Ce que votre assureur va vous offrir dans un monde digital
Voiture autonome, objets intelligents, patient connecté… Autant d’évolutions qui vont conduire à une meilleure prévention des risques, à moins de sinistres et donc à une baisse des primes encaissées par les assureurs. Bref, la chasse aux nouveaux services et aux nouvelles sources de revenus est lancée !
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S’il y a bien un secteur qui fait preuve de stabilité, c’est celui de l’assurance. Pendant des années, le métier n’a quasiment pas changé, se réfugiant derrière le mécanisme de solidarité et de mutualisation des risques entre assurés. De sorte qu’il se caractérisait jusqu’il y a peu par beaucoup de paperasse, d’administration et une gestion trop longue des sinistres.
Nombre d’assureurs travaillent en effet avec des intermédiaires, souvent des courtiers, ce qui les met peu en contact avec le client final. Ceux qui ne subissent aucun dommage ne reçoivent en fait de leur assureur qu’une seule lettre, une fois par an, leur demandant de payer leur prime. C’est dire si le secteur est à la traîne, accusant plusieurs années de retard par rapport à l’industrie bancaire notamment.
Bref, les cinq CEO des grandes compagnies d’assurance du pays que nous avons rencontrés dans le cadre de ce dossier consacré à l’avenir du secteur de l’assurance en Belgique (AG, Axa, Ethias, Belfius et KBC) sont d’accord sur un point : sous l’effet de la vague numérique, il aura complètement changé d’ici 2025. S’appuyant sur les conclusions d’une étude réalisée par le consultant Deloitte (intitulée Insurance of the Future), et en exclusivité pour Trends-Tendances, ils détaillent leur vision et leur stratégie à long terme.
1. L’expérience-client sera 100 % “phygitale”
Clairement, ” la relation entre la compagnie d’assurance et le client final devient complètement numérique, expose Olivier de Groote, partenaire et leader du secteur des services financiers chez Deloitte Belgium, responsable également de la région EMEA. Nous pensons qu’il n’y a pas d’alternative. Le papier a vécu. ”
De fait, ” si vous voulez rester pertinent en tant qu’assureur, vous devez suivre l’évolution du comportement de la clientèle, estime Jef Van In, CEO d’Axa Belgium. Nous sommes en train de redéfinir nos processus afin que tous les points de contact avec le client final soient entièrement numérisés d’ici 2020. Toute l’expérience client pourra alors être gérée avec un smartphone. ”
Si les cinq CEO interrogés disent tous vouloir franchir le pas vers de nouvelles activités, ils ne veulent toutefois pas perdre de vue leur coeur de métier.
Signe de cette évolution, ” KBC propose déjà une assurance habitation 100 % digitale, souligne Hans Verstraete, senior general manager des activités d’assurance du groupe KBC. Le client doit seulement répondre à quelques questions et peut signer la police de manière numérique s’il le souhaite. C’est déjà disponible pour l’assurance auto et notre objectif est d’étendre cela, à terme, à toutes les polices d’assurance dommage importantes. ” Cela étant, ” nous suivons le rythme du client, nuance Hans Verstraete. S’il préfère venir en agence, c’est possible. Le comportement des clients change, mais ce n’est pas le cas pour tous les produits avec la même rapidité. C’est pourquoi nous combinons canaux numériques, agences et médias sociaux. Je suis d’ailleurs convaincu que pour certains produits d’assurance plus complexes, les clients vont continuer à préférer un entretien personnel avec leur conseiller, même si cela peut aussi se faire via une session de chat vidéo. ”
Patron de Belfius Insurance (filiale d’assurance du groupe Belfius), Dirk Vanderschrick pense également que le rôle du conseiller va garder toute son importance malgré la digitalisation : ” Nous croyons fermement en un parcours numérique fluide pour le client, mais ce dernier appréciera toujours pouvoir discuter de son portefeuille d’assurances avec un conseiller. Nous constatons d’ailleurs aujourd’hui que les clients commencent souvent la recherche d’une assurance via l’appli mobile, mais aiment bien avoir une discussion avec l’un de nos agents lorsqu’il s’agit de franchir la dernière étape. ” Le smartphone a donc beau devenir l’outil de communication par excellence, y compris en matière de produits financiers, le besoin d’être conseillé ne disparaîtra jamais complètement, selon Dirk Vanderschrick. ” Suis-je correctement protégé ? Combien dois-je épargner pour ma pension ? Tout le monde veut être bien assuré. Mais le problème avec l’assurance, c’est que personne ne veut sacrifier son temps libre pour tout faire soi-même “, observe le CEO de Belfius Insurance.
