Véhicules de société: les travailleurs sont-ils responsables pour les dégâts?

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Nombreux sont les travailleurs qui sont exposés à une retenue sur leur salaire en cas de dégâts causés à leur véhicule de société, et ce pour des dégâts mineurs souvent considérés comme inéluctables pour un usage normal du véhicule. Est-ce légal?

Si les dégâts occasionnés au véhicule de société résultent de son usure normale (petites griffes, petits coups dans le parechoc, etc.), l’employeur ne peut en réclamer réparation au travailleur. C’est ce que dit la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, indiquant que le “travailleur n’est tenu ni des détériorations ou de l’usure dues à l’usage normal de la chose”.

La question délicate est de définir ce que l’on entend par “usure normale“. Pour circonscrire le débat, il pourrait être intéressant de définir cette notion au sein de la car policy de l’entreprise. Dans le même ordre, il serait opportun que l’employeur s’entende au préalable avec la société de leasing sur la notion d’usure normale.

Travail ou usage privé?

S’il s’agit de tout autre dégât, il faut se poser la question de savoir si ce dégât a été occasionné pendant l’exécution du contrat de travail ou lorsque le travailleur était autorisé à faire un usage privé du véhicule. Si c’est pendant l’exécution du contrat de travail, la loi précitée exonère le travailleur de toute responsabilité sauf en cas de dol, faute lourde ou faute légère répétée.

A l’inverse, si un dégât est occasionné en dehors de l’exécution du contrat, par exemple pendant un congé, une période de maladie ou à des fins privées, le travailleur devra répondre du dommage. En pareil cas, l’employeur pourra donc réclamer au travailleur le montant dû au titre de dommage, qui se traduira le plus souvent par la franchise devant être payée à l’assureur.

Retenue sur salaire

Toutefois, si le travailleur peut être considéré comme responsable du dommage, cela ne signifie pour autant pas que le montant pourra être retenu sur sa rémunération. En effet, ce n’est que dans des cas particulièrement limités qu’une retenue sur salaire peut être opérée, et uniquement à concurrence de certaines quotités (loi du 12 avril 1965). Par ailleurs, le dommage pour dégâts causés au véhicule de société pendant un usage privé ne fait pas partie des cas autorisés de retenue sur rémunération. Si, par contre, les dégâts ont été causés pendant le travail et qu’ils résultent d’une faute lourde ou d’une faute légère habituelle, une retenue pourrait être opérée… pour autant qu’employeur et travailleur aient convenu du montant du dommage, par le biais d’une convention écrite.

En tout état de cause, il est recommandé aux employeurs de disposer d’une car policy reprenant des directives claires et précises quant au comportement des conducteurs d’un véhicule de société, leurs obligations et leur responsabilité en cas d’abus. Notons que ces directives ne peuvent en aucun cas contrevenir à la loi du 3 juillet 1978.

Quant à la question de savoir comment distinguer un dégât occasionné pendant le travail de celui survenu pendant l’usage privé, nous conseillons à l’employeur d’indiquer dans sa car policy que le travailleur est tenu de déclarer immédiatement tout dommage au véhicule. De la sorte, la temporalité de celui-ci pourra être déterminée au mieux. Les mêmes principes s’appliquent dans le cas d’un véhicule utilisé par plusieurs travailleurs.

Un article de Kevin Della Selva, avocate chez Younity et d’Aurore Guérit, avocate chez Younity

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