Les cinq dossiers socio-économiques vitaux du gouvernement De Croo

Alexander De Croo.
Alexander De Croo. © Belga
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Cette rentrée 2023 est ultra-sensible pour le fédéral sur les enjeux qui concernent le monde économique: approvisionnement énergétique, faillites, budget, pensions, fiscalité… Du lourd.

Le gouvernement fédéral n’a plus le temps de tergiverser ou de se diviser. En cette rentrée 2023, il joue littéralement sa législature avec cinq dossiers vitaux pour sa crédibilité – et pour l’assise de l’économie belge. Plus que jamais, le Premier ministre, Alexander De Croo (Open VLD), devra mettre de l’huile dans les rouages d’une coalition à sept qui s’est déchirée plus souvent qu’à sn tour depuis sa naissance.

“Je ne suis pas sûr qu’un parti sorte gagnant de cette dynamique de conflictualité, souligne, dans Le Soir ce lundi, Vincent de Coorebyter (ULB). Tous gagneraient à calmer le jeu pour donner une image apaisée avant les élections.” Avec, en ligne de mire, un scrutin de mai 2024 au cours duquel la Vivaldi devra faire ses preuves face aux nationalistes flamands et à la gauche radicale du PTB.

L’essentiel se jouera d’ici mars autour de cinq dossiers majeurs. L’un est en voie de finalisation, les autres ont déjà fait l’objet de frictions récurrentes.

1. Garantir la sécurité d’approvisionnement

Le premier stress test de la coalition, se sont les négociations avec Engie, fournisseur d’énergie nucléaire. Il s’agit d’obtenir – enfin… – des certitudes concernant la prolongation des deux réacteurs les plus récents de Doel 4 et Tihange 3 pour dix années supplémentaires. La récent rapport d’Elia sur les risques réels pour la sécurité d’approvisionnement existant durant l’hiver 2025-26 imposent, en outre, un travail sur la possibilité d’anticiper quelque peu cette prolongation.

L’objectif avancé était de finaliser les discussions le 31 décembre: ce ne fut pas possible. “De nombreuses avancées ont pu être réalisées ces derniers jours, sur un nombre conséquent de points cruciaux, ce qui réjouit les deux parties, soulignait toutefois ce week-end le Premier ministre. Un délai est néanmoins nécessaire pour parvenir à un accord qui satisfait entièrement les deux parties. Le gouvernement fédéral et Engie ont, dès lors, décidé de prolonger les discussions en cours dans les prochains jours. L’objectif reste d’aboutir rapidement à un accord.”

Les points principaux sont, notamment, la constitutions d’un outil commun Engie-Etat pour gérer les centrales, un accord financier sur le coût du démanèlement et des déchets, une visibilité à terme en matière de taxation des surprofits et de rente nucléare… Cela nécessite “un millier de pages” de mémorandum, précisait une source récemment.

Pour le gouvernement, il s’agit aussid’apaiser aussi cette petite musique interne à la coalition selon laquelle la prolongation de cinq réacteurs serait nécessaire… Le débat sur la sécurité d’approvisionnement est une bombe à retardement, singulièrement entre libéraux et écologistes.

2. Garder le budget sur les rails

Une fois l’accord engrangé, tous les regards se tourneront instantanément vers le conclave budgétaire de mars prochain. Après des années de relâchement Covid, le budget dérape et il s’agit de le maintenir sur les rails.

Nous avons un déficit trop important, reconnaissait en fin d’année la nouvelle secrétaire d’Etat au Budget, Alexia Bertrand (Open VLD). Les chiffres sont mauvais. Si on regarde le déficit de l’État belge dans son entièreté, à savoir l’Etat fédéral et les entités fédérées, il est de 5,9% du PIB. Mais nous allons travailler pour résorber ce déficit…”

Politiquement, le budget est sensible en Flandre avec une N-VA vent debout contre l’Open VLD après la démission d’Eva De Bleeker, coupable d’approximation sur le sujet, et alors que la Commission européenne est aux aguets, menançant de suspendre le plan de relance.

3. Eviter un “tsunami” de faillites

Le nombre de faillites en 2022 devrait être annoncé cette semaine. Sans surprise, on constatera une augmentation sensible à partir de septembre. Les perspectives ne sont pas bonnes pour 2023. “Le choc du covid n’est pas encore totalement digéré que se profilent déjà les chocs des prix de l’énergie et de l’indexation salariale”,soulignait Eric Van den Broele, analyste senior chez GraydonCreditsafe, à nos collègues de L’Echo, en début de semaine.

Cela confirme le dossier que Trends Tendances avait publié en fin d’année, estimant à 100 0000 le nombre d’entrepreneurs jetant l’éponge. “La Belgique devrait atteindre un record des cessations d’activité en cette année 2022, soulignions-nous. Et plusieurs indicateurs laissent augurer un emballement en 2023.”

Ce sera incontestablement un point d’attention pour le gouvernement fédéral, qui devra peut-ête envisager de nouvelles aides dans ce contexte budgétaire compliqué.

4. Ajuster la réforme des pensions

Pour veiller à ce que le budget reste crédible, un mot est revenu sur toutes les lèvres, à droite du moins: réformes, réformes, réformes

A commencer par celle des pensions. L’épure présentée par la ministre en charge, Karine Lalieux (PS), avait été recalée car elle n’était pas neutre budgétairement. Si l’idée d’un “bonus pensions” pour encourager le travail en fin de carrière n’était pas vue d’un mauvais oeil, il s’agissait de compenser l’initiative, coûteuse, ce que l’Europe n’a pas manqué de rappeler.

Avant la trève de Noël, une note déposée par le Premier ministre libéral flamand a mis le doigt sur certains tabous socialistes, notamment concernant les régimes spéciaux de la fonction publique. Le PS s’était déclaré outré par la méthode. Il faudra pourtant bien aboutir en ce début d’année.

5. Entamer une réforme fiscale

Las but not least, le monstre du Loch Ness, cette réforme fiscale annoncée par le ministre des Finances, Vincent Van Peteghem (CD&V), devrait également pointer le bout de son nez dans le cadre de cette conclave budgétaire de mars qui réunira tous les dossiers sensibles. Une réforme qui doit être en phase avec un autre objectif majeur de ce gouvernement: entamer la marche vers un taux d’emploi à 80% à l’horizon 2030, vital pour garantir le financement de la sécurité sociale.

“On sait que chaque personne remise à l’emploi a un rendement vraiment important pour l’Etat, insistait la secrétaire d’Etat Alexia Bertrand à Trends Tendances, début décembre. Ce sont des recettes que l’on peut installer sans faire mal à personne, que du contraire: en mettant les gens au travail, on donne un pouvoir d’achat plus important. C’est une des discussions que nous aurons lors de la réforme fiscale, et c’est ce que la Commission européenne préconise, pour supprimer les pièges à l’emploi, l’écart entre les allocations sociales et le salaire net.”

Il n’y a plus qu’à passer à l’action. Le menu est copieux. Alexander De Croo devra faire en sorte qu’il ne soit pas indigeste au lendemain des fêtes.

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