La fintech belge Gambit ouvre son robot conseiller au grand public

Geoffroy de Schrevel, CEO de Gambit. © BELGA IMAGE

Spécialisée dans la conception d’outils financiers numériques et innovants, Gambit, l’une des fintechs belges les plus en vue du moment, ouvre au grand public son robot conseiller, Birdee. Pour mieux comprendre la réussite de cette start-up 100% liégeoise, nous avons rencontré son CEO Geoffroy de Schrevel.

Le CEO de Gambit Geoffroy de Schrevel peut avoir le sourire. En cette rentrée 2017, les bonnes nouvelles se bousculent pour la start-up belge spécialisée dans la conception d’outils numériques permettant de gérer ses économies de manière simple et innovante. Après avoir annoncé dernièrement son adossement au groupe bancaire français BNP Paribas, voilà que la fintech se lance dans une nouvelle aventure : elle s’attaque au marché de l’épargne avec son application Birdee.

Déjà sous les feux de la rampe internationale depuis son rachat par la grande banque française, la petite société vient en effet de lancer ces jours-ci un robot-conseiller pour les particuliers en Belgique et au Luxembourg. Baptisé Birdee, il s’agit d’un service de gestion de portefeuille 100 % digital et entièrement automatisé à destination du grand public (à partir de 1.000 euros). Il suffit, pour faire fructifier ses économies à moindres coûts et sans grands efforts, de se connecter à la plateforme (via mobile ou PC), de déterminer son profil de risque, de choisir un portefeuille personnalisé, et c’est parti ! Le suivi du portefeuille se fait ensuite via les algorithmes de Birdee qui le rééquilibrent en permanence en fonction des événements du marché. Cerise sur le gâteau : il est possible de retirer son argent quand et comme on veut. Et cela, pour des frais annuels qui se montent à 1 % à peine des avoirs confiés en gestion.

Une fintech mature

La fintech belge Gambit ouvre son robot conseiller au grand public

Avec le lancement de Birdee, c’est une nouvelle étape de son développement que franchit aujourd’hui Gambit. ” Un virage stratégique important puisque nous proposons désormais nos solutions directement au grand public “, avance Geoffroy de Schrevel, qui vise d’abord 3.000 clients et 25 millions d’euros de fonds sous gestion dans les 12 mois pour la Belgique. D’autres marchés, comme la France, suivront ensuite. Le pari est ambitieux. Mais la start-up, qui compte 50 employés et trois implantations (Liège, Luxembourg et Paris), ne part pas de zéro. Au contraire. Comme nous l’explique Geoffroy de Schrevel, Gambit est une fintech mature : ” Nous venons de fêter notre dixième anniversaire, cela fait maintenant plus de sept ans que nous commercialisons nos solutions en Europe et trois ans que nous sommes profitables, situe le CEO. Par ailleurs, nous avons traversé plusieurs crises financières – 2008 et 2011 – pour les plus importantes et nos clients ont continué à nous faire confiance, en nombre de plus en plus grand. Cela veut dire que notre technologie, tant informatique que financière, est robuste et prouvée. ”

“La” référence européenne

Depuis sa création en 2007, Gambit s’est en effet imposée comme ” la ” référence européenne dans le domaine de la conception à la fois de solutions de conseil 100 % digitales, destinées au client final, et des outils pour les conseillers bancaires et gestionnaires de patrimoine. Ses logiciels sont aujourd’hui utilisés par une belle poignée d’institutions financières en Europe (en Belgique, en France, au Luxembourg et en Suisse). Parmi ses clients particuliers figurent des pure players de l’Internet (Keytrade), mais aussi des banques haut de gamme (Nagelmackers, Neuflize, Pictet) ainsi que des grands réseaux bancaires (Beobank, Axa Banque). Au total, cela fait plus de 50 milliards d’euros qui sont gérés avec des outils Gambit et plus de 2.000 conseillers qui les utilisent en agence. Et cela, sans compter les 25.000 conseillers d’un autre géant du top 10 bancaire européen, avec qui Gambit vient tout juste de signer un contrat pour 10 ans.

Les clés du succès

Si Gambit est aujourd’hui l’une des fintechs belges – et européennes – les plus en vue, c’est pour plusieurs raisons. Selon Geoffroy de Schrevel, la réussite de la start-up est d’abord ” le fruit d’un travail d’équipe fantastique où nous avons systématiquement privilégié la rigueur scientifique et opérationnelle, combinée à un enthousiasme permanent pour l’innovation. Il y a toujours chez nous, en filigrane, la volonté d’avoir un impact sur le monde “, pointe le CEO qui, avant de rejoindre Gambit, a travaillé dans plusieurs pays pour de grandes entreprises financières telles que MasterCard et Swift.

