Interparking désormais sur le toit de l’Europe

Interparking s’installe désormais aux premières loges du parking en Europe, au coude-à-coude avec son concurrent français Indigo.
Frederic Brebant Journaliste Trends-Tendances  

Le spécialiste belge du stationnement absorbe son concurrent espagnol Saba et devient un géant européen du secteur, avec plus de 2.000 parkings répartis dans 16 pays. Retour sur une success story.

Quel est le point commun entre un champion du monde de ski nautique et un parking de quatre étages souterrains à Namur ? A priori aucun, sauf si cette infrastructure de stationnement porte le nom d’Interparking, une belle et belge histoire qui trouve bizarrement son origine dans le sport de haut niveau.

Nous sommes au début des années 1950. Les frères bruxellois Guy et Claude De Clercq, respectivement champion et vice-champion du monde de ski nautique, découvrent les premiers parkings modernes lors de compétitions répétées aux États-Unis. À l’époque, le trafic automobile est de plus en plus dense à Bruxelles et les deux frères décident d’importer le concept américain en Belgique en construisant le tout premier parking à étages au cœur de la capitale. Une idée d’autant plus pertinente que l’Exposition universelle de 1958 pointe doucement le bout de son nez…

Construit en 1957, à deux pas de la place de Brouckère, le célèbre Parking 58 est inauguré un an plus tard et marque le coup d’envoi de la saga Interparking. Certes, les débuts sont difficiles, mais Claude De Clercq, patron-fondateur de l’entreprise, parvient à imposer peu à peu son business model, épaulé ensuite par son fils, Yves, qui en devient l’administrateur délégué. Dans les années 1970, le développement s’accélère, tant en Belgique qu’à l’international avec, au final, de jolis chiffres pour les 65 ans d’Interparking, fêtés l’année dernière.

Aujourd’hui, l’entreprise emploie 2.100 personnes et compte plus de 1.000 parkings dans neuf pays de l’Union européenne, soit quelque 433.000 places de stationnement réparties dans 400 villes. Son chiffre d’affaires atteignait 554 millions d’euros en 2023.

Une nouvelle dimension

Et l’histoire n’est pas finie pour cette société belge qui conçoit, construit, gère et entretient des parkings sécurisés. Si la famille De Clercq a récemment vendu ses parts dans la société, Interparking n’en est pas sortie affaiblie pour autant et poursuit même son aventure vers de nouveaux sommets. Il y a quelques jours à peine, le groupe s’est ainsi offert son homologue espagnol Saba pour la coquette somme de 1,3 milliard d’euros. Un montant avancé par la presse ibérique, mais non commenté par les principaux intéressés. Interparking s’installe désormais aux premières loges du parking en Europe, au coude-à-coude avec son concurrent français Indigo.

Dès que les autorités européennes de la concurrence auront donné leur feu vert pour cette intégration, Interparking doublera quasiment de volume avec plus 2.000 parkings répartis dans 16 pays européens, et même en Amérique latine puisque Saba est également active au Chili. Au total, ce ne sont pas moins de 800.000 emplacements et quelque 8.000 bornes de recharge électrique qui seront ainsi proposés aux automobilistes, à la grande joie de Roland Cracco, CEO du groupe depuis 2006. “Il y a toute une série d’enjeux en matière de mobilité, d’intermodalité et d’environnement qui exigent d’avoir une certaine taille pour pouvoir y répondre de façon efficace, commente le patron d’Interparking. Il y a, par exemple, de gros investissements à faire en matière de chargeurs de véhicules électriques et il est vrai que la taille permet d’optimaliser toute une série de coûts en matière de recherche et de développement, que ce soit pour la digitalisation, les nouvelles méthodes de paiement ou les grands enjeux environnementaux. L’objectif de ce rapprochement est donc de se renforcer en tant que gros opérateur pour pouvoir répondre à ces différents enjeux et assurer l’indépendance des parkings dans le futur.”

Miser sur l’intermodalité

Tout le défi se trouve là : maintenir l’activité, et surtout la rentabilité, des parkings urbains, alors que de nouveaux comportements sociétaux sont en train d’émerger. Moins attachés à l’idée de posséder une voiture à tout prix, les nouvelles générations optent davantage pour une mobilité douce (transports en commun, vélo, trottinette, marche, voitures partagées, etc.) et semblent vouloir libérer les villes de la pression automobile avec, parfois, le soutien de certaines forces politiques, à l’instar du controversé plan Good Move à Bruxelles.

Résolument optimiste, le CEO d’Interparking relativise ces observations généralistes et n’y voit pas de menace pour son business model : “On remarque effectivement que les jeunes ne veulent plus absolument une voiture dès l’âge de 18 ans comme à mon époque, mais ce besoin se fait toutefois sentir vers 28-30 ans, lorsqu’ils fondent une cellule familiale et commencent à avoir des enfants, affirme Roland Cracco. Je suis donc confiant, d’autant plus que les moyens financiers des autorités publiques ne sont quand même pas infinis en matière de transport public. Or l’automobile, si elle n’est pas la solution, fait quand même partie des solutions dans la chaîne de l’intermodalité. Elle ne va donc pas disparaître, d’autant plus que nous pouvons offrir des possibilités de recharge pour les voitures électriques au sein de nos parkings, alors qu’il en manque cruellement en ville.”

L’automobile, si elle n’est pas la solution, fait quand même partie des solutions dans la chaîne de l’intermodalité.
Roland Cracco

Roland Cracco

CEO d’Interparking

Et le CEO d’ajouter qu’il existe aussi, en matière de mobilité, des zones réservées aux voitures partagées chez Interparking et que l’entreprise belge a également créé une joint-venture avec les chemins de fer allemands, Bahn Park, pour gérer les parkings des gares outre-Rhin, histoire de favoriser précisément cette intermodalité.

Un nouvel actionnariat

Proposer des solutions de mobilité urbaine de plus en plus durables, voilà l’ambition des propriétaires d’Interparking, dont l’actionnariat a été redessiné depuis l’intégration de Saba au sein du groupe. Avec une participation de 50,1%, l’assureur belge AG demeure l’actionnaire majoritaire par le biais de sa filiale immobilière AG Real Estate, aux côtés du fonds de pension néerlandais APG qui détient 31,9% des parts et du holding d’investissement espagnol Criteria Caixa (ancien propriétaire de Saba) qui monte dans le capital d’Interparking à hauteur de 18%. Le nouveau géant européen du stationnement restera donc toujours basé à Bruxelles, mais Barcelone deviendra le siège régional du groupe pour le sud de l’Europe. Un choix stratégique puisque les marques Saba et Interparking, commercialement très fortes, continueront d’exister sur leurs marchés de prédilection.

“À partir de ces deux très belles entreprises, qui ont une approche long terme de leur business et ont investi dans leur patrimoine, leurs process de gestion et leur personnel, nous allons essayer d’en faire une seule qui soit encore plus efficiente, conclut Roland Cracco. Une entreprise qui pourra proposer à nos clients en amont – qui sont les villes, les hôpitaux, les centres commerciaux, les gares, etc. – et à nos clients en aval – qui sont les automobilistes – un produit et un service de qualité, à un prix correct.”

Histoire de partir peut-être, un jour, à l’assaut commercial des États-Unis, un pays qui inspira jadis le fondateur champion de ski nautique…


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