Jeroen Franssen (Agoria): “Un taux d’emploi de 80%, c’est une ambition forte et pertinente”

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Christophe De Caevel
Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

Pour créer 600.000 emplois, il faudra réussir à intégrer les groupes les plus vulnérables sur le marché du travail, déclare l’expert Emploi d’Agoria, la fédération de l’industrie technologique. Entretien en trois questions.

1. Agoria évoque la création de 600.000 emplois en Belgique d’ici 2030. N’est-ce pas un peu utopique?

C’est une ambition forte, certes, mais pertinente. Atteindre un taux d’emploi de 80%, c’est nécessaire pour financer la sécurité sociale, notamment les pensions, et impliquer un maximum de gens dans la prospérité de demain. Un taux d’emploi de 80% implique d’amener 600.000 personnes supplémentaires sur le marché du travail. C’est un fameux défi, c’est deux fois plus que les dernières prévisions de création d’emplois, sur la base d’une croissance annuelle du PIB de 0,5%.

2. Quels leviers pourraient permettre à la Belgique de relever ce défi?

Il faut bien entendu veiller à la position concurrentielle de notre économie, en maîtrisant les coûts salariaux et en ayant une législation favorable à l’entrepreneuriat. Mais ces 600.000 personnes, il faudra les trouver. Aujourd’hui, il n’y a plus que 350.000 demandeurs d’emploi dans notre pays. Si l’on crée plus d’emplois, il faudra activer des dizaines de milliers de personnes parmi tous les inactifs. On peut les classer en deux sous-groupes: d’une part, celles et ceux qui n’ont pas besoin de travailler car leur conjoint gagne suffisamment d’argent ; et d’autre part, tous ces gens dont la vie ne serait pas plus confortable s’ils travaillaient. Je songe aux malades de longue durée, aux personnes handicapées, aux familles monoparentales… En travaillant, ils devraient payer des frais de garde d’enfants, des frais de déplacement, etc. Pour amener ces groupes vulnérables vers l’emploi, il faut augmenter le bénéfice financier du travail et lever les obstacles entre eux et le monde du travail.

3. Dans le secteur technologique, on peine déjà à recruter toute une série de profils. Comment amener plusieurs centaines de milliers de personnes à un niveau suffisant de qualification?

C’est vrai dans tous les secteurs et cela renforce la nécessité d’organiser un apprentissage tout au long de la vie, d’inciter les entreprises à faire de leurs collaborateurs des personnes hautement qualifiées. Si tout le monde grimpe un peu sur l’échelle professionnelle, cela libère de l’espace en bas de cette échelle et y fera entrer les groupes moins qualifiés. A l’inverse, si le marché du travail reste stable, il sera beaucoup plus difficile d’y intégrer ces personnes plus vulnérables. C’est pourquoi nous plaidons pour une vraie dynamique ascendante, avec des formations mais aussi de l’assistance, de l’accompagnement.

Dans nos économies, améliorer la productivité ne signifie pas travailler plus dur. La technologie nous permet d’augmenter à la fois l’efficacité et le confort du travail. La productivité viendra de cette combinaison de l’efficacité et du confort. La technologie est là pour faciliter le travail, pour le rendre plus confortable, pas pour supprimer l’intervention humaine.

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