Olivier Mouton

Georges-Louis Bouchez, la stratégie du seul contre tous

Olivier Mouton Chef news

Que le président du MR exaspère ses homogues du PS et d’Ecolo, c’est naturel. Qu’il se fâche avec les libéraux flamands ou qu’il multiplie les déçus en interne, c’est plus fâcheux.

Georges-Louis Bouchez, président du MR, bouscule avec ses sorties médiatiques permanentes, ses critiques féroces contre l’immobilisme de ses collègues et ses prises de position parfois borderline. Dans l’entre-soi politique belge ayant ses règles, ce jeune loup aux dents longues tire sur tout ce qui bouge, ne respectant rien ni personne, pas même le Premier ministre, Alexander De Croo, pourtant issu de la même famille que lui. C’est une stratégie délibérée: il s’agit de tenir un “parler vrai” inhabituel et de porter une ligne libérale forte dans un paysage dominé par le centre-gauche.

Sur le fond, le président du MR a raison de vouloir donner un coup de pied dans les fourmilières wallonne et belge qui ont tendance à ronronner dangereusement. Les défis socioéconomiques sont majeurs, la situation budgétaire des entités francophones (Wallonie, Bruxelles et Fédération Wallonie-Bruxelles) inquiète au plus haut point et l’avenir de la Belgique risque, à ce rythme, de se poser au lendemain des élections de 2024. Le besoin de réformes est criant, la nécessité de préparer notre avenir énergétique évident et le soutien à la création d’activités, vital. De même que la nécessité de maintenir les canaux en Flandre, où le président du MR devient une star… sans parler le néerlandais.

Dans un entretien sans filtre accordé à Trends-Tendances, ce feu follet dénonce un mal culturel profond en Wallonie et à Bruxelles, où les discours syndicalistes et associatifs dominent trop fortement. Les thématiques chères aux entreprises doivent s’imposer en tête de l’agenda, plaide le Montois. A raison. Cette nouvelle saillie fait suite à la nomination par le MR du multi-entrepreneur Pierre Rion, une figure respectée, à la tête du nouvel invest wallon, cet outil qui fusionne la SRIW, la Sogepa et la Sowalfin. Un joli coup, indéniablement.

A force de la jouer seul contre tous, Bouchez risque toutefois de subir un retour de bâton, a fortiori s’il ne veille pas à soigner ses alliés et s’il ne reste pas 100% cohérent avec sa ligne. L’épisode rocambolesque de la nomination par l’Open Vld de la nouvelle secrétaire fédérale au Budget, Alexia Bertrand, issue du MR, est un sérieux avertissement. Les libéraux flamands sont venus recruter cette cheffe de file libérale à Bruxelles, talentueuse et multilingue, pour remplacer la démissionnaire Eva De Bleeker, sans même prévenir son président. C’est un camouflet en réponse à de trop nombreuses déclarations ressenties comme des trahisons.

Ce n’est pas tout. Si Alexia Bertrand a dit “oui” aux sirènes libérales flamandes, c’est par ambition mais aussi par dépit: alors qu’elle était pressentie pour succéder à Sophie Wilmès au ministère des Affaires étrangères lorsque celle-ci a quitté le poste pour des raisons familiales, le président du MR lui a préféré Hadja Lahbib, une vedette de la télé dont le profil se situe manifestement plus à gauche. La décision en a irrité plus d’un au MR. Ce fut peut-être, avec le recul, sa deuxième erreur, après celle du premier casting wallon raté à ses débuts.

Que le libéral exaspère les présidents du PS et d’Ecolo, c’est naturel. Qu’il se fâche avec ses homologues libéraux flamands ou qu’il multiplie les déçus en interne, c’est plus fâcheux. Dans la foulée de ce moment de tensions avec l’Open Vld, l’annonce d’une “initiative” commune entre le MR et les libéraux flamands “afin de permettre la coordination de l’action sur les dossiers socioéconomiques et budgétaires importants à venir” était une manière de montrer que le message a été entendu. Connaissant le personnage, une question se pose déjà: jusqu’à quand?

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