Tout au long de son parcours, la société a aussi pu compter sur de solides parrains. ” Nous avons eu la chance de bénéficier d’un partenariat naturel avec HEC Liège (ULiège). Au-delà de nous avoir couvé pendant plusieurs années avant notre naissance, l’université est toujours restée à nos côtés et a été une source constante de savoir, de recherche fondamentale, et bien évidemment, de cerveaux. Nous avons aussi eu la chance d’avoir des clients motivants ainsi que des actionnaires individuels et institutionnels privés qui nous ont toujours fait confiance et qui ont supporté notre volonté de toujours innover. ” Ajoutons encore une équipe qui a eu le courage, pendant l’année la plus difficile, de réduire son salaire de plus de 10 %. ” Sans tout cela, estime Geoffroy de Schrevel, nous aurions probablement fait comme bon nombre de spin-off universitaires : nous aurions déposé le bilan. ” Enfin, il y a eu l’invitation à participer au hackathon organisé par BNP Paribas dans plusieurs pays. Un concours que Gambit a remporté en Belgique, avant de participer à la finale mondiale, que la start-up a également remportée dans sa catégorie (intelligence artificielle et robots conseillers).

Ce qui a séduit BNP

C’est précisément grâce à cette victoire que les contacts avec BNP se sont amplifiés pour finalement aboutir à une prise de participation majoritaire : ” Vous imaginez bien que le groupe a regardé toutes les solutions disponibles dans le monde, plus d’une cinquantaine au total. La compétition a été féroce ! Nous étions, à l’époque, en processus de levée de fonds et BNP Paribas nous a proposé de créer un partenariat stratégique qui offrait un financement structurel de notre croissance et de notre innovation tout en garantissant notre indépendance stratégique et culturelle. Nous ne voulions pas devenir une division ou un département d’un grand groupe international. Nous avons dit non à plusieurs propositions qui allaient dans ce sens “, confie Geoffroy de Schrevel, ne donnant toutefois aucune précision sur le niveau et le montant de la transaction.

Tout en continuant à développer son portefeuille de clients propres, Gambit ” deviendra donc le partenaire privilégié de solutions de gestion robotisée pour les réseaux de banque de détail et de banque privée de BNP Paribas “, indique-t-on du côté de la banque. Ce qui a séduit le groupe français ? ” C’est de pouvoir disposer d’une seule technologie pour différents types de clients, c’est-à-dire allant du pur digital pour ceux qui veulent gérer leur épargne en toute autonomie, à l’accompagnement en agence pour ceux qui sont demandeurs d’un conseil, explique Geoffroy de Schrevel. Ces deux solutions sont construites sur une même technologie. Nous sommes les seuls en Europe, et sans doute au monde, à faire cela. Par ailleurs, BNP considère que la digitalisation du conseil en investissement est un des éléments clés de sa stratégie de transformation numérique parce que cela réinvente la manière de dialoguer avec les clients. ”

A n’en pas douter, BNP Paribas Fortis devrait donc elle aussi bénéficier du savoir-faire de Gambit. A ce propos, la rumeur voudrait d’ailleurs que sa filiale de banque mobile Hello bank ! travaille déjà activement sur le lancement d’un robot advisor basé sur la technologie de Gambit.

L’erreur de Kodak

Gambit ne risque-t-elle pas, dès lors, de perdre son âme ? ” Le débat sur la cannibalisation n’est pas neuf et il est, par nature, alimenté par des considérations de repli plutôt que par la force de regarder au-delà des murs de son propre business. Ces murs qui empêchent de regarder le monde et ses grandes évolutions technologiques et sociologiques qui finissent toujours par tout emporter. ” Et Geoffroy de Schrevel de rappeler l’exemple bien connu de Kodak : ” La cannibalisation fut un grand débat chez Kodak, l’inventeur de la caméra digitale, au début des années 2000 : se lancer dans la photo numérique allait cannibaliser le business de la photo argentique dont Kodak était le leader mondial. Qui se souvient encore aujourd’hui de Kodak ? C’est exactement la même chose pour les produits financiers et particulièrement bancaires qui ont été de plus en plus standardisés. Qu’y a-t-il de plus semblable que deux comptes d’épargne, deux crédits hypothécaires, deux fonds de placements ? Seul le taux et le rendement peuvent éventuellement changer. Avec le digital, c’est la manière de consommer, l’expérience client, qui devient le produit. ” Et puis, il y a de la place pour tout le monde. Positionné comme un produit aussi simple et disponible que le compte d’épargne mais offrant des perspectives de rendement dignes des meilleurs fonds, Birdee vise un marché où les livrets totalisent plus de 250 milliards d’euros !

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