Le contact direct avec le client est en effet particulièrement important, souligne Philippe Lallemand, CEO d’Ethias. Y compris dans un monde numérique. ” Le digital est un canal de plus, dit-il. Chez Ethias, nous offrons maintenant une dizaine de produits sous format digital, mais cela ne suffit pas. Une relation à long terme avec un client requiert une confiance mutuelle. Rien de tel pour cela, qu’une relation directe avec le client. ” Par ailleurs, ajoute Philippe Lallemand, ” le client veut une solution à ses problèmes. En cas de dommage, il ne s’attend pas à ce que son assureur le dédommage plusieurs mois plus tard, mais à ce qu’il lui envoie un électricien ou un plombier le jour même. Je ne vois pas cela se passer aussi rapidement dans un format numérique, il s’agit toujours d’un processus où l’interaction entre personnes est essentielle. ”
2. Le métier de base a encore de beaux jours devant lui
Si les cinq CEO interrogés disent tous vouloir franchir le pas vers de nouvelles activités, ils ne veulent toutefois pas perdre de vue leur coeur de métier ( core insurance). ” Beaucoup peut être fait pour améliorer notre coeur de métier, juge Philippe Lallemand. De nombreux risques ne sont pas couverts et les besoins des clients ne sont pas satisfaits. Pensez aux cyber-risques et à la couverture des attaques terroristes. Nous devons d’abord travailler là-dessus. ” Sortir de son métier de base, oui. Mais sans aller trop loin, donc. ” Le risque est que vous consacriez beaucoup de temps et d’argent à ces nouvelles activités tout en négligeant votre activité principale, ajoute le patron d’Ethias. Gérer une entreprise est déjà assez difficile. Je ne vois pas Ethias vendre des billets de cinéma, par exemple. Il doit y avoir une logique économique si vous vous diversifiez. Le véritable défi consiste d’abord à offrir une réponse beaucoup plus rapide aux processus existants.”
Un avis que partage Dirk Vanderschrick, pour qui il reste également ” encore beaucoup de travail à faire si nous voulons rendre tous les processus existants plus rapides, plus faciles et plus efficaces “. Même son de cloche chez Axa : ” Tout d’abord, tous les processus doivent garantir un parcours client 100 % sans stress, nous n’y sommes pas encore, souligne Jef Van In. C’est alors seulement que vous pourrez penser à offrir de nouveaux services. ” Le CEO d’Axa Belgium estime d’ailleurs que le secteur de l’assurance classique offre encore des opportunités de croissance suffisantes. ” De nouveaux risques apparaissent, ce qui conduira au développement de nouveaux portefeuilles. Pour le moment, la croissance de ces nouveaux produits est encore limitée, mais cela va s’accélérer dans les années à venir. L’assurance pour les cyber-risques et l’économie partagée sont des créneaux avec un potentiel de croissance “, illustre Jef Van In, se référant aux contrats que le groupe Axa a conclus avec Uber et BlaBlaCar.
3. Etre plus qu’un simple assureur
Beyond insurance (littéralement, au-delà de l’assurance) : c’est le nouveau concept à la mode chez les consultants. ” Si les assureurs veulent approfondir leur relation client et générer de nouveaux revenus, ils doivent faire plus que simplement vendre des produits d’assurance, avance Olivier de Groote. En développant de nouveaux services, ils peuvent mieux répondre aux souhaits du client. ”
” Au départ de nos forces, nous voulons aller au-delà de la simple assurance “, confirme Hans De Cuyper chez AG Insurance, qui dispose de trois filiales offrant des services de réparation : Homeras qui répare les maisons après les dégâts d’incendie, Respo Repair qui répare les fenêtres après un cambriolage et DrySolutions qui se spécialise dans la détection des fuites. ” Ces trois sociétés forment un prolongement à la gestion des sinistres, poursuit Hans De Cuyper. De cette manière, nous proposons à nos clients une alternative à la compensation financière. L’objectif est qu’elles deviennent des centres de profit distincts, qui élargissent notre chiffre d’affaires. C’est pourquoi elles offrent également leurs services sur le marché, indépendamment des dommages assurés par AG. ”
En matière d’assurance habitation, KBC propose également aux clients le choix entre une compensation financière ou une réparation à ses frais. ” Nous voulons décharger le client, explique Hans Verstraete, CEO. Cela implique de devoir penser plus largement que notre coeur de métier. Nous voulons offrir au client une solution à son problème. A cet effet, KBC collabore avec des partenaires extérieurs. ” Notre intention n’est pas de devenir nous-mêmes réparateurs, ajoute Hans Verstraete. Nous préférons ici travailler avec des parties externes spécialisées. ” AG Insurance dispose par contre de ses propres filiales, ” parce que nous voulons garantir au client que les nouvelles activités soient du niveau de la qualité et du service de AG “, complète Hans De Cuyper.
