Avec le retrait de Peter Goossens, la Belgique gastronomique change d’ère

© Pieter D'Hoop
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Triplement étoilé depuis 2005, le chef du Hof Van Cleve passe la main à son bras droit. Un changement d’époque pour la gastronomie belge de haut niveau.

Voilà un nouveau coup de tonnerre dans le ciel de la gastronomie belge. Peter Goossens, chef du restaurant Hof Van Cleve , à Kruishoutem, a annoncé ce lundi qu’il passerait la main en fin d’année à son second, Floris Van Der Veke.

« Une nouvelle orientation »

En activité depuis trente-sept ans, triplement étoilé depuis 2005, c’est incontestablement la star des fourneaux qui va bientôt se retirer. « Cela fait quelques années que nous envisageons de donner une nouvelle orientation à notre vie professionnelle », a confié Peter Goossens à la presse flamande.

A 59 ans, l’homme tourne la page alors qu’il est au sommet. Il avait déjà, par le passé, confié à quel point l’excellence exigeait des sacrifices. En 2017, il avait reconnu souffrir d’une grave dépression et avait également confié avoir recours à la drogue pour tenir le coup.

Le poids du haut niveau

Omniprésent dans les classements internationaux – il était encore 36e dans le dernier World’s 50 Best -, Peter Goossens incarne une gastronomie flamande qui s’est installée au firmament des cuisines mondiales, marchant sur les traces du Danemark ou de certaines régions d’Espagne. Mais l’exigence du haut niveau secoue ses protagonistes, y compris parmi les plus jeunes.

L’enfant prodigue Kobe Desramault (In de Wulf, Chambre séparée) a lui aussi vécu des hauts et des bas, avant de devenir conservateur culinaire de la Ville d’Ostende, puis de filer en Sicile. Les hyper doués Gert de Mangeleer en Joachim Boudens (Hertog Jan) ont, eux aussi, abandonné leur établissement alors qu’il était au sommet, avant de revenir avec plusieurs formules gastronomies, dont un Hertog Jan réinventé au Botanic ) Anvers.

En Région bruxelloise ; le chef doublement étoilé Christophe Hardiquest a mis de côté Bon-Bon pour se réinventer avec Menssa, dans la même maison, auquel il adjoint des expériences en France et en Suisse. La crise du Covid est passée par là, ainsi qu’une remise en question très intime.

Un modèle économique transformé

Devenus des stars médiatiques, les chefs doivent composer avec un paysage gastronomique bouleversé à plusieurs égards.

Economiquement, la crise du Covid et de l’inflation ont modifié les habitudes, tandis que les coûts fragilisent le modèle économique. Bien souvent, les chefs imaginent des formules réduites, plus sélectives, tout en limitant les moments d’ouverture. Cela leur permet de préserver leur vie privée, mais aussi et surtout de multiplier les activités de consultance, notamment, autrement plus rémunératrices.

Au-delà de cela, le modèle économique des restaurants de prestige est également révolutionné par le défi climatique. La chasse au gaspillage, la quête éperdue des circuits courts, le végétarisme ou la nécessité de travailler des produits moins nobles ou devenus rares imposent de se réinventer.

Enfin, les bibles gastronomiques que sont le Michelin et le Gault&Millau doivent eux aussi trouver de nouvelles formules à l’ère des réseaux sociaux, des blogs et des commentaires en ligne. Plus que jamais, de nouvelles formules voient le jour, mettant moins l’accent sur le luxe ou le service, davantage sur cette ère du temps à la fois plus diversifiée et moins sereine.

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