Jo Cornu: “Une faillite de la SNCB n’est pas exclue”

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Sophie Dutordoir a pris ses fonctions de patronne de la SNCB ce mardi. Son prédécesseur, Jo Cornu, nous avait accordé une longue interview l’été dernier dans laquelle il faisait le point sur son mandat, l’excès d’ingérence du monde politique envers le rail, ainsi que sur les CEO convaincus qu’ils feraient mieux que lui.

Cette interview a été publiée pour la première fois en ligne le 5 septembre 2016.

Le directeur démissionnaire de la SNCB n’a cessé de pester ces derniers mois, voire ces dernières années. Contre le monde politique, d’abord, à qui il reproche un excès d’ingérence. Mais aussi contre les CEO convaincus qu’ils feraient mieux. “Qu’ils se portent candidats, au lieu de s’épuiser en pamphlets.”

Indécision et lenteur politique : Jo Cornu y a été confronté plus qu’il l’aurait souhaité au cours de ces dernières années. Du reste, toutes les plaies ne se sont pas encore refermées. Il y a près de quatre mois, le CEO de la SNCB envoyait sa lettre de démission. De manière assez symptomatique, aucun successeur n’a encore pointé le bout du nez. ” La procédure est encore en cours, soupire-t-il au début de notre entretien, le premier depuis qu’il a quitté ne navire. Je ne sais pas combien de temps elle va encore traîner. ”

JO CORNU. Nous allons voir combien de temps cela va durer. Ma nomination a pris plus d’un an (il rit). La succession aurait naturellement dû être réglée depuis longtemps. On ne peut pas non plus dire que j’ai surpris le gouvernement en démissionnant. J’ai affirmé dès le départ que je n’irai pas au terme de mon mandat.

Le gouvernement vient d’annoncer que le plafond salarial de 290.000 euros bruts serait maintenu. Cette rémunération plutôt modeste selon les normes en vigueur complique-t-elle la donne ?

Il est clair que ce salaire est nettement inférieur à celui que versent des entreprises privées de taille comparable, mais aussi à la rémunération accordée par Proximus et bpost. Il me semble évident qu’il limite le nombre de candidatures.

A l’époque, vous aviez déclaré que vous n’aviez pas dû réfléchir plus d’une nuit à l’offre qui vous avait été faite.

J’avais déjà 69 ans. A un tel âge, d’autres motivations interviennent. Ma première motivation, en acceptant le défi, était de rendre service au pays.

Pour la même raison, ne feriez-vous pas mieux d’aller jusqu’au bout de votre mandat de six ans ?

Dans trois ans, j’aurai 75 ans, un âge trop avancé à mes yeux. Je n’ai jamais envisagé de faire un mandat complet.

Karel De Boeck, ex-CEO de Dexia, a récemment déclaré qu’il ne croyait pas que vous avez démissionné en raison de votre âge. Selon lui, vous partez parce qu’en réalité, la SNCB serait pilotée depuis la rue de la Loi. Pour un patron, une telle situation serait insupportable.

Karel De Boeck a raison lorsqu’il dit que la SNCB se porterait mieux si les décisions opérationnelles étaient prises par le conseil d’administration, et non par le gouvernement. Que l’Etat, en tant que principal bailleur de fonds, ait son mot à dire sur le rail est complètement logique pour moi. Mais il pourrait tout autant avoir son mot à dire en désignant les membres du conseil d’administration, puis en laissant à ces derniers la liberté de prendre des décisions. Malheureusement, le conseil d’administration n’a pas cette liberté. Pensez au salaire du CEO, une responsabilité qui, selon la loi, relève pourtant des prérogatives du conseil d’administration.

L’emprise du monde politique explique-t-elle la lenteur du processus décisionnel à la SNCB ?

C’est évidemment un facteur. Si vous vous demandez pourquoi presque tous les CEOqui tentent leur chance en politique échouent, vous avez la réponse. En politique, le temps a une valeur totalement différente. Pour moi qui avais officié en tant que chief operations officer d’Alcatel pendant 13 ans, le choc culturel fut énorme. Nous devions développer une nouvelle génération de produits tous les deux ans. Dans une telle situation, palabrer pendant six mois est impossible. Alors qu’en politique… Lorsque je suis entré en fonction ici comme CEO il y a près de trois ans, on m’a expliqué que le contrat de gestion entre l’Etat et la SNCB était arrivé à échéance et qu’un nouveau contrat était en gestation. Je constate qu’il n’y a toujours pas de contrat de gestion aujourd’hui. Je reconnais que je ne m’imaginais pas cela il y a trois ans. Et que cela m’a sans doute frustré.

