En misant sur la vente en magasin plutôt qu’en ligne, le spécialiste belge du gros électroménager IHPO veut se rendre incontournable en Wallonie

Camille Delannois

Le spécialiste belge du gros électroménager à bas prix poursuit son expansion en Wallonie, où l’enseigne ambitionne de se rendre incontournable. Avec 15 points de vente en Wallonie et à Bruxelles et près de 30 millions d’euros de chiffre d’affaires, l’entreprise confirme la pertinence de son modèle unique en Belgique francophone.

On l’appelle le Colruyt de l’électroménager. IHPO, l’entreprise belge spécialisée dans le gros électroménager, se veut leader des prix les plus bas en Belgique. Et les prix ne sont pas la seule similitude avec l’enseigne de la grande distribution, l’intérieur des magasins est également pensé pour offrir aux clients des prix plus bas que dans les enseignes classiques.

“Au premier contact, ça peut être un choc”, concède Marc van Cutsem, CEO de l’entreprise depuis 2016. Les magasins sont comme des hangars, sans chauffage, sans air conditionné, sans présentoirs coûteux, avec la marchandise présentée en vrac. “L’aspect est très low cost, ça ne convient pas à tout le monde”, ajoute-t-il. Les télévisions, par exemple, ne sont pas exposées et restent dans leur boîte d’emballage, sur palette, pour diminuer les coûts.

Le CEO MARC  VAN CUTSEM poursuit l’expansion de HIPO en Wallonie mais ne lorgne pas la Flandre.

Depuis son lancement en 1988, la chaîne défend un modèle où les économies se construisent sur le terrain, “sans sacrifier ni la qualité du conseil ni la réactivité du service”. Le modèle a cependant pas mal évolué ces dernières années : IHPO a su transformer son activité de “second choix”, à savoir des appareils qui présentent des défauts de présentation, en un véritable commerce discount composé de grandes marques. “Le business model a évolué pour plusieurs raisons”, note le responsable. D’une part, avec l’expansion de son réseau de magasins, IHPO était limité dans la possibilité de n’offrir que du second choix. “Il n’y avait pas assez d’appareils de ce type à vendre”, se souvient le CEO.

Fins de séries et déstockage

L’entreprise s’est alors intéressée aux fins de séries et produits de déstockage achetés à des conditions avantageuses pour compenser. D’autre part, les appareils sont aujourd’hui mieux protégés, ce qui limite également les défauts de présentation et donc la possibilité de disposer d’appareils de second choix.

Historiquement, l’assortiment de l’enseigne était donc composé majoritairement de second choix, aujourd’hui près de la moitié est constituée “d’opportunités”, à savoir des stocks rachetés à de grandes marques. “Ça arrive très souvent que de grandes marques américaines ou coréennes n’atteignent pas leur volume, ou achètent en trop grandes quantités et doivent alors vendre un lot, poursuit Marc van Cutsem. Nous sommes là pour l’acheter et le revendre à un prix plus intéressant.”

Pour le responsable de l’entreprise, seul IHPO est capable de jongler avec une telle flexibilité sur le marché. “Nos concurrents ont des programmes annuels, avec des volumes beaucoup plus importants, ce qui les oblige à planifier leurs achats”, pointe-t-il.

Mais, si IHPO offre les prix les plus bas du marché, ce n’est pas seulement grâce à ses “opportunités”. En évoluant dans un environnement à bas prix, l’enseigne travaille avec moins de marges que la concurrence. “Ce qui offre la possibilité de diminuer encore le prix”, précise Marc van Cutsem, qui rappelle que seul IHPO dispose encore de l’entièreté de son stock dans ses magasins, ce qui lui permet d’éviter les commandes ou livraisons trop coûteuses.

Baisse de qualité

Le responsable estime qu’en achetant son électroménager dans son enseigne, le consommateur peut économiser entre 10 et 30% pour un produit équivalent en comparaison aux autres magasins. “La différence est un peu moins grande qu’il y a six mois”, concède le CEO. Poussé par la pression inflationniste et des résultats moins bons, le secteur rogne sur ses marges pour proposer des prix toujours plus bas.

“Aujourd’hui, le marché est entré dans une véritable guerre des prix”, constate le patron qui déplore que celle-ci s’accompagne d’une baisse de qualité des produits. “La qualité de fabrication des appareils premier prix est inquiétante, chacun peut s’en rendre compte en retirant le panneau arrière d’une machine à laver”, poursuit le CEO qui rappelle qu’auparavant une machine à laver pouvait durer 20 ans alors qu’aujourd’hui, une marque premier prix tient au mieux six à sept ans. Pour le responsable, le secteur souffre des mêmes dérives que la mode ou l’alimentaire. “Tout le monde parLire aussi| le du prix au détriment de la qualité. Pour le consommateur, c’est tout sauf une bonne affaire, qu’elle soit économique ou environnementale”, note-t-il.

Pour l’entreprise, “discount” ne signifie pas pour autant une baisse de la qualité des produits. IHPO fait le choix de ne vendre que de grandes marques au lieu de pousser une fabrication de ses propres marques en Chine. “Nous voulons vendre des appareils qui durent 10 ans sans problème et dont la marque est capable de fournir un service après-vente de qualité.”

