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It’s the economy, Marine!

En fait, les “marinomics” peuvent se résumer en un slogan: “touche pas à mon gâteau”!

Le deuxième tour de l’élection présidentielle française sera passionnant. On ne parle pas du débat d’idées, qui se réduit à la hausse des prix. Mais passionnant pour nous, quant au modèle économique qui surgira et qui nous impactera nous, en Belgique. Car notre pays est à la fois le cinquième client de l’économie française mais aussi son cinquième fournisseur. Le duel est bien équilibré, avec certains sondages montrant Macron à 51% et Le Pen à 49%. Quand on sait que les marges d’erreur peuvent aller jusqu’à 4%, rien n’est donc joué.

Le modèle de Macron, on le connaît et il ne changera pas: les “macronomics” constituent un subtil cocktail, avec un quart de politique de l’offre, un quart de politique de relance par l’investissement (dans la défense, le nucléaire, l’ordinateur quantique, etc.), un quart de plus grande efficacité de la dépense publique et un dernier quart de rationalisation de l’Etat providence et des dépenses sociales. Ce dernier quart est le plus amer: c’est l’augmentation de l’âge de la retraite. Mais pour adoucir, vous saupoudrez tout cela d’un zeste en faveur de l’emploi des jeunes.

Marine Le Pen, nous dit-on, a changé. C’est vrai, elle ne parle plus de quitter l’euro ou l’Union européenne, même si elle s’assied sur les quatre libertés qui fondent l’Union, sur la circulation des personnes, des services, des biens, des capitaux, et même si la hauteur de ses dépenses publiques précipiterait la faillite de la France et l’écartèlement de la zone euro. En fait, les “marinomics” peuvent se résumer en un slogan: “touche pas à mon gâteau”! Son tract, “femme d’Etat”, témoigne d’une vision pâtissière de l’économie. On a un gâteau, et il faut donc réduire le nombre des convives pour en avoir une plus grande part. “Pour rendre du pouvoir d’achat aux Français”, elle propose par exemple d'”appliquer la priorité nationale pour l’accès à l’emploi”.

Eh bien non, l’économie, ce n’est pas de la tarte. David Card, prix Nobel d’économie l’an dernier, et d’autres en ont fait la démonstration sur le terrain. Si une population immigrée s’installe en nombre, comme les 65.000 Cubains qui ont fui le régime castriste en 1980, ou comme les 900.000 Syriens et Erythréens accueillis en Allemagne entre 2013 et 2019, cela ne crée presque pas de problème d’emplois ou de salaires à court terme et cela dope l’économie à moyen et long terme. L’Allemagne, par exemple, gagnera 1,70% de croissance à partir de 2026 grâce à l’immigration qui a permis d’enrichir son marché du travail. Et qui viendra financer ses retraites. Car l’économie est sans cesse alimentée par les connaissances et les capitaux. Chaque jour, des gens de plus en plus nombreux consomment, travaillent, innovent, entreprennent. Des produits qui n’existaient pas hier valent des milliards aujourd’hui. Le premier iPhone n’a pas 16 ans.

Ceux qui le comprennent et désirent eux aussi participer à la croissance s’en portent bien. En 2010, le PIB par tête des Polonais et des Russes était similaire et représentait 55% environ du PIB d’un Allemand. Aujourd’hui, la Pologne est à 70%, alors que la Russie, qui pense l’économie comme un gâteau, ne bouge pas, à 55%, malgré ses matières premières. It’s the economy, Marine.

Une victoire de Marine Le Pen serait politiquement dramatique car elle ferait exploser la société française, imploser l’Otan et rangerait la France dans le camp de Poutine. Mais elle constituerait aussi un énorme appauvrissement de l’Hexagone et de ses principaux partenaires commerciaux. Le 24 avril, il faudra aussi songer à cela.

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