Philippe de Moerloose, président de SDA Holding: destination les Amériques

© Frédéric Sierakowski (Isopix)

Après avoir débuté en Afrique, puis prospéré au Benelux et au Royaume-Uni, Philippe de Moerloose se lance à l’assaut des Etats-Unis, pour poursuivre une aventure entamée en 1991.

Le 16 septembre dernier, le groupe SDA fêtait son trentième anniversaire à l’Hôtel de Mérode, à Bruxelles, lors d’une soirée réunissant plus de 250 invités. L’occasion, pour son fondateur, de rappeler le parcours qui a permis à la petite société Demimpex (pour “de Moerloose import-export”), lancée avec un capital de départ de 75.000 francs belges (1.859 euros), de se muer en un groupe qui va franchir cette année le cap du milliard d’euros de chiffre d’affaires. L’occasion aussi de revenir sur les grands jalons qui ont marqué l’histoire du groupe, dont le siège social est basé à Wavre.

Tout débute donc avec le trading de pièces automobiles pour l’Afrique, une région que Philippe de Moerloose connaît particulièrement bien pour y avoir passé son enfance et son adolescence. En 2000, l’homme s’investit à la fois dans la distribution automobile et dans celle de machines. “Ce sont deux marchés différents, explique-t-il. Le second demande davantage de services et d’assistance. Quand une machine est à l’arrêt suite à un pépin technique, le client souffre directement d’un manque à gagner.”

La Société de Distribution Africaine, qui donne aujourd’hui son nom au groupe, est créée en 2008. SDA Holding rassemble alors les entreprises actives sur le continent africain dans la distribution de véhicules et engins neufs. Durant la décennie 2010, Philippe de Moerloose prend plusieurs décisions stratégiques. D’abord, il cède progressivement ses activités de distribution automobile pour se concentrer sur les grosses machines. Ensuite, il débarque en Europe en rachetant Kuiken Groep, le réseau de distribution de Volvo Construction Equipment dans le Benelux, à ABN Amro Participaties. Nous sommes alors en 2015. Deux ans plus tard, c’est en Grande-Bretagne qu’il s’implante, en acquérant le réseau de distribution local du constructeur suédois. “C’est aujourd’hui notre plus grand marché, confie-t-il. Pour vous donner une idée: il représente 25.000 nouvelles machines par an, alors que les 26 pays africains en représentent ensemble 10.000.”

Le management doit équilibrer la croissance de l’entreprise et sa solvabilité, tout en veillant à alléger son empreinte écologique.” Philippe De Moerloose

Reprise en 2021

L’année 2020 a été difficile pour SDA Holding, qui a vu son chiffre d’affaires reculer de 921 à 734 millions d’euros alors qu’il aurait dû approcher du milliard d’euros. “Nous allons franchir la barre cette année, reprend Philippe de Moerloose. Le contexte économique a été compliqué l’an passé avec la crise sanitaire, dont l’impact a été important outre-Manche. Sans oublier le Brexit. En revanche, l’Afrique a bien résisté, même si nous devons être attentifs à l’évolution de l’Algérie, un marché clé pour nous. Cette année, nous avons observé dès les premiers mois les signes d’une reprise, avec de fortes commandes. Actuellement, nous sommes, comme tant d’autres, confrontés à la pénurie de semi-conducteurs, qui ralentit la production. Mais comme nous avions continué de commander des machines durant la crise sanitaire, nous avons pu constituer un stock qui s’est avéré très précieux ces derniers mois.”

Philippe de Moerloose, président de SDA Holding: destination les Amériques
© Frédéric Sierakowski (Isopix)

La reprise est particulièrement marquée en Grande-Bretagne, où de grands chantiers, comme le H2S ( High Speed 2), une ligne à grande vitesse qui devrait prochainement relier Londres aux Midlands, figurent au programme. “Ces grands projets ont pour objectif de booster l’économie, enchaîne notre interlocuteur. On sent vraiment une relance à la fois post-Brexit et post-Covid.” Pour assurer cette reprise, SDA peut compter sur ses 2.000 collaborateurs, qui ont traversé la crise avec le soutien du groupe. “Cela a été notre priorité: préserver l’emploi, déclare Philippe de Moerloose. Nous savions bien que la pandémie ne serait pas éternelle et qu’au bout du tunnel, il y aurait la reprise économique. Et qu’à ce moment-là, nous aurions besoin de toutes nos équipes. Chaque membre du personnel est considéré comme un membre de la famille.”

