“Le report du tax shelter bloque le secteur du jeu vidéo en Belgique”

Des joueurs de " Fortnite " lors de la dernière édition de Gameforce, le salon du jeu vidéo de Malines. © PG
Gilles Quoistiaux Journaliste Trends-Tendances

En discussion au Parlement depuis mars 2019, le texte étendant le mécanisme du “tax shelter” au secteur du jeu vidéo est une nouvelle fois reporté. Jean Gréban, coordinateur de Walga, la fédération wallonne du jeu vidéo, désespère.

1. Le “tax shelter” pour le jeu vidéo, c’est quoi?

C’est un copié-collé du mécanisme existant pour le secteur de l’audiovisuel. C’est un incitant fiscal qui a pour but de développer le secteur, d’attirer des investissements et qui rapporte au final aux caisses de l’Etat. Pour l’audiovisuel, on parle d’un ratio de 130%, c’est-à-dire que pour un euro investi, l’Etat récupère 1,30 euro en rentrées, notamment via les cotisations sur les salaires des emplois nouvellement créés.

2. Que peut-il apporter au secteur du jeu vidéo?

C’est un mécanisme avantageux pour les studios qui développent des jeux en Belgique, et notamment en Wallonie. Le tax shelter permettra de soutenir les productions à hauteur de 25% à 30% de leur budget. Cela apportera aussi un effet de levier pour les producteurs étrangers qui souhaitent investir dans un projet porté par un studio belge. Par ailleurs, comme d’autres pays européens (France, Allemagne, Grande-Bretagne, etc.) ont aussi créé leurs propres incitants, cela rendra la Belgique plus compétitive sur le marché du jeu vidéo, qui est un marché mondial. De plus en plus de grands studios créent des filiales locales. Si la Belgique se dote d’un mécanisme attractif, ils pourraient aussi s’établir chez nous, ce qui contribuerait à structurer le secteur et éviterait de voir nos talents quitter le pays. Nous estimons que le tax shelter pourrait créer 300 à 400 emplois en Belgique, ce qui correspond au nombre de diplômés qui sortent chaque année de nos filières en jeux vidéo. Actuellement, ces diplômés partent majoritairement exercer à l’étranger.

3. Pourquoi le dossier est-il à nouveau reporté?

L’Europe considère le jeu vidéo comme un produit marchand, pas comme un bien culturel, et interdit du coup les aides d’Etat au secteur. Mais des solutions existent, comme le test culturel qui permet de qualifier un jeu vidéo de bien culturel et qui est déjà utilisé en Flandre par le fonds d’aide à la création. Un autre problème vient du lobbying exercé par de gros producteurs de l’audiovisuel flamand qui craignent que l’extension du tax shelter au jeu vidéo leur porte préjudice. Or, selon nos estimations, les besoins du secteur du jeu vidéo sont à peine de 6 millions d’euros, contre 250 millions pour l’audiovisuel. C’est loin de représenter une menace pour le secteur audiovisuel. En attendant, le texte est encore une fois reporté aux calendes grecques. C’est frustrant. Ça bloque les studios dans leur développement.

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