Il ne doit pas être facile de diriger une entreprise sans cadre clair…

La plus grande difficulté a pourtant été le changement dramatique du cadre. Le gouvernement précédent avait un plan financier qui prévoyait une forte augmentation du budget. La SNCB devait voir sa dotation augmenter d’environ 2,5 milliards sur cinq ans. Le nouveau gouvernement voyait les choses autrement. Au lieu de 2,5 milliards de plus, ce serait 600 millions de moins. Inutile de vous dire qu’une telle décision exige un renversement stratégique à 180°. Dans le cas spécifique de la SNCB, il faut encore y ajouter le fait qu’il s’agit fondamentalement de deux entreprises : la SNCB proprement dite et Infrabel, qui vivent de la même dotation. On se retrouve ainsi dans un conflit d’intérêts : allons-nous investir cet argent dans le rail ou dans les trains ?

Le vrai drame, c’est que le rail a complètement manqué le TGV de la technologie.”

Ces 10 dernières années, l’argent a conflué principalement vers Infrabel, dans de nouvelles voies, donc, et pas dans la SNCB et dans des investissements davantage orientés client. Au total, on a dépensé quelque 8 milliards pour ouvrir de nouvelles voies ces 10 dernières années. Au cours de cette même période, pas un train ne s’est ajouté au parc. Dans ce cas, il faut se demander si cet investissement a réellement été utile. D’autant que par rapport aux Pays-Bas par exemple, notre réseau ferroviaire est largement sous-exploité.

Je vais vous donner un exemple extrême, mais hélas bien réel : le fameux contournement de Malines. Ce contournement a été aménagé avant tout parce que le Thalys devait ralentir à Malines. Il a donc été décidé d’investir dans une nouvelle voie. Un investissement de 200 millions d’euros, pour un gain de temps d’environ une minute et demie. Une entreprise ferroviaire qui réfléchit de manière un peu orientée client aurait consacré ces fonds à l’amélioration des quais. La très grande majorité des quais de notre pays sont trop bas, raison pour laquelle il faut littéralement ” monter ” dans le train, au lieu d’y accéder de plain-pied. Les investissements dans une meilleure accessibilité sont pour moi la priorité numéro 1. Les nouvelles voies arrivent tout au plus en quatrième position, après le renouvellement du matériel roulant et – last but not least – une exploitation plus efficace du réseau ferroviaire existant.

Concernant ce dernier, on dit toujours qu’il est saturé. Bien entendu, cela n’a aucun sens. Postez-vous le long d’une autoroute, et calculez la distance entre les voitures. Rendez-vous ensuite le long d’une voie ferroviaire : un train passe tout au plus toutes les 10 minutes. Pourquoi ? Il n’existe qu’une réponse. Sur le plan technologique, les chemins de fer, pas seulement en Belgique, accusent un monstrueux retard. Voyez les autres secteurs de la mobilité. Aujourd’hui, les avions disposent d’une fonction de pilotage automatique. L’industrie automobile expérimente des voitures autonomes. Or l’automatisation devrait être encore plus aisée dans le rail, puisque le mouvement est strictement unidimensionnel. Qui plus est, elle pourrait générer d’énormes gains de capacité. Mais l’automatisation se heurte à de fortes réticences. Pour des raisons de sécurité, entend-on parfois. Malheureusement, dans le monde du rail, on réfléchit comme au 19e siècle.

D’où provient cette résistance à l’innovation technologique ?

Le monde du rail est un univers à part, avec une forte propension à se couper du monde extérieur. Savez-vous que les chemins de fer possèdent leur propre réseau de GSM ? Lors de l’arrivée du GSM au début des années 1990, on pensait que le réseau des opérateurs publics n’aurait pas une capacité suffisante pour le rail. Entre-temps, nous sommes passés de la 2G à la 4G, mais les chemins de fer ont complètement ignoré cette évolution. Pour résoudre le problème crucial de la capacité, on débat aujourd’hui au sein des chemins de fer de l’utilité de développer une 4G maison. Quand je vois cela, je me demande si ces gens ne sont pas devenus fous.

