Des managers affrontent des loups pour “réveiller l’animal qui sommeille en eux”

© Getty Images/iStockphoto

“Fermez la bouche quand ils vous lèchent le visage. Ils ont de grandes langues.” Et de grandes dents. En Autriche, des cadres dirigeants mettent leur sang-froid à l’épreuve en entrant dans un enclos à loups, de façon à réveiller l’animal qui sommeille en eux.

La demi-douzaine de participants du séminaire “Parle avec les loups” écoutent religieusement Kurt Kotrschal, leur hôte. Mais n’en “mènent pas large”, reconnaissent-ils.

Habitués à diriger des équipes à la baguette, ils ont déboursé 650 euros pour, une journée durant, se frotter à plus puissants qu’eux: cinq loups gris appartenant au Centre d’études scientifiques des loups d’Ernstbrunn, au nord de Vienne.

“Peu importe qui vous êtes, que vous soyez PDG ou concierge, le loup s’en fiche. Une fois dans l’enclos, votre rang, votre statut et votre environnement professionnel n’ont aucune importance”, prévient Ian Mc Garry, un Britannique co-concepteur du séminaire.

Le petit groupe -dont un reporter de l’AFP- pénètre enfin dans l’enceinte grillagée. Nanuk et Una, un couple de loups qui feraient passer des rottweilers pour des caniches, s’approchent pour renifler les intrus.

Les stagiaires sont invités à s’accroupir et à laisser les énormes gueules s’approcher de leurs visages.

Les dents sont aiguisées, le souffle puissant. Mais le risque est quasi inexistant, assure M. Kotrschal: “Nous n’avons jamais eu le moindre incident.”

Comme chacun des 17 loups d’Ernstbrunn, Nanuk et Una ont en effet été élevés par l’homme depuis l’âge de dix jours, avec l’objectif de comparer leur comportement à celui de chiens élevés dans les mêmes conditions.

Comme de bons bergers allemands, ils donnent leur (énorme) patte quand on tend la main.

Attention à l’après-rasage

Mais ils ne sont pas apprivoisés pour autant et conservent des réflexes sauvages, rappelle M. Kotrschal.

“Si quelqu’un s’est mis un après-rasage qui lui plaît, Nanuk pourra le faire basculer pour se rouler sur lui de façon à s’imprégner de l’odeur”, souligne-t-il. “Il ne faut pas le prendre mal. Mais il ne faut pas non plus considérer ça comme un privilège. C’est juste que l’odeur l’intéresse.”

Destinée à renforcer la “présence” des participants, à leur faire découvrir leur “animal intérieur” et à développer leur communication non-verbale, l’expérience est un succès, selon la plupart des stagiaires.

“J’ai eu l’impression de rencontrer une créature très puissante, les yeux dans les yeux, et d’être vue comme une égale. Si le loup m’a reconnue comme telle, alors j’ai compris que si je le souhaitais, je pouvais être très puissante moi aussi”, confie Shirley Smith, une Britannique d’une cinquantaine d’années.

Bernhard, 50 ans, un “responsable de projet international” qui ne souhaite pas donner son nom de famille, est lui aussi ravi.

“Aujourd’hui, j’ai ré-aiguisé mes sens”, assure cet Autrichien. “Quand on dirige un projet, il faut pouvoir anticiper le comportement des gens avant même qu’ils ne parlent.”

Alors, des loups pour que l’homme soit encore davantage un loup pour l’homme ?

Au contraire, estime Bernhard. “Cela montre qu’il ne faut pas rester en retrait, mais pas non plus afficher une attitude dominatrice. Les choses vont mieux si l’on est davantage attentifs les uns envers les autres”, relève-t-il.

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