Comment Ethias passe le cap du coronavirus

Philippe Lallemand, CEO d'Ethias © PG

Comme nous l’explique son CEO Philippe Lallemand, la crise du coronavirus n’impacte pas trop Ethias, ce qui n’empêche toutefois pas le groupe d’assurance d’aller de l’avant. “Une crise est toujours une opportunité”, dit-il.

Philippe Lallemand, CEO d’Ethias, peut avoir le sourire. En effet, la grande agence de notation internationale Fitch vient de confirmer la note A- du groupe d’assurance basé à Liège. Et ce malgré la crise du coronavirus qui frappe de plein fouet les entreprises partout dans le monde. ” C’est évidemment une bonne nouvelle durant cette période extraordinaire sur le plan sociétal et économique, se félicite Philippe Lallemand. Avec cette notation, Ethias retrouve son rating d’octobre 2008, soit celui qu’elle avait juste avant la crise financière. ” Une crise financière qui, comme on le sait, a balayé la planète finance et a vu Ethias être recapitalisée par l’Etat fédéral et les Régions pour éviter la faillite, avant ensuite d’entamer un long chemin pour restaurer sa santé financière.

Pas très impactée

Depuis, Ethias est sorti de la zone rouge. Et la crise sanitaire ne menace pas la renaissance de la compagnie d’assurance fraîchement centenaire. Au contraire : Fitch s’attend à ce que l’entreprise conserve en 2020 un excellent niveau de solvabilité et ce malgré un contexte économique particulièrement difficile. ” Compte tenu de la situation, poursuit Philippe Lallemand, la confirmation de ce rating témoigne en effet de notre solidité et de la cohérence de notre business modèle, apprécié et reconnu par les clients mais également par des agences externes telles que Fitch. Cela conforte la gestion, la stratégie et la qualité affichées par nos équipes en cette période difficile. Il ne faut pas perdre de vue que nous sommes un peu différents des autres assureurs. Cette différence que beaucoup de personnes ont décriée pendant des années est aujourd’hui un peu la force de l’entreprise. A l’époque, le fait d’être un assureur direct était considéré comme atypique. Aujourd’hui, tout le monde essaie d’avoir cette relation directe avec le client, qu’il soit assuré ou consommateur classique. Il y a aussi le fait d’avoir eu très tôt le digital dans le scope. On voit bien qu’une des grandes leçons du Covid-19, c’est que l’essor du digital est devenu une vraie réalité. ”

Fitch s’attend à ce que l’entreprise conserve en 2020 un excellent niveau de solvabilité, et ce malgré un contexte économique particulièrement difficile dû à la crise.

Autre élément qui joue en faveur de l’assureur liégeois : sa proximité avec les acteurs du secteur public qui sont à la fois ses actionnaires et ses clients. Si bien qu’en réalité, ” Ethias n’est pas très impactée par la crise actuelle, explique Philippe Lallemand, puisque nous avons principalement des fonctionnaires et des employés parmi nos clients, et peu d’indépendants. A la différence d’autres qui ont du personnel horeca ou des sociétés actives dans l’événementiel dans leur portefeuille de clients, nous avons pu ‘échapper’ à ce phénomène un peu catastrophique qu’ont été les mois de mars, avril et mai “, souligne le CEO.

Pérenniser le télétravail

Ce modèle business atypique qui fait, selon son patron, la force d’Ethias, la compagnie d’assurance a pu en effet le confronter aux réalités de la crise sanitaire. ” On a eu des moments éprouvants, mais le parcours d’Ethias durant cette période est convaincant. J’en suis persuadé, une crise est toujours une opportunité. C’est d’abord une opportunité pour tester la solidité du lien avec vos actionnaires, au travers du conseil d’administration, avec lequel il y a eu des relations chaque semaine pendant le confinement. Je pense d’ailleurs que l’accord de la Saint-Philippe ( pacte de stabilité entre actionnaires jusqu’en 2023, Ndlr) est bien loin dans leur tête. ”