Le véritable drame du rail est là. On a complètement manqué le TGV de la technologie. A un peu plus long terme, ce peut être mortel, car qu’est-ce qui fait évoluer notre société depuis des siècles ? Ce n’est pas la politique, mais la technologie. Pensez à ce qui s’est passé ces 25 dernières années. Ce qui a réellement changé nos vies, c’est l’arrivée de la téléphonie mobile en 1991, puis l’avènement d’Internet quelques années plus tard. L’impact de ces technologies est comparable à celui de l’invention de l’imprimerie par Gutenberg au 16e siècle. Grâce à ces nouvelles technologies, des gens qui avaient à peine connaissance de leur existence réciproque entrent aujourd’hui en communication, et s’échangent des informations nouvelles beaucoup plus rapidement et à beaucoup plus grande échelle. Ceux qui, comme les chemins de fer, n’exploitent pas ces nouvelles technologies et continuent à évoluer à leur propre rythme seront balayés.

J’ai l’impression que le management commence à en prendre conscience. Mais le grand défi consiste à convaincre les gens de terrain que le rail doit rapidement se raccrocher aux progrès technologiques qu’on réalise dans le reste du monde.

Votre collègue CEO Johnny Thijs a transformé l’entreprise publique bpost en une success story. Pourquoi n’y parvient-on pas à la SNCB ?

La réponse est très simple. Qu’a fait monsieur Thijs ? Deux choses. D’abord, il a accru l’efficacité et la productivité des collaborateurs. Deuxièmement, il a augmenté les tarifs de 53 % pour une inflation cumulée de 21 %. Comparez avec les chemins de fer. Au cours de la même période, nos tarifs ont augmenté de 6 %, soit 15 points de moins que l’inflation. Comment Johnny Thijs y est-il parvenu ? Tout aussi simple. Il avait un actionnaire privé qui a pu dire au gouvernement : ” Ce n’est pas comme ça que ça marche, les gars. Nous voulons faire des bénéfices, donc les tarifs doivent augmenter “.

Donner la SNCB à un actionnaire privé et tous les problèmes seront résolus ?

Un actionnaire privé n’est pas nécessaire si l’Etat laisse diriger la SNCB de manière normale et donc – et je l’ai déjà dit – laisse le conseil d’administration prendre les décisions. Dans ce cas, nous aurions par exemple pu augmenter les tarifs au rythme de l’inflation. Jusqu’il y a peu, c’était impossible, parce que le contrat de gestion empêchait toute augmentation tarifaire sans amélioration de la ponctualité. Et il faut le dire : sous mes prédécesseurs, la ponctualité était un grand problème. Dans les livres qu’ils écrivent (Jo Cornu songe à ” Dwarsligger ” de Marc Descheemaecker, Ndlr), ils oublient parfois les faits, mais c’est une réalité : 2013 a été une année catastrophique en termes de ponctualité. Et pas uniquement 2013. Quoi qu’il en soit, la SNCB a manqué 15 % de hausse des tarifs ces dernières années. Cela correspond à 90 millions d’euros. Si nous avions pu faire avec la SNCB ce que monsieur Thijs a fait avec les tarifs de la poste, nos recettes annuelles auraient même augmenté de 270 millions.

Vous estimez qu’une hausse de prix de près de 50 % n’aurait aucune influence sur le nombre de voyageurs ?

Je ne crois pas que les hausses de prix influencent réellement la fréquentation du rail. Nos revenus s’élèvent à 6 centimes d’euro par voyageur au kilomètre, soit les plus faibles d’Europe occidentale. Aux Pays-Bas, il en coûte 11 centimes à l’usager, en Suisse, le grand exemple, 17 centimes. Or, le nombre de voyageurs n’y est pas plus faible que chez nous. J’en suis convaincu : si le gouvernement autorisait notre conseil d’administration à fixer lui-même les tarifs et l’offre, la SNCB deviendrait rapidement une entreprise aussi dynamique que bpost.

