François Michel (John Cockerill): “Avec SLB, nous devenons un leader mondial de l’hydrogène” 

François Michel, CEO de John Cockerill
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le CEO du groupe John Cockerill dévoile pour Trends-Tendances les coulisses de son partenariat avec SLB et de sa levée de fonds. Les ambitions sont grandes, reconnaît-il: “Nous ne sommes pas là pour faire de la figuration.” Des mouvements capitalistiques similaires pourront avoir lieu dans le domaine de la défense. 

François Michel, CEO de John Cockerill, revient longuement pour Trends-Tendances sur la levée de fonds annoncée par son groupe pour soutenir sa stratégie en matière d’hydrogène. SLB, le SFIPM, Wallonie Entreprendre et deux investisseurs espagnols apportent 230 millions d’euros. Cela permettra de grandir dans ce secteur d’avenir pour l’énergie. Le CEO n’exclut pas non plus des mouvements similaires dans le domaine de la défense, l’autre grand vecteur de développement de l’entreprise. 

C’est un grand jour pour vous? 

C’est évidemment positif. Pour nous, il y a eu plusieurs grands jours dans ce processus. Il y avait plusieurs options entrepreneuriales sur la table: à la fin, nous avons fait le choix de la cohérence à long terme. Pour mener à bien le scale-up de l’hydrogène, nous avions besoin de renforcer davantage notre puissance de feu industrielle et nous avions besoin d’un grand allié dans le domaine énergétique para-pétrolier, tout en se renforçant aux Etats-Unis. SLB nous apporte tout cela! C’est un grand partenariat industriel appelé à se développer: ce n’est que le début de l’histoire. 

Dans la structuration de notre levée de fonds, il y a également un soutien étatique, une demande très forte de la Belgique, qui souhaite garder un ancrage fort dans ces technologies sur son propre sol. La Belgique est appelée à occuper une place très singulière en matière d’hydrogène en Europe. 

Avec le port d’Anvers, notamment? 

Avec le port, mais aussi avec Fluxys, nous, un certain nombre de centres de recherche en Belgique… Il y a un grand intérêt industriel, voulu au plus haut niveau de la politique belge. Dans notre levée de fonds, il y a également des family offices espagnols parce que des grands programmes de production d’hydrogène vert sont prévus en Espagne et dans le sud de l’Europe.  

Ils ont souhaité rester anonyme, pourquoi? 

Pour des raisons de discrétion et parce que derrière ces family offices, il y a des actifs industriels importants. Ils veulent éviter la confusion des rôles. 

Y’avait-il d’autres partenaires potentiels? 

Il y en avait beaucoup d’autres et il n’est pas exclu, d’ailleurs, que certains d’entre eux rentrent dans une levée de fonds ultérieure, dans les prochains mois. Il n’y a aucune obligation en ce sens, mais une série d’investisseurs étaient intéressés, et si cela peut créer de la valeur mutuelle, pourquoi pas? Mais ici, en tout état de cause, on a cherché des partenaires stratégiques et pas des financiers. La partie financière n’est que la conséquence de ce partenariat stratégique. 

Le choix d’ancrer cela en Belgique avec la SFIM et WE est-elle un signal fort? 

Je m’en félicite en tant que chef d’entreprise ancré en Belgique. Le fait qu’il y a un renouveau de la politique industrielle, c’est très positif et nous l’avons souhaité. C’est un choix délibéré de travailler avec les institutionnels belges, nous aurions pu faire autrement. Notre volonté est d’ancrer cette activité en Belgique, c’est un choix de John Cockerill que SLB soutient. Il est évidemment que l’on va passer d’un écosystème belgo-français à un écosystème qui se rapprochera très fort des Américains. 

Concrètement, vous augmentez la capacité de développer des giga-factories aux Etats-Unis, en Inde, aux Emirats arabes unis, au Vietnam, au Maroc…: ce sont les prochaines étapes? 

Très concrètement, il y a deux perspectives. D’une part, nous allons travailler sur le coeur de la technologie de manière beaucoup plus active grâce aux capacités de SLB. Tant dans la production des électrolyseurs que dans la maintenance, nous pourrons développer une offre plus forte. Ensuite, il y a en effet scale-up industriel avec ces différents marchés que l’on peut travailler, au-delà de ce que l’on peut faire par nos propres moyens. Nous formons désormais un leader mondial grâce à nos partenariats avec Technip Energies et SLB. Nous travaillerons de façon très étroite ensemble. 

Un leader mondial, le mot n’est pas neutre, cela montre votre ambition… 

Nous ne sommes pas là pour faire de la figuration. Nous pensons que le développement des électrolyseurs demande énormément de capacités industrielles et qu’il n’y aura qu’un petit nombre d’acteurs susceptibles de le faire. 

Un partenariat avec un grand groupe américain, cela a du sens, tant sur le plan technologique que géopolitique. Cette dernière dimension est très forte. SLB a son siège à Houston, la ville où nous avons installé notre première usine américaine. Houston a un partenariat avec le port d’Anvers. Il y a là tout un écosystème diplomatique et politique très aligné avec ce que la Belgique porte. 

Doit-on s’attendre en matière de défense par rapport à vos projets et au rachat d’Arquus, qui doit être finalisé cet été? 

Ce que l’on voit dans le domaine de l’énergie vaut pour la défense. Cela requiert des technologies importantes et il faut que de gros acteurs travaillent ensemble. Pour y arriver, il faut parfois établir des ponts capitalistiques. Ces points s’appliquent également à la défense, oui. Pendant les années de paix, il faut reconnaître qu’il y avait une certaine inefficacité dans ce secteur. Des acteurs doivent désormais travailler ensemble de façon intégrée. Là aussi, des mouvements capitalistiques peuvent avoir lieu pour créer de la valeur, pour innover davantage… Il y a une seule ligne rouge, tant dans le domaine de l’énergie que dans celui de la défense, c’est que nous ne perdrons jamais le contrôle. Oui, il faut s’attendre à des accords de même nature dans la défense, même si je n’ai rien à vous annoncer aujourd’hui. 

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