Ilham Kadri: “L’urgence climatique est là, on le sait, mais on ne peut pas construire le nouveau sur des ruines” 

Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Dans notre Trends Talk, la CEO de Syensqo, née de la scission de Solvay, évoque la déclaration d’Anvers, cet appel des industriels à une action pour la compétitivité de l’Europe. “On ne discute pas les objectifs climatiques, mais il faut co-construire la façon d’y arriver”, dit-elle. 

Ilham Kadri, CEO de Syensqo, est l’invitée exceptionnelle de notre Trends Talk, qui passe en boucle ce week-end sur Canal Z. Elle revient longuement sur la scission de Solvay en deux entités et sur son impact. Mais elle évoque aussi le contexte particulier de l’industrie européenne, qui appelle à l’aide: elle éprouve des difficultés liées aux coûts et à l’approvisionnement, depuis trois ans, à une époque où les politiques ne cessent d’évoquer la nécessité de réindustrialiser. 

Ilham Kadri se félicite du soutien de plus en plus large reçu par la déclaration d’Anvers, un appel d’industriels lancé au port d’Anvers en présence de la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, et du Premier ministre, Alexander De Croo. Une démarche dont elle fut l’une des initiatrices. “C’était un dialogue constructif, se félicite-t-elle. Mais c’est quelque chose qui m’a surpris. Nous étions 73 patrons et patronnes. Cela fait trente ans que je suis dans l’industrie, ce n’est pas commun, je n’avais jamais vu ça.”  

“Dix demandes très simples”

“Beaucoup sont venus des Etats-Unis, par exemple, pour faire un plaidoyer: nous sommes des amoureux de l’Europe, prolonge Ilham Kadri. Je suis Européenne de coeur, mon passeport est européen, mais même les Américains qui sont venus, c’était pour faire un cri du coeur supportif d’une Europe compétitive, industriellement.” A ce jour, pas moins d’un millier d’entreprises soutiennent ce cri du coeur. 

La CEO de Syensqo reconnaît que la situation est difficile dans l’industrie, depuis deux ou trois ans. “Cela dévisse beaucoup. Bien sûr, la crise énergétique et inflationniste n’a pas aidé. Nous avons posé dix demandes très simples sur un prix de l’énergie abordable, bâtir une infrastructure énergétique, avoir une politique euopéenne énergétique qui n’existe pas aujourd’hui, promouvoir l’innovation parce que l’on en parle beaucoup, mais alors il faut l’aider, accélérer les permis quand elle est là parce que nous sommes souvent bloqués par la bureaucratie, n’ayons pas de langue de bois.” 

“On ne peut pas le faire seuls”

Ce rendez-vous va-t-il marquer un tournant en Europe, alors qu’un sommet européen extraordinaire sera consacré, la semaine prochaine, à un pacte de compétitivité? “Je l’espère de tout coeur. Nous avons pris nos responsabilités en tant qu’acteurs de l’industrie. J’attends avec impatience le rapport de messieurs Draghi et Letta (ancien directeur de la BCE et Premier ministre italien, mandatés pour faire un rapport initial – Ndlr). Nous leur avons partagé notre point de vue. J’espère que cela va aider la nouvelle Commission, après les élections, à faire un bon démarrage et surtout à marier l’industriel et l’écologique.”

“L’urgence climatique est là, on le sait, ajoute encore Ilham Kadri. D’ailleurs ma société Syensqo va atteindre la neutralité carbone en 2040, dix ans plus rapidement que de nombreuses entreprises. Vous voyez: on le fait! C’est un vecteur de croissance, mais on ne peut pas le faire seuls. On ne discute pas le ‘quoi’, le pacte vert et les objectifs climatiques en matière de biodiversité et de social aussi, mais le ‘comment’ doit être co-construit, sinon on va construire le nouveau sur des ruines.” 

Ilham Kadri évoque longuement la situation de Solvay et de Syensqo et parle avec émerveillement de son soutien au futur tour du monde de Bertrand Piccard avec un avion à hydrogène. Un Trends Talk exceptionnel à ne pas manquer, ce week-end sur Canal Z. 

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