Vous n’oubliez pas les syndicats tout-puissants ?

Dans ce domaine, je pense que nous avons accompli d’importants progrès. Dès le début de mon mandat, j’ai dit que l’on travaillait trop peu à la SNCB. Cette productivité insuffisante était la conséquence du passé et d’accords parfois douteux conclus par mes prédécesseurs. Ces derniers mois, nous avons engagé de sérieuses discussions avec les syndicats. Mon intention était d’imposer 10 jours de travail supplémentaires par an (170 au lieu de 160, Ndlr). L’accord que nous avons conclu en prévoit six de plus. Je pense que nous pouvons également faire mieux en matière de lutte contre l’absentéisme, et que nous finirons ainsi par atteindre ces 10 jours supplémentaires. Ce qui me semble un sacré bond en avant.

L’accord a été précédé de nombreuses grèves. Des grèves pour des droits qui étaient, selon vous, ” indéfendables “. Une approche plus diplomatique ne vous aurait-elle pas permis d’éviter des problèmes ?

A la SNCB, certains pensent que l’Etat va de toute manière reprendre les dettes.

Je ne sais pas si la diplomatie est toujours le moyen le plus approprié pour atteindre ses objectifs. Parfois, il faut dire les choses, ne serait-ce que par honnêteté. Il y a des anomalies indéfendables dans le rail. Le fait que les cheminots puissent obtenir des jours de récupération tout en étant malades est tout bonnement indéfendable – et surtout dans le contexte social actuel. La population vieillit. Lorsque j’étais enfant, il y avait 10 personnes qui travaillaient pour chaque retraité. Aujourd’hui, nous évoluons vers une situation où deux actifs devront payer une pension. Dans un tel contexte, il faut déployer les gens disponibles de la manière la plus efficace possible. Cela signifie également qu’il faut motiver au maximum les travailleurs plus âgés pour qu’ils continuent à travailler le plus longtemps possible avec plaisir.

Au sommet de la SNCB aussi, il y a encore des gains d’efficacité à enregistrer. Il y a ainsi la direction Gares, qui se compose d’un directeur, d’un directeur adjoint, d’un manager général, d’un manager…

Le problème est aussi que plus de 95 % de nos travailleurs sont statutaires. Cela signifie que s’ils font leur job de manière plus ou moins correcte, ils ne peuvent pas être remerciés. De plus, il n’est pas facile de rétrograder des collaborateurs. Il y a quelque temps, nous avions un directeur de district, une fonction désormais redondante. Comme que nous ne pouvions pas le nommer sous-chef de gare, nous avons dû attendre qu’il prenne sa retraite pour supprimer la fonction. N’oubliez pas qu’au début de mon mandat, nous sommes passés d’une structure tricéphale à une structure bicéphale. Bien entendu, cela devrait en théorie entraîner une réduction du nombre de cadres dirigeants. Dans une entreprise privée, on procéderait à une restructuration et on enverrait ces gens promener. Ici, c’est impossible.

Il y a deux ans, vous évoquiez la possibilité d’un scénario à la Sabena pour la SNCB. Cette hypothèse est-elle toujours réaliste ?

Pas dans la situation actuelle, mais notre société évolue parfois très rapidement. Si le rail est réellement libéralisé, une faillite de la SNCB est un scénario parfaitement plausible. Vous savez, quand j’avais 48 ans, on m’a demandé de devenir patron de la Sabena. J’ai décidé de refuser de boire à ce calice. Avant de donner ma réponse, je me suis penché sur les livres de comptes. L’idée qu’une entreprise publique comme la Sabena puisse faire faillite était encore inimaginable. Quelque temps plus tard, c’était un fait. Cette mentalité à la Sabena est encore trop présente aujourd’hui au sein de la SNCB. En 2005, l’Etat a repris une dette de plus de 7 milliards d’euros. C’est pour cette raison, notamment, que certains vivent ici avec l’idée que l’Etat va également reprendre la dette la prochaine fois. Une telle mentalité n’est pas saine.

D’un autre côté, et il faut également le souligner, je vois énormément de motivation à améliorer le fonctionnement de l’entreprise. Je prends presque chaque jour le train de Saint-Nicolas à Bruxelles. Fatalement, on apprend à connaître les gens. Je constate qu’ils font souvent preuve d’un grand engagement pour l’entreprise.

