Le Tour de l’oie

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C’est le monologue d’un vieil homme s’adressant au fils qu’il n’a pas eu. Inhérent à la solitude des vieux jours, le soliloque devient petit à petit dialogue. ” Je parle tout seul ? J’invente ta compagnie ? Je l’invente si fort que la réalité ne peut l’égaler. Ta présence suffit ici et ce soir pour créer ma paternité. ” Dans son dernier ouvrage, Erri de Luca joue les Geppetto, s’inspirant du désir de père raconté par Collodi, pour léguer à ce Pinocchio imaginaire et à nous lecteurs par la même occasion ici une sorte de non-testament (” Nous ne faisons qu’accélérer notre passage à l’archéologie “). Voulant à tout prix éviter de faire le bilan de sa vie mais la retraçant furtivement, l’auteur italien concentre dans ce court échange tout ce qui a constitué ses écrits : sa relation délicate avec sa mère et sa carrière d’ouvrier, ses combats de gauche et sa lecture humaniste de la Bible, son amour infini pour Naples et pour sa langue. En se confiant à sa descendance fictive, dans un dialogue parfois animé mais à l’écoute de l’autre, il revient sur le bonheur d’une vie où le hasard et l’écriture ont dominé, comme le dé décide du destin de l’oie dans le célèbre jeu. Entre fable et regard sur l’époque, sa poésie nous laisse parfois sur notre faim de concret, mais on se laisse envoûter par les mots et les sensations.

Erri De Luca, ” Le Tour de l’oie, éditions Gallimard, 176 pages, 16 euros.

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