À l’approche des élections sociales, le nombre de licenciements collectifs atteint un sommet

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Par rapport à l’année dernière (période de janvier à septembre), le nombre d’annonces de licenciements collectifs effectives a déjà augmenté de 55%, passant de 40 à 62 employeurs, selon SD Worx.

Le prestataire de services en ressources humaines ne manque pas de souligner que cette évolution est inhabituelle pour l’année précédant les élections sociales ; celles-ci auront lieu au mois de mai 2024. « Il est étonnant que de nombreuses entreprises lancent encore parfois de profondes réorganisations à la veille des élections sociales, s’étonne Marc Morren, Expert en concertation sociale chez SD Worx. En effet, ces élections sont normalement l’occasion d’une pause dans les processus de changement majeurs en matière de ressources humaines. Il semble que ce soit moins le cas pour ces élections. »

Les derniers chiffres du SPF Travail confirment également la tendance à la hausse des licenciements collectifs annoncée par SD Worx. Ces chiffres annoncent que « 62 unités techniques d’entreprise (UTE) ont entamé une procédure d’information et de consultation au cours de la période allant de janvier 2023 à septembre 2023 ; cela concernait 5.315 travailleurs, dont la majorité en Flandre (67 %) »[3]. Ces chiffres représentent une hausse de 55% des licenciements collectifs pour la même période par rapport à l’année précédente. Les secteurs les plus touchés par ces licenciements collectifs sont ceux de la (pétro)chimie et de la distribution. En effet, entre janvier et septembre 2022, 40 unités techniques ont lancé une procédure d’information et de consultation pour 2.547 travailleurs (70 % en Flandre), principalement dans les secteurs du textile et de la (pétro)chimie.

Encadré : Une UTE (unité technique d’entreprise ou d’exploitation) est un groupe d’entreprises qui sont (ou étaient) liées entre elles. Une unité technique d’entreprise peut se composer de plusieurs entités juridiques, mais ces différentes entités juridiques doivent avoir un lien social ET une interdépendance socio-économique simultanée ou historique. Le lien social signifie que les entités juridiques ont au moins une personne en commun, le statut ne jouant aucun rôle. [4]

Quand parle-t-on de licenciement collectif ?

Pour déterminer s’il s’agit bien d’un « licenciement collectif », SD Worx explique qu’il faut vérifier le nombre de travailleurs que l’entreprise licencie au cours d’une période de 60 jours. Bien entendu, ce nombre de travailleurs varie en fonction de la taille de l’entreprise. Pour une entreprise dont le nombre moyen de travailleurs est compris entre 21 et 99, on peut déjà parler de licenciement collectif si 10 travailleurs ou plus sont licenciés. [1] 

« La législation garantit deux éléments importants, expose Marc Morren, le démarrage du dialogue social et le paiement d’une indemnité de reclassement qui, depuis le début de cette année, est intégralement à charge de l’employeur. D’une part, le démarrage plus rapide de la procédure d’information et de consultation peut améliorer la qualité du dialogue social, même si l’on peut se demander si la contraignante loi Renault est le meilleur moyen d’y parvenir. D’autre part, les coûts supplémentaires risquent d’aggraver la vague de licenciements parmi les employeurs concernés. Si le coût légal des licenciements augmente, les possibilités d’engagements extralégaux peuvent également se réduire (qu’on appelle « plan social »), ce qui est à nouveau négatif pour les travailleurs et tous les partenaires sociaux. »

Vers un élargissement de la période de référence ?

Cette règle d’un certain pourcentage de travailleurs licenciés au cours d’une période de 60 jours pourrait bien changer dans un avenir proche. En effet, depuis mars 2023 et les mésaventures qu’a connues Delhaize, le ministre du Travail, Pierre-Yves Dermagne (PS) entend bien réformer la Loi Renault, et a rédigé en juin une proposition qui va dans ce sens ; celle-ci propose de doubler la période de référence pour un licenciement collectif, la faisant ainsi passer de 60 à 120 jours.

Mais si cette proposition devait entrer en application, elle aura un impact aussi bien sur le nombre d’entreprises concernées par un licenciement collectif que sur le nombre de travailleurs touchés ; ces deux nombres passeraient du simple au double, selon SD Worx, qui rappelle que dans le cas d’un licenciement collectif, il existe une obligation de consultation sociale intensive, qui débouche souvent sur ce que l’on appelle un « plan social ». Ainsi, le prestataire de services RH a analysé qu’en étendant la période de référence à 120 jours, presque deux fois plus d’employeurs (+86 %) et de travailleurs (+110 %) sont concernés par ces obligations de consultation sociale et procédures.

Impact sur les indemnités

Les indemnités aussi pourraient être impactées… SD Worx attire l’attention sur le fait que les travailleurs licenciés dans le cadre d’un licenciement collectif reçoivent des indemnités de reclassement (soit une indemnité correspondant au salaire en cours et aux avantages acquis en vertu du contrat de travail) de la part de leur employeur. Depuis janvier 2023, ces indemnités sont entièrement à charge des employeurs. Ils ne peuvent en effet plus réclamer ces indemnités de reclassement à l’ONEM[2]. Une modification de la loi qui a un impact sur les entreprises: SD Worx est arrivé à la conclusion que « si la proposition des 120 jours était également étendue à l’obligation de payer des indemnités de reclassement, ce coût supplémentaire s’appliquerait à deux fois plus d’employeurs et de travailleurs ». 

Pour l’instant, le ministre Pierre-Yves Dermagne a transmis ses propositions de modifications de la Loi Renault au Conseil National du Travail (CNT). À la suite de l’avis du Conseil National du Travail, le conseil des ministres doit encore les examiner.

[1] Le nombre exact de travailleurs dépend de la taille de l’entreprise. Licenciements collectifs | Service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale
[2] Une modification de la loi rend les restructurations jusqu’à 20 % plus coûteuses pour l’employeur | SD Worx
[3] Source : Statistiques sur les restructurations | Service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale
[4] https://www.partena-professional.be/fr/nos-connaissances/infoflashes/reduction-premiers-engagements-plus-stricte-pour-jeunes-petits

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