Les ventes de Tesla divisées par deux : le début d’un boycott ?

Elon Musk © Reuters

Après une année 2024 décevante, Tesla démarre 2025 avec des ventes divisées par deux. Assiste-t-on à un boycott d’envergure ou les raisons de cette chute sont-elles à chercher ailleurs ?

Les immatriculations ont plongé en janvier, notamment en Europe, où les marchés allemand et français ont enregistré des baisses de près de 60 %. Même dans des pays où la demande pour les véhicules électriques reste dynamique, comme la Norvège et la Suède, les ventes de Tesla ont chuté de plus de 40 %. Musk s’est-il tiré une balle dans le pied en s’incrustant visiblement dans la politique américaine et européenne ?

L’impact de l’image d’Elon Musk

L’implication croissante d’Elon Musk dans la politique, et en particulier son soutien affiché à des figures populistes et d’extrême droite, semble bel et bien peser sur la marque.

En Allemagne surtout, le soutien public de Musk au parti d’extrême droite Alternative für Deutschland (AfD) a été très mal perçu. Avec une perte de près de 60 % en janvier, cette prise de position a visiblement poussé de nombreux consommateurs à se détourner de Tesla. Ce rejet s’est même manifesté de manière spectaculaire lorsque des activistes ont projeté une image du patron de Tesla sur la façade de l’usine berlinoise du groupe, accompagnée du slogan provocateur « Heil Tesla ».

La Tesla factory à Berlin. Photo by Instagram (Credit Image: © Ff/ROPI via ZUMA Press)

Ce type de controverse, combiné aux critiques de figures politiques comme le chancelier Olaf Scholz et le leader conservateur Friedrich Merz, alimente une défiance grandissante envers la marque.

Avec un effet perceptible dans les chiffres : le plus grand fabricant de véhicules électriques au monde n’a immatriculé que 1 277 nouvelles voitures en Allemagne en janvier, alors que ce pays abrite la seule usine de fabrication de Tesla en Europe. Cette chute n’est pas non plus due à une baisse des ventes de véhicules électriques en général, puisque le marché allemand du secteur a progressé de plus de 50 % en janvier par rapport à l’année précédente.

Cette baisse spectaculaire ne se limite pas à l’Allemagne. Les ventes de Tesla ont fortement diminué sur plusieurs de ses autres marchés européens clés. En France, elles ont baissé de 63 % en janvier, tandis que les immatriculations en Norvège ont chuté de 38 %. Au Royaume-Uni, elles ont diminué de 8 % par rapport à l’année précédente.

Hors d’Europe, même constat ou presque. En Australie, Tesla a vu ses ventes chuter de 33 % en janvier, et même en Californie, son marché historique, les immatriculations ont reculé de 12 %. On n’est pas loin d’une Bérézina.

Selon David Haigh, PDG de Brand Finance, Tesla commence à souffrir d’un problème de perception qui pèse sur la valeur de sa marque, explique-t-il dans Het Nieuwsblad. La valeur de la marque Tesla (qui va au-delà de sa simple capitalisation boursière) était estimée à 66,2 milliards de dollars début 2023, puis à 58,3 milliards un an plus tard, et elle est désormais descendue à 43 milliards de dollars. Une chute qui doit beaucoup à Musk, mais pas seulement.

Si l’idée d’un boycott d’ampleur est séduisante, ce n’est pas la seule cause de cet effondrement des ventes.

Une concurrence de plus en plus rude

Il y a d’abord un effet de compensation. Pour gonfler ses résultats annuels, Tesla vend généralement un maximum de véhicules en stock en fin d’année, ce qui, par ricochet, ralentit forcément les ventes de janvier.

Ensuite, Tesla doit faire face à une concurrence accrue. L’époque où l’entreprise dominait sans partage le marché des véhicules électriques semble révolue. Les constructeurs européens et chinois rattrapent leur retard, avec des modèles aussi performants, mieux équipés et souvent plus abordables.

En Chine, les fabricants locaux inondent le marché avec des voitures électriques à prix compétitif, tandis qu’en Europe, des modèles plus accessibles, comme la nouvelle Renault 5 électrique, séduisent un public qui attend toujours l’entrée tant promise de Tesla sur le segment des véhicules à moins de 25 000 dollars.

Tony Verhelle, rédacteur en chef de newmobility.news, souligne dans Het Nieuwsblad un autre problème : « Tesla perd aussi du terrain auprès des entreprises et des sociétés de leasing, en raison de sa politique de prix instable qui complique l’évaluation de la valeur résiduelle des véhicules. »

Enfin, l’offre de Tesla commence à vieillir. Si une version restylée du Model Y est attendue pour 2025, la gamme manque de renouvellement, contrairement aux marques concurrentes qui multiplient les lancements.

Une année charnière pour Tesla

Après une année 2024 marquée par une baisse des ventes pour la première fois en plus de dix ans et un effondrement de moitié de son bénéfice net, 2025 doit impérativement être un tournant stratégique pour l’entreprise. Entre image écornée, instabilité tarifaire et montée en puissance de la concurrence, son quasi-monopole et sa croissance phénoménale appartiennent désormais à l’histoire. Le constructeur n’a aujourd’hui d’autre choix que de redéfinir son positionnement pour éviter une érosion plus profonde de ses parts de marché.

L’arrivée du Model Y restylé et l’éventuelle concrétisation du modèle économique à 25 000 dollars pourraient constituer des opportunités, mais cela suffira-t-il ?

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