Des produits premier prix

Pourtant, l’entreprise se dit obligée de vendre également ces produits premier prix pour des raisons de compétitivité. “Cela peut sembler paradoxal, concède le CEO d’IHPO, mais nous allons communiquer et expliquer clairement aux consommateurs le sacrifice qu’ils font en termes de qualité, durabilité et de rentabilité sur le long terme en optant pour ces produits.”

Afin de sensibiliser le consommateur, l’enseigne compte afficher ces produits premier prix complètement démontés. De cette manière, le responsable souhaite mettre en évidence la qualité moyenne des matériaux qui composent l’électroménager. “Pour nous, faire une bonne affaire, c’est d’abord acheter un produit qui vous convient.” Si d’autres enseignes actives dans l’électroménager proposent des services de réparation, ce n’est pas dans les plans d’IHPO. “Nous entretenons de bonnes relations avec des réparateurs, c’est un métier à part”, explique Marc van Cutsem qui assure que la relation avec ces derniers permet de surperformer le marché de l’encastrable. Ils viennent volontiers chez nous lorsqu’il s’agit d’intervenir chez un client.”

Expansion wallonne

Aujourd’hui, l’entreprise compte 15 magasins en Belgique francophone, dont cinq à Bruxelles. “En Région bruxelloise, nous sommes une véritable institution, assure le CEO. C’est un peu moins vrai en Wallonie où nous souffrons d’un manque de notoriété”, concède-t-il. L’enseigne vient d’ouvrir son dernier magasin près de Liège, après Wavre, Anderlues, Braine-l’Alleud ou encore Charleroi.

“Nous disposons déjà d’une bonne couverture wallonne.” Pour le responsable, l’enseigne atteindrait sa capacité maximum avec un total de 20 magasins en Belgique francophone. “Cela permettrait de couvrir les grands bassins de population, un critère essentiel à notre business model.” Quant à la Flandre, elle ne se trouve pas dans le viseur d’IHPO : le marché serait déjà assez encombré dans ce domaine d’activité, sans compter la concurrence directe des Pays-Bas.

L’enseigne atteindrait sa capacité maximum avec un total de 20 magasins en Belgique francophone.

Avec une surface de 800 à 1.000 m², les magasins IHPO sont installés exclusivement en périphérie. “Notre surface dévolue aux gros électroménagers est trois fois plus importante que dans les autres chaînes”, précise-t-il. L’enseigne s’est récemment ouverte à la vente d’autres produits tels que le petit électroménager, qui représente 15% de son assortiment. IHPO vend notamment des télévisions, “mais avec un business model assez différent.” Ces dernières ne sont par exemple pas exposées et restent sur palette, version low cost. “Ça fonctionne très bien on dépasse largement nos objectifs de vente”, se réjouit le responsable d’IHPO.

Quant aux autres produits comme les grille-pains, l’objectif est de couvrir les besoins essentiels du client, l’enseigne ne propose donc que les produits maîtres-achats. “Pas question de retrouver 15 grille-pains différents chez nous”, ajoute Marc van Cutsem.

Des prix différents en magasin

Récemment, l’entreprise vient de lancer son site e-commerce, ce qui a d’ailleurs pesé sur les résultats du premier semestre. “C’était nécessaire puisque aujourd’hui tout le monde est en ligne”, reconnaît Marc van Cutsem. Pour autant, le responsable ne souhaite pas encourager la vente en ligne. Chez IHPO, 75% des clients viennent chercher eux-mêmes leur gros électroménager. Ils paient ainsi un prix nettement inférieur à celui pratiqué en ligne.

“Contrairement aux idées reçues, le commerce en ligne n’est pas toujours le plus avantageux pour le gros électroménager, poursuit le CEO. Derrière les promesses de livraison gratuite, les plateformes intègrent des frais logistiques importants dans leurs prix. Ce qui n’est pas le cas chez nous.”

“L’e-commerce n’est pas toujours le plus avantageux pour le gros électroménager.”

Le responsable prend pour exemple la livraison d’un frigo ou d’une machine à laver au deuxième étage sans ascenseur, qui coûte beaucoup plus cher que de livrer un smartphone. “Sans parler des frais de retour qui sont énormes dans notre secteur”, ajoute-t-il. Un frigo livré qui doit être retourné n’est plus protégé par la frigolite et le plastique. Il n’est donc plus livrable dans des conditions normales. “C’est donc totalement anormal que les prix en ligne soient les mêmes qu’en magasin”, pointe-t-il.

Prix en “emport magasin”

Chez IHPO, les tarifs sont affichés en “emport magasin”, permettant aux clients d’économiser réellement sur leur achat. Mais ce n’est pas tout. A chaque fois que c’est possible, IHPO affiche aussi le prix du marché sur son site internet. Et les clients peuvent eux-mêmes signaler lorsqu’ils ont trouvé moins cher ailleurs, un peu à l’image des prix rouges de Colruyt.

Aujourd’hui, les ventes en ligne représentent à peine 1% du chiffre d’affaires de l’enseigne. “En revanche, depuis la mise en ligne de notre site internet, nous enregistrons une croissance de 10 à 30% selon la famille de produits. Ce qui prouve que nos clients vont sur le site avant de venir en magasin. 

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