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Poutine, ce despote fort peu éclairé

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Ce lundi 5 décembre était une journée importante pour l’Europe. Nous avons montré une fois de plus notre soutien sans faille aux Ukrainiens. Comment ? Mais via l’embargo sur les achats de pétrole brut russe.

Depuis ce 5 décembre, les importations par voie maritime de pétrole russe sont interdites sur tout le territoire de l’Union européenne. Or, le transport par voie maritime correspond aux deux tiers des achats de pétrole russe avant le conflit avec l’Ukraine. En plus de cet embargo, les européens sont enfin arrivés à se mettre d’accord pour plafonner le prix du pétrole russe à 60 dollars. Pareil plafonnement répond à un double souci : sanctionner Moscou au portefeuille mais sans prendre le risque de se sanctionner soi-même. Et c’est la raison pour laquelle, il y a eu énormément de discussion au sein des pays membres de l’Union européenne. Des pays comme la Pologne voulaient qu’on plafonne le pétrole russe autour des 30 dollars. Motif ? Le coût de production du pétrole russe tourne autour des 20 à 40 dollars le baril, et donc fixer un prix plafond de 60 dollars comme on vient de le faire ce lundi 5 décembre permettra malgré tout à Moscou de gagner encore de l’argent avec ses exportations d’or noir.

Mais bon, il fallait aussi trouver un compromis et déjà ce plafond rend fou Poutine qui menace de ne pas livrer de pétrole aux pays tiers qui se soumettraient à ce plafonnement de 60 dollars le baril. A ce stade, l’autre question qui se pose, triviale sans doute au vu du nombre de morts en Ukraine, est claire : avec cet embargo quasi-total du pétrole russe couplé à un plafonnement du prix, ne risque-t-on pas d’avoir un effet boomerang ? A savoir une hausse du prix de l’essence ou du diesel à la pompe ? La réponse, à priori, est non. La raison ? Les deux étapes des sanctions européennes – embargo des voies maritimes et plafonnement du prix – sont connues depuis l’été dernier, même si le prix du plafonnement restait une inconnue. Mais il n’y a pas eu de mauvaises surprises pour les opérateurs de marché. Des Majors du pétrole comme Total ont pu se préparer. L’Europe a diversifié ses importations, qui proviennent des Etats-Unis, d’Afrique et du Moyen-Orient. Il n’y a donc aucune pénurie à prévoir car les volumes resteront stables.

Ne l’oublions pas, le but de ces sanctions n’est pas de rendre fou les consommateurs européens devant leur station-essence, mais de frapper Poutine au portefeuille pour le faire cesser cette guerre. Et donc, en résumé, les prix à la pompe devraient rester stables ou augmenter mais très légèrement. Poutine est furieux car il en train de se rendre compte qu’il a perdu cette guerre. Qu’il a commis une bêtise monumentale en voulant envahir un pays plus grand que la France avec seulement 200.000 hommes. Poutine luttait contre l’OTAN qui était moribond, et il découvre que son coup de force a soudé l’OTAN comme jamais alors que le président Macron nous disait, il y a à peine 3 ans, que l’OTAN était en état de “mort cérébrale”. Poutine a même réussi à renforcer l’OTAN avec l’arrivée de deux nouveaux pays au sein de l’Alliance (Finlande et Suède) et pire encore, il a réussi à faire remplacer le gaz russe par du GNL américain !

Bref, c’est la cata pour ce despote fort peu éclairé. A l’arrivée, la seule question qui se pose aujourd’hui aux diplomates est claire : comment inventer un accord de paix qui donne le sentiment aux Ukrainiens “qu’ils ont gagné” et aux Russes “qu’ils n’ont pas perdu”. En attendant cette issue heureuse, Poutine me fait penser à une phrase de Napoléon Bonaparte : “n’interrompez jamais un ennemi qui est en train de faire une erreur”.

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