Pour sa part, Belfius a lancé l’an dernier un service de réparation baptisé Jaimy. Via cette plateforme, la banque met en contact particuliers et réparateurs (plombiers, peintres, etc.). Clients et non-clients peuvent y recourir. Selon Dirk Vanderschrick, Belfius souhaite développer de nouveaux services dans cinq domaines : la maison, la mobilité, la santé, le sport et l’art. Chaque activité étant logée dans une société distincte de Belfius, afin d’en faire une entité rentable. ” Pour le moment, nous sommes dans la phase d’investissement. Mais, en vitesse de croisière, nous pensons que chacune de ces initiatives, si elle réussit, pourrait contribuer à hauteur de plusieurs millions d’euros au bénéfice du groupe “, confie le patron de Belfius Insurance.
Hans Verstraete de KBC se montre toutefois plus sceptique à ce propos. ” Nous pensons que ce genre de nouvelles activités peut générer des revenus supplémentaires. Mais il reste encore à voir s’il existe un véritable modèle de revenus. En fin de compte, c’est le client qui décidera. Il apprécie certains services et d’autres moins. C’est difficile à prévoir. ”
De son côté, Axa Belgium a lancé plusieurs services destinés aux particuliers victimes de dommages. Via Fixico, ils peuvent par exemple demander un devis pour la réparation de la carrosserie de leur voiture. ” Pour le moment, nous restons proches de notre coeur de métier, mais je n’exclus pas à terme que ces activités soient, en collaboration avec les courtiers, développées en centres de profit “, indique le CEO Jef Van In.
4. L’avenir est aux écosystèmes
Selon Olivier de Groote, les projets ambitieux de Belfius relèvent du concept de l’ exponential insurance (littéralement, l’assurance exponentielle). Le consultant de Deloitte utilise ce terme pour les assureurs qui, à long terme, réaliseront plus de 20 % de leur chiffre d’affaires en dehors de leurs activités d’assurance de base. Selon lui, cela ne sera possible que s’ils se connectent à un écosystème avec leurs produits et leurs nouveaux services ( lire l’encadré ” Trois exemples d’écosystèmes “).
Ainsi, ” notre intention est de créer des écosystèmes dans les cinq zones dans lesquelles nous développons de nouvelles activités, affirme Dirk Vanderschrick, de Belfius. Nous voulons jouer un rôle de premier plan dans ce processus. L’idée est que ces écosystèmes soient lancés avec des partenaires mais sous nos propres marques. ”
AG Insurance a récemment lancé son propre écosystème, Phil at Home, pour aider les personnes âgées à pouvoir continuer à vivre plus longtemps chez elles et à reporter l’étape du passage vers une maison de repos. Pour ce faire, AG s’appuie sur sa société Homeras et collabore avec des partenaires externes tels que Securitas et de nouveaux fournisseurs, pour par exemple y ajouter à terme la livraison de repas à domicile. Un soutien individuel personnalisé est également fourni. ” Phil at Home n’est pas seulement une partie du rôle sociétal que nous assumons en tant qu’assureur, situe Hans De Cuyper. Nous y voyons également un nouveau business potentiel. Pour le moment, nous testons le projet dans plusieurs communes. Nous le développons dans une perspective à long terme. C’est une nouvelle forme de development pour AG Insurance. Nous construisons un service et l’ajustons en cours de route. Pour un assureur qui a l’habitude de mettre un produit fini sur le marché après quelques mois de préparation, c’est nouveau. ”
De son côté, KBC s’intéresse également aux nouveaux écosystèmes mais cherche plutôt à s’associer à des partenaires établis. ” Il serait naturel en tant que grand bancassureur de vouloir prendre la tête d’un écosystème et de tout faire sous votre enseigne, indique Hans Verstraete. Mais en même temps, c’est très prétentieux. Ce qui est plus important, c’est le choix des partenaires avec lesquels vous vous associez et leur crédibilité auprès des consommateurs. En matière de mobilité, nous travaillons avec le VAB et Olympus. Sur notre appli mobile, les clients peuvent acheter des billets de bus De Lijn et des tickets de trains SNCB. De cette manière, l’écosystème offre de la valeur ajoutée au client. ”
Philippe Lallemand pense qu’Ethias peut pour sa part s’appuyer sur un écosystème historique. ” Nous sommes très proches des communes et du secteur public, explique-t-il. Nous travaillons avec eux sur des projets d’économie d’énergie et de détection des pertes d’eau. Nous le faisons maintenant gratuitement, mais je n’exclus pas que ces services deviennent un jour payants. Je vois également les services de réparation et de surveillance comme nouvelles sources de revenus. ”
5. Les données deviennent de plus en plus importantes
Le modèle d’entreprise des assureurs repose depuis toujours sur l’utilisation de données, ce qui leur permet d’évaluer les risques et de fixer leur politique de prix (prime). Or, ” la numérisation ouvre la porte à beaucoup plus de données, y compris de tiers. C’est une opportunité unique pour mieux servir le client, mais il est impératif de respecter à 100 % la confidentialité des données clients, et leur volonté en la matière “, pointe Olivier de Groote.
