Ressources humaines: le “team building” à la sauce Covid

En matière de "team buildings", les cours de cuisine ont eu énormément de succès depuis le premier confinement. © Getty Images

A l’heure où la pandémie continue de disloquer les équipes et où la cohésion et la collaboration ne sont plus que digitales, les sessions de “team building” n’ont jamais paru aussi importantes. Covid oblige, elles ont aussi dû se réinventer. Parfois à l’aide de sociétés spécialisées, parfois à l’aide de bouts de ficelle et de systèmes D tout aussi efficaces.

Depuis son apparition dans les années 1980, le team building a acquis ses lettres de noblesse au sein des entreprises. Si les sorties en kayak font parfois rire dans certains cénacles, il n’en est pas moins admis que ces activités, conçues pour sortir les employés du cadre strict de l’entreprise, permettent d’atteindre un certain nombre d’objectifs clairs: augmenter l’engagement, solidifier la culture d’entreprise, initier les nouveaux arrivés à cette même culture et leur permettre de tisser des liens avec leurs collègues ou résoudre des conflits ou des situations de stress. Le team building est aussi un moyen essentiel pour cimenter la cohésion des équipes mais aussi leur permettre d’apprendre à apprécier, par le jeu, les compétences particulières des uns et des autres et de les utiliser au mieux dans le cadre du travail.

Nous avons booké Liaisons Délicieuses tous les midis pendant 15 jours, par groupes de cinq ou six choisis pour casser les silos.”

Jean-Charles Velge (Qover)

Entretenir la culture d’entreprise

Evidemment, la pandémie bouleverse depuis un an les jolies activités que les uns et les autres avaient prévues. Mais là aussi, comme pour les formations, le recrutement et l’animation d’équipe, la résilience s’est imposée et des solutions créatives ont été trouvées. Il faut dire que pour certains, tisser des liens en dehors du travail est crucial.

“La culture d’entreprise, c’est essentiel dans une start-up et sans doute plus qu’ailleurs, confie Jean-Charles Velge, le cofondateur de Qover, spécialisée dans l’insurance hacking. Nous n’avons pas d’asset physique. C’est ce que nous créons pour le client qui fait la différence. Nous devons grandir vite tout en recrutant bien et réalisant un bon onboarding. Chez Qover, cette culture d’entreprise est très forte. Nous sommes des jeunes gens bien décidés à révolutionner l’assurance. Nous avons recruté 17 personnes depuis mars 2020. Comment garder cette culture d’entreprise dans une équipe qui grandit, dont les membres ne se voient plus et dont certains ne se sont même quasi jamais vus en vrai? Zoom, c’est bien pour délivrer ce qu’on attend de vous mais pour tisser des liens ou faire copain-copain, ce n’est pas génial. Trouver des alternatives au team building traditionnel fut donc un véritable challenge pour nous. Nous avons alors essayé plein de choses avant de trouver ce qui fédérait l’équipe. Clairement, c’est un avantage de créer sa propre boîte. Nous n’avons pas de règles, nous faisons ce que nous voulons et nous voyons ce qui marche!”

Du surf au Portugal

Avant la pandémie, Qover avait l’habitude d’organiser un gigantesque team building avec toute l’entreprise. L’événement a grandi en magnitude parallèlement à la croissance de la start-up qui, dans la foulée de son partenariat avec Revolut, devrait encore nous valoir de belles surprises dans les semaines qui viennent. Après un parcours commando avec nuit en Ardenne et un week-end de voile à Cadzand, Qover a organisé une semaine en Croatie avec travail de 9 h à 17 h puis, le soir, des activités plus proches des vacances au bord de la piscine. Et en 2019, quelques jours de surf au Portugal…

“Nous travaillons très dur mais après, oui, nous aimons bien nous amuser, poursuit Jean-Charles Velge. Ce qui est certain, c’est que si la situation sanitaire le permet, nous allons organiser un gigantesque team building avec toute l’équipe cet automne. Il faut retisser des liens entre nous et intégrer les nouveaux. Créer un esprit d’équipe, c’est le meilleur investissement qu’une entreprise puisse faire. En attendant, nous avons trouvé des solutions alternatives. Pendant le premier confinement, nous avons joué tous les mercredis soir à Counter-Strike, dont nous avons offert la licence à tout le monde. Pour le deuxième confinement, nous avons fait appel à la cuisinière Leonor de Palacio et ses Liaisons Délicieuses. Elle propose de chouettes formules de cours destinées aux entreprises. Nous avons booké tous ses lunchs pendant 15 jours par groupes de cinq ou six choisis pour casser les silos. Ils ont fait de la cuisine ensemble pendant deux heures sous les conseils de Leonor avec des ingrédients que nous avons préfinancés pour chacun. Nous avons aussi pris une formule du soir, plus relax, que nous avons terminée par un apéro festif ensemble. A cette occasion, nous avons offert la boîte de Gin In The Box qui propose une bouteille, des tonics et des petites surprises à manger. Cela a eu beaucoup de succès.”

Les ‘team buildings’ digitaux nous ont permis de toucher plus de monde mais aussi d’y intégrer plusieurs pays ou plusieurs services.