Avez-vous le sentiment d’avoir pu changer quelque chose ?

Je pense que oui. Nous sommes parvenus à faire baisser les coûts de l’entreprise. Nous avons privatisé le fret, traditionnellement source de lourdes pertes. Et – le plus important – la ponctualité des trains s’est considérablement améliorée.

Cette amélioration n’est-elle pas la conséquence de l’allongement des temps de parcours ?

Si c’était vrai, les indices de ponctualité se seraient améliorés d’un bond. En réalité, nous constatons une croissante lente et progressive sur la période 2013-2015.

En tant que CEO, vous avez également connu un grave accident. Début juillet, il y a eu trois morts à Saint-Georges-sur-Meuse.

Dans cette entreprise, le sujet dont on parle le plus est la sécurité. On y investit énormément d’argent. Qu’une telle chose puisse se produire malgré tout a été un grand choc pour nous.

En connaît-on les causes ?

L’enquête est en cours, mais plusieurs éléments sont déjà clairement établis. Le signal qui a été ignoré n’était pas équipé du système de sécurité TBL1+. En outre, il y a sans doute eu une erreur humaine.

Sachant ce que vous savez aujourd’hui, signeriez-vous à nouveau un contrat avec la SNCB ?

Oui. C’est intéressant. Je me suis souvent énervé, en premier lieu à cause de la lenteur du processus décisionnel. Mais j’ai également beaucoup appris.

En mai dernier, l’avenir de la SNCB avait été abordé par Johnny Thijs dans le Standaard. Il y appelait le gouvernement, avec l’aide de spécialistes, à lancer cinq chantiers pour ” l’Etat raté ” que serait la Belgique. L’un d’entre eux était : ” la modernisation de la SNCB “…

Ce type d’article au vitriol passe souvent à côté de l’essentiel. Le plus grand problème de cette société, c’est le vieillissement. Pour nous attaquer à ce problème, nous devons exploiter les forces disponibles de la meilleure manière possible et créer une société qui soit la plus efficace possible.

Revenons à votre propre avenir. Avez-vous déjà une idée de ce que vous voulez faire du reste de votre vie ?

Non, je n’ai pas fait de liste (il rit). Peut-être devrais-je d’ailleurs commencer par faire une liste.

Vous pourriez vous aussi écrire un livre sur la SNCB. Vous auriez confié à Marc Descheemaecker que vous aviez déjà de la matière pour au moins 10 tomes…

Ce n’est pas vrai. Je pense que monsieur Descheemaecker ressent plus que moi le besoin qu’on parle de lui dans la presse.

Pour l’instant, vous êtes encore pour quelques semaines l’un des hommes les plus puissants du pays. Craignez-vous l’après ?

Absolument pas. Je pense que mon pouvoir n’a jamais été aussi grand qu’en 1999, lorsque je suis devenu COO d’Alcatel, un groupe d’envergure mondiale. J’ai démissionné pour des raisons privées la même année. Ma femme souffrait d’un cancer du sein. Pendant quatre ans, ma vie a oscillé entre peur et espoir. Finalement, ma femme n’a pas survécu (il hésite). Nous étions mariés depuis 36 ans. Il est difficile de décrire à quel point une telle séparation est lourde. Je ne le souhaite réellement à personne, même si cela vous aide à relativiser les choses. Je n’ai jamais commis l’erreur de m’identifier à ma fonction. CEO, c’est un rôle. Et ce rôle, je l’ai souvent joué, mais je ne l’ai jamais assimilé à mon identité. La grande perte que j’ai connue m’a aidé à ne pas le faire.

Propos recueillis par Jeroen De Preter.

Profil

1944 : Naissance à Kemzeke.

1982-1984 : CEO du fabricant de microprocesseurs Mietec.

1985-1995 : Membre du comité de direction d’Alcatel.

1995-1999 : COO d’Alcatel, et plus tard conseiller du président du conseil d’administration.

2007-2010 : CEO d’Agfa-Gevaert.

2010-2013 : Président d’Electrawinds.

2013 : CEO de la SNCB.

28 avril 2016 : Annonce de son abandon de mandat avant terme.

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