” Aujourd’hui, beaucoup de gens partagent leurs données personnelles sur les réseaux sociaux “, observe Philippe Lallemand. Cela étant, ” je ne pense pas que cela va continuer. A mon avis, à l’avenir,les gens vont s’opposer à l’exploitation commerciale de leurs données personnelles. Les valeurs sociales sont très importantes chez Ethias. Nous avons une charte éthique qui fixe des limites à l’exploitation des données. ”
” Quelles données le consommateur veut-il partager avec qui ? C’est la question cruciale, juge en effet Hans Verstraete (KBC). En matière de données, nous voulons collaborer avec les employeurs et les secrétariats sociaux. Mais les données médicales sont un sujet sensible pour les clients. Raison pour laquelle nous traitons cela avec beaucoup de soin et avec l’accord du client. ”
Du côté de Belfius, ” nous avons déjà examiné si nous pouvions utiliser les indicateurs de risque de la banque dans le secteur des assurances, ce qui constitue un gros avantage pour un bancassureur, signale Dirk Vanderschrick. Ce n’est bien sûr pas parce que vous êtes un épargnant diligent que vous êtes également un bon conducteur. Mais la base s’avère être juste. Cela ouvre des possibilités. ”
Ancien responsable des activités de banque de détail chez Belfius, Dirk Vanderschrick sait de quoi il parle. ” En matière d’exploitation des données, nous sommes en retard de plusieurs années par rapport à la banque. De nombreuses données ne sont tout simplement pas utilisées ou analysées. Belfius a développé des programmes qui nous permettent maintenant d’offrir nos produits d’assurance aux bonnes personnes. Mais un prix différent en fonction du profil du client, nous ne sommes pas encore prêts pour cela. ”
” Depuis la fin de l’année dernière, AG dispose d’une base de données clients totalement intégrée, indique pour sa part Hans De Cuyper. Nous pouvons maintenant utiliser des algorithmes et l’intelligence artificielle. Nous le faisons déjà pour la gestion des demandes d’indemnisation. L’objectif doit toujours être d’améliorer l’expérience client. ”
6. La différence se fera par le conseil
Conséquence de tout ce qui précède, une dernière question se pose : dans quelle mesure le courtier – spécialité belge – va-t-il être capable de se transformer ?
Chez Axa Belgium, le client peut souscrire une assurance incendie et auto de manière entièrement numérique. Mais l’assureur est également un apporteur d’affaires pour les courtiers. ” Nous croyons en la valeur ajoutée offerte par le courtier, soutient le CEO Jef Van In. Grâce à la plateforme Portima, la communication avec eux est très fluide. Axa continuera à investir dans le canal des courtiers afin de les aider à basculer dans le monde numérique. ”
Chez AG Insurance, Hans De Cuyper croit également au modèle des intermédiaires : ” Surtout pour les assurances qui demandent du conseil, et cela représente encore la grande majorité de notre portefeuille, je vois les courtiers gagner du terrain. ” Mais la bancassurance a aussi, selon lui, le vent dans en poupe (AG collabore étroitement avec BNP Paribas Fortis). ” Les produits d’assurance qui sont présents dans l’application de la banque sont mises en avant. Les possibilités de vente croisée sont réelles. ” D’ailleurs, ” nous ne sommes qu’au début des possibilités offertes par le modèle de la bancassurance “, soutient Dirk Vanderschrick. Par contre Belfius ne cache pas qu’il ne croit pas au modèle de courtage. ” Travailler avec ses propres canaux est, à notre avis, le meilleur moyen de développer un parcours client uniforme et de qualité. ” Et pour Philippe Lallemand, ” l’intermédiaire qui n’apporte pas de valeur ajoutée est amené à disparaître. ” L’avantage d’un assureur direct tel qu’Ethias est que nous avons en main la relation avec le client final et ses données. ” Enfin, chez KBC, ” nous pensons pouvoir faire la différence avec notre approche de bancassurance intégrée, conclut Hans Verstraete. Les produits bancaires et d’assurance sont disponibles sur la même application. Les clients peuvent faire appel à l’expertise des agents, mais aussi appeler le contact center de KBC. Tout le monde est sur la même longueur d’onde. Ce modèle me semble plus tourné vers l’avenir que d’autres, mais il va de soi que c’est le client qui choisit. ”
Sortir de son métier de base pour fidéliser le client. Comme les banques avant elles, c’est ce que vont de plus en plus faire les assureurs en proposant des produits et services allant au-delà de leur offre traditionnelle. But : faciliter la vie du client. Et cela, via ce que les spécialistes appellent des écosystèmes développés en partenariats avec d’autres acteurs économiques.
La question est de savoir quel rôle joueront les assureurs dans ces nouveaux écosystèmes. Partner financial services industry leader chez Deloitte Belgium et Europe, Olivier de Groote souligne que l’assurance est un produit secondaire. On achète une assurance-voyage parce qu’on part en vacances, et pas l’inverse. Pour cette raison, il pense que les assureurs rejoindront plutôt des écosystèmes existants, et n’en développeront pas nécessairement autour de leur propre marque. “Chaque écosystème a besoin d’un acteur qui en prend le lead et le coordonne “, estime le consultant.
Selon lui, pas mal d’éco-systèmes peuvent se déve- lopper, à commencer par ceux que l’on voit émerger aujourd’hui autour de certains besoins de tous les jours (la mobilité, la maison, la santé). Files interminables, transports en commun souvent en retard: Monsieur et Madame Tout-le-Monde sont en effet aujourd’hui demandeurs de solutions autour de la mobilité. Les mentalités et les habitudes évoluent, les modes de trans- port alternatifs à la voiture particulière, fondés sur le principe d’une utilisation partagée séduisent de plus en plus d’utilisateurs. Dans ce contexte, une entreprise comme D’Ieteren, qui vient de racheter Zipcar à Bruxelles, ne reste pas les bras croisés. Après les voitures partagées Poppy, l’application inter-modale Pikaway et l’appli de gestion de flottes partagées MyMove, le Lab Box, son incubateur de start-up, s’attaque au marché du leasing automobile grâce à Lizy, qui cible les PME et les indépendants. ” Ces initiatives visent à positionner D’Ieteren comme un agrégateur de mobilité visant à développer ce que nous appelons une mobilité fluide, durable et accessible, indique Denis Gorteman, CEO de D’Ieteren Auto, le tout à un prix attractif. Dans cette vision de la multi-modalité qui vise à accom- pagner au mieux la mobilité de notre clientèle, le lien avec l’assurance est évident.
En effet, il ne faut plus assurer un véhicule bien précis mais le trajet entre un point A et un point B, et cela quelle que soit la combinaison de moyens de transports utilisés (voiture, train, vélo, trottinette etc.). La présence d’un assureur qui croit à la multi-modalité est indispensable pour pouvoir offrir l’expérience la plus fluide possible. ” Le secteur de la construction (smart building, etc.) est également un domaine dans lequel les assureurs peuvent jouer un rôle afin de le rendre plus efficient. ” Besix est un intégrateur de solutions qui va bien au-delà de la simple construction d’un bâtiment. Dans ce contexte, les assureurs sont certainement des partenaires potentiels. Au même titre que Proximus et Elia avec qui nous avons signé des partenariats “, explique Rik Vandenberghe, CEO de Besix. Quant à Xaviez Brenez, patron des Mutualités Libres, il pense que les assureurs ne seront certainement pas les seuls acteurs dans un écosystème lié aux soins de santé et souhaite y voir les mutuelles jouer un rôle important. L’institution développe un projet pilote dans lequel les patients portent un wearable (object connecté, Ndlr) qui traite des informations médicales après une intervention. “En tant que caisse d’assurance maladie, nous connaissons les clients et leurs besoins, souligne Xaviez Brenez. Mais le gouvernement nous impose de nombreuses restrictions et règles, alors que nous restons dépendants de ceux qui font les prescriptions. Raison pour laquelle le développement des écosystèmes dans les soins de santé évolue très lentement. “
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