Une famille qui va prendre prochainement un accent plus américain. SDA est en effet en passe de finaliser l’acquisition d’une société de distribution américaine, grâce à laquelle il aura un pied sur ce marché qui représente quelque 130.000 nouvelles machines par an. L’avenir s’annonce d’autant plus radieux aux Etats-Unis que le plan de 1.200 milliards de dollars lancé par le président Joe Biden pour moderniser les infrastructures, a été approuvé au mois d’août par le Sénat. “Ce développement s’inscrit dans notre logique de diversification géographique, précise le président de SDA Holding. Celle-ci fait résolument sens, après ce que nous avons vécu avec la crise sanitaire. En outre, c’est exact, le timing, avec la décision du gouvernement américain d’investir massivement dans de grands projets publics, est idéal.”

SDA Holding, dont les activités s’articulent autour de deux filiales opérationnelles, SMT Holding et DEM Group, s’est historiquement construite autour de deux axes de développement, comme le détaille Philippe de Moerloose: “Le premier, c’est le core business du groupe, qui est focalisé sur les gros engins. La concurrence est déjà tellement forte dans ce créneau qu’il convient de ne pas se disperser, d’autant que nous avons des défis à relever, comme la transition écologique et la transition digitale. Le second, c’est l’internationalisation. Nous sommes d’ores et déjà actifs dans une trentaine de pays. Avec les Etats-Unis, nous allons non seulement poursuivre notre progression, mais aussi accroître la diversité culturelle du groupe, qui compte déjà une quarantaine de nationalités”.

Démarche durable

Cette multiculturalité participe pleinement aux divers engagements pris au travers d’une charte ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance). Poussé notamment par la nouvelle génération, dont ses enfants, Philippe de Moerloose est très attentif aux enjeux environnementaux, notamment: “Parmi nos dernières réalisations, on peut mentionner que nous n’utilisons plus que des emballages de récupération pour nos pièces de rechange. Par ailleurs, nous disposons en Angleterre d’un centre où nous reconditionnons les pièces qui peuvent l’être. Enfin, nous avons lancé, à Bruxelles, une académie où seront formés les opérateurs”. Autant de challenges qui s’inscrivent dans la durée. Ce qui ne devrait pas faire peur à ce manager, marathonien et triathlète accompli.

1 milliard

C’est, en euros, le chiffre d’affaires record que devrait réaliser le groupe en 2021.

Profil

· Né en 1967

· Licencié en sciences commerciales et consulaires de l’Ichec

· 1991: lancement de Demimpex, société de trading de pièces de rechange automobiles pour l’Afrique

· 2008: création de SDA Holding, qui regroupe l’ensemble des entreprises présentes dans une trentaine de pays africains

· 2015: acquisition de la distribution de Volvo Construction Equipment au Benelux, suivie de la Grande-Bretagne en 2017

Le management au 21e siècle selon Philippe De Moerloose

“On ne peut plus gérer aujourd’hui une entreprise d’une manière forte et directive comme on le faisait par le passé, souligne Philippe de Moerloose. Ce type de management ne fonctionne plus. Il faut responsabiliser les collaborateurs et les faire participer pleinement à l’évolution de la société. Et ce, à tous les échelons. C’est ce que nous faisons avec la société que nous sommes en passe d’acquérir aux Etats-Unis. Nous allons conserver l’équipe actuelle et l’impliquer totalement dans le plan stratégique. Une personne ne peut plus décider seule ; il faut fédérer les équipes, pour qu’elles s’engagent dans les projets. C’est également ainsi que nous pourrons attirer de nouvelles ressources et de jeunes talents.” Un autre point qu’il évoque est le développement durable, que l’on ne peut plus négliger: “Les jeunes y sont très sensibles. C’est pourquoi le management doit être très attentif à ces aspects et équilibrer la croissance de l’entreprise et sa solvabilité tout en veillant à alléger son empreinte écologique. C’est dans ce cadre que nous avons rédigé la charte ESG.”

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