Sur le plan opérationnel, poursuit Philippe Lallemand, une crise permet aussi de tester la force de vos équipes. ” Dès le moment où l’épidémie a frappé l’Italie, nous avons fait le choix de fermer nos 40 agences afin de garantir la sécurité des clients mais aussi celle des employés d’Ethias. Nous avons tout de suite équipé le personnel d’ordinateurs pour pouvoir travailler de manière sécurisée à distance. Seuls les collaborateurs chargés de dépouiller le courrier ont continué à être présents pour permettre à chacun d’avoir accès à ses dossiers au départ du scanning des courriers entrants. Ce qui fait que depuis le 15 mars, la quasi-totalité des 1.800 employés du groupe est en télétravail. ”

” Entre-temps, ajoute le CEO, nous avons signé un accord avec les partenaires sociaux pour pérenniser cette organisation du travail après la période de confinement. Les différents indicateurs mis en place pour l’instauration du télétravail ont en effet montré une augmentation de la productivité plutôt qu’une diminution . A l’avenir, Ethias fonctionnera de façon pérenne à 50 % en télétravail avec deux équipes scindées en alternance. Trois jours par semaine pour l’une. Deux jours par semaine pour l’autre. Et on intervertit “, explique le CEO.

Gestes commerciaux

Les conséquences socioéconomiques du Covid-19 pour Ethias, c’est bien sûr le report du paiement d’un dividende aux actionnaires (100 millions d’euros), mais aussi diverses initiatives visant à soutenir les clients touchés par une perte de pouvoir d’achat. ” Protéger sa clientèle dans les moments difficiles est essentiel, souligne Philippe Lallemand. Les premiers à en avoir bénéficié ont été les hôpitaux. Nous avons par exemple procédé gratuitement à toute une série d’extensions de garantie pour le personnel soignant. Pour le personnel enseignant, 1.000 PC ont été distribués dans diverses écoles du pays. Quant au secteur du sport, nous avons financé du matériel sanitaire pour favoriser la reprise en toute sécurité. ”

En outre, Ethias a aussi décidé de faire un geste vis-à-vis de ses clients B to C. Exemple ? Les locataires titulaires d’une assurance responsabilité civile en situation de chômage pour cause de coronavirus. Ces derniers bénéficient du paiement de leur loyer pendant un mois à raison d’un maximum de 500 euros. Dans un autre registre, les détenteurs d’une assurance auto victimes de la crise se voient quant à eux attribuer une réduction de prime de deux mois à valoir sur le prochain paiement lors du renouvellement du contrat.

Couvrir les pandémies

Quand à savoir ce que la crise va changer pour le secteur de l’assurance dans son ensemble, Philippe Lallemand est certain d’une chose : ” Le match n’est pas fini. L’histoire du Covid-19 ne va pas s’arrêter à 2020. Le ressac économique ne sera pas comblé avant quelques années. Dans ce contexte, il ne faut pas se faire d’illusions, le secteur de l’assurance va changer. Les Gafa peuvent supplanter une grosse partie de l’activité d’une compagnie d’assurance assez aisément. ”

Ce qui ne va pas changer par contre, c’est le besoin de protection, estime Philippe Lallemand. ” Quand vous avez une crise, on observe généralement un phénomène d’augmentation de ce besoin. Pourquoi ? Parce que vous avez été meurtri, directement ou indirectement, ou impressionné plus généralement. Certains consultants estiment à plus de 10 % l’augmentation du besoin de protection et de couverture en assurance suite à la crise du Covid-19. C’est pour cette raison que j’ai voulu lancer le débat sur la couverture des pandémies ; Elle est quelque chose de sociétal à assurer correctement. On couvre bien les actes de terrorisme et les catastrophes naturelles, pourquoi ne serait-ce pas possible avec les pandémies ? On ne peut pas imaginer un après Covid-19 sans une réponse du secteur de l’assurance, sans quoi nous ne ferions pas bien notre job “, plaide Philippe Lallemand en guise de conclusion.

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