Katia Mouvet (Puratos)

Avec la pandémie, de nombreux concepts digitaux ont fait florès. Imaginés par des entreprises dont l’organisation de team building était déjà la raison d’être ou d’autres qui ont changé de modèle, comme Oh Chef. Créée en 2013, cette plateforme permettait de mettre en place la venue de chefs à domicile. Avec le Covid, elle a imaginé des concepts autour de la gastronomie et de la cuisine. Des formules destinées aux entreprises qui allient quiz et préparation de petits plats. Les mêmes proposent aussi une soirée autour du vin présentée par Philippe Limbourg, l’ancien directeur de la rédaction du Gault & Millau Belgique. Il s’agit d’un quiz de plus de deux heures qui allie dégustation de vins inconnus, reçus au préalable à la maison, et questions qui amènent à identifier les vins. Un concept très bien fait et accessible aussi aux néophytes qui a déjà séduit HP et la BNB.

Pour la bonne cause

D’une manière générale, les cours de cuisine ont eu énormément de succès depuis le mois de mars 2020. C’est une thématique qui permet aussi d’associer la famille à l’événement. Vu ses gammes de produits, et notamment celles destinées aux professionnels comme les chefs, Nestlé l’a proposée à trois reprises à l’ensemble de ses employés. Au départ d’une food box envoyée à la maison, l’idée était de cuisiner tous en même temps le repas du soir, du midi ou même de la pâtisserie avec l’aide d’un chef client. “C’était aussi une façon de rappeler notre Family Day que nous n’avons pas pu organiser, explique Florence Maniquet, corporate communication manager chez Nestlé Belgilux. C’était aussi une manière de toucher tout le monde en même temps. Pour le reste, les team buildings ont surtout été réalisés au sein des équipes. Parfois, des sessions très courtes d’une heure pour couper la journée de travail. Parfois, un événement plus long. Dernièrement, l’équipe Waters a participé à une épreuve digitale impossible à conclure sans l’apport de tous les membres de l’équipe. Les commerciaux se sont, eux, alliés pour retrouver virtuellement une personne disparue via un concept imaginé par l’opérateur de team buildings Bounce-it.”

Au mois d’avril, le département Opérations de Nestlé Belgilux va se lancer dans un autre concept: celui développé par atlasGO. Cette société créée il y a quelques années à San Francisco par trois personnes (dont le Belge Thomas Querton) propose des formules originales qui allient des défis bien-être et environnementaux au soutien d’oeuvres de charité. Depuis son installation en Belgique en 2019 sous la direction de Cédric Vandermeersch, elle a convaincu de nombreuses entreprises belges (Befimmo, Belron, Orange, etc.) de se surpasser pour la bonne cause.

“AtlasGO propose une façon originale d’augmenter l’engagement des équipes tout se ralliant autour d’un objectif noble, confie Julie Hautfenne, head of operations chez Nestlé Belgilux. Pendant tout le mois d’avril, mon département va se mobiliser pour Pink Ribbon, l’association de lutte contre le cancer du sein. Nous avons choisi sept challenges: course à pied, marche à pied, vélo, yoga, méditation, lecture et jardinage. Chaque niveau d’activité réalisé déclenche la libération de fonds pour Pink Ribbon, Nestlé assurant évidemment l’ensemble de la donation. Pour rendre la chose encore plus piquante, nous avons constitué des équipes transversales et un classement sera disponible en permanence. Une appli personnalisée et proposée par atlasGo permettra de suivre l’évolution des défis en permanence.”

AtlasGO propose une façon originale d’augmenter l’engagement des équipes tout se ralliant autour d’un objectif noble.”

Julie Hautfenne (Nestlé Belgilux)

Convaincu par le principe, Nestlé Belgilux va d’ailleurs déployer la formule d’atlasGO dans toute l’entreprise. Au profit de l’ASEB, l’association pour la solidarité étudiante en Belgique que le groupe soutient déjà activement depuis des mois via des dons et la livraison quotidienne de sandwiches.

Plus inclusif

Chez Puratos, notre leader mondial des produits destinés à la boulangerie et à la pâtisserie, le dynamisme et la créativité ont aussi été de mise. Moult activités ont ainsi été proposées à l’ensemble des employés via des solutions souvent trouvées en interne. Mais la grande leçon de la pandémie se situe ailleurs.

“Pour un groupe international comme le nôtre, le digital nous a permis d’être plus proches des gens, assure Katia Mouvet, group internal communication manager. Avant, quand Sophie Streydio, notre directrice des ressources humaines, se déplaçait à l’étranger, elle ne voyait que quelques personnes. Aujourd’hui, elle peut s’adresser à plus de gens en même temps. Elle est encore plus proche des équipes qu’elle ne l’était avant. Avec le digital, nous sommes plus inclusifs et aussi plus récurrents. Les team buildings digitaux nous ont permis de toucher plus de monde mais aussi d’y intégrer plusieurs pays ou services, ce que nous faisions rarement. Via les sessions avec le CEO, nous avons aussi généré de l’engagement autrement en sortant du niveau des équipes et en intégrant la notion de ‘moi et mon entreprise’. C’est une richesse conquise grâce à la pandémie.”

A l’avenir, il est certain que les avantages générés par le digital ne vont pas être oubliés lors de l’organisation d’un team building. Pour autant, le présentiel devrait faire un retour en force dès que ce sera possible. “Le travail hybride que nous mettons en place rend ce présentiel, certes fortement réduit, encore plus important, conclut Tonia Gaggini, DRH chez Sodexo Benefits & Rewards Services. Ce contact humain, devenu si précieux, sera tout aussi essentiel dans un team building. Je viens de réunir mon équipe en présentiel. C’était la première fois que nous nous voyions depuis un an. Ce fut particulièrement étrange. Cela souligne le travail qui reste à faire et l’importance de relancer, d’une façon ou d’une autre, le présentiel en entreprise.”

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