Le week-end fou de Sam Altman, l’ancien patron d’OpenAI
Microsoft va embaucher Sam Altman, le co-fondateur et ex numéro Un d’OpenAI, la start-up derrière ChatGPT, trois jours après l’annonce du son limogeage surprise. Le dénouement d’un week-end plein de rebondissements. Récit.
Après son licenciement vendredi et un week-end riche en surprises, Sam Altman et Greg Brockman, tous deux cofondateurs d’OpenAI “vont rejoindre avec d’autres collègues Microsoft pour diriger une nouvelle équipe de recherche dans l’AI”, a écrit Satya Nadella, le patron du géant américain, sur X (ex-Twitter).
“La mission continue”, a réagi à cette annonce Sam Altman, 38 ans, sur le réseau social X.
Vendredi, consternation
Le licenciement soudain vendredi de Sam Altman, l’étoile montante de la Silicon Valley, avait plongé le monde de la technologie dans la consternation. Pourquoi licencier un PDG qui a trop bien fait son boulot et fait avancer son entreprise de façon jamais vue ou presque ? OpenAI n’est-elle pas une entreprise technologique avec un succès aussi fulgurant qu’inimaginable et qui vaudrait aujourd’hui quelque 90 milliards de dollars ? Oui, sauf qu’elle n’est pas que ça. Elle est aussi une entreprise qui a révolutionné le monde avec une technologie qui effraye autant qu’elle fascine. La mise en ligne de la première version de ChatGPT, le 30 novembre 2022, a en effet donné le coup d’envoi à la course à l’intelligence artificielle (IA). Considérée comme une révolution comparable à l’avènement d’internet, l’IA générative permet de produire textes, lignes de code, images et sons sur simple requête en langage courant. Elle suscite aussi de fortes inquiétudes au sujet des dangers pour la démocratie (désinformation massive) ou l’emploi (professions remplacées), notamment.
Une histoire particulière
Au-delà de son impact potentiel sur l’humanité, c’est aussi une entreprise à l’histoire et la structure fort inhabituelles. A la base, c’est une organisation à but non lucratif fondée en 2015 par, entre autres, Altman et Elon Musk. Son objectif initial était de développer ce que l’on appelle l’intelligence artificielle générale (IAG) ou la superintelligence, de manière sûre et au bénéfice de l’ensemble de l’humanité. L’IAG est alors défini comme « un système largement autonome dont les performances sont supérieures à celles des humains pour la plupart des tâches ayant une valeur économique ». Mais ces dernières années, Altman a transformé OpenAI en une société à but lucratif. Il l’a fait, selon lui, dans le but d’obtenir des fonds suffisants afin de poursuivre le développement de la technologie. Il est vrai que l’entraînement des modèles d’IA géants derrière ChatGPT coûte des milliards de dollars. Et, de ce point de vue du moins, l’avenir lui a donné raison puisque la nouvelle structure a séduit les investisseurs en masse. Microsoft a ainsi donné pas moins de 13 milliards de dollars à l’entreprise.
Pourquoi a-t-il été mis sur la sellette ?
Ce licenciement a été rendu possible par une gouvernance inhabituelle et vestige de l’ancienne structure sans but lucratif. Ses membres sont trois des cofondateurs soit Sam Altman, Greg Brockman et le scientifique de haut niveau Ilya Sutskever. Ils sont rejoints par trois administrateurs externes qui n’ont pas de parts dans l’entreprise. La mission de ce conseil n’est pas de faire le plus de profit possible, mais de préserver l’objectif initial de l’association. Soit une IAG sûre et qui vaque pour le bien de l’humanité. Or, cette même instance n’avait plus “confiance dans la capacité d’Altman à diriger OpenAI”. Selon le « New York Times » , la rivalité et des divergences stratégiques entre Ilya Sutskever et Sam Altman serait au cœur de l’affaire. Tout comme le débat crucial autour de l’IA, à savoir les dangers de la technologie pour l’humanité. Sam Altman aurait été renvoyé parce que, selon la journaliste technologique Kara Swisher, reprise par de Standaard, « le conseil d’administration était convaincu qu’Altman avançait de manière trop imprudente vers la superintelligence ». La goutte de trop? L’annonce que les utilisateurs pourraient désormais créer et proposer un chatbot IA (ou “GPT”) sur mesure dans un “GPT Store”. Quoi qu’il en soit, à la suite d’ «une procédure d’examen délibératif » par le conseil, Altman a donc été renvoyé vendredi avec effet immédiat.
Samedi, panique
Entre stupeur et consternation, les messages de soutien à Altman ont immédiatement déferlés. Et, dans la foulée, plusieurs responsables de l’entreprise vont annoncer leur démission, en particulier le président du conseil d’administration Greg Brockman et Jakub Pachocki, le créateur de GPT4, qui venait d’être promu directeur de la recherche.
Le choc a été d’autant plus grand qu’il semble que Microsoft, qui détient tout de même 49 % des actions d’OpenAI, n’a pas été informée à l’avance du plan de licenciement. Les employés non plus, tout comme les autres actionnaires. Et alors que tout le monde essayait de comprendre pourquoi il avait été mis sur la touche, les actionnaires, Microsoft en tête, étaient déjà en train d’organiser des manœuvres pour remettre le banni à sa place. Ainsi, dimanche, Sam Altman et Greg Brockman se sont rendus au siège de l’entreprise, à San Francisco, sur invitation de la nouvelle CEO par intérim Mira Murati. Sam Altman a posté dimanche sur X (ex-Twitter) une image avec la légende suivante: “Première et dernière fois que je porte un badge d’invité d’OpenAI.”
Il se dit qu’Altman aurait été intéressé par un retour au sein de sa société, mais à la condition d’un changement de la structure de gouvernance. En gros d’avoir les mains plus libres. Il aurait également un temps envisagé de lancer une nouvelle entreprise d’intelligence artificielle.
Ce lundi, il semble que cela ne soit ni l’un ni l’autre. Sam Altman ne revient pas à la tête de l’entreprise et ne crée pas sa propre entreprise, mais est directement recruté par Microsoft. Une véritable opération RH commando, puisque cela ce sera fait en un temps record, soit même avant l’ouverture des marchés financiers ce lundi matin. Un zèle qui doit sûrement beaucoup au fait que Microsoft a investi massivement dans OpenAI et a intégré cette technologie dans ses propres produits, comme le moteur de recherche Bing.
Intelligence artificielle
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