Médias sociaux et réputation de l’entreprise: quels droits et quelles limites?

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Le mois passé, la Première