sur le site de Trends-­Tendances. Une vingtaine d’épisodes seront diffusés, au rythme d’un par semaine.
Voici la programmation des épisodes du mois de janvier.
· Jeudi 11 janvier: Eric Domb (Pairi Daiza)
· Jeudi 18 janvier: Felice Mazzu (clubs de football de Charleroi, Genk, Union, Anderlecht…)
· Jeudi 25 janvier: Giles Daoust (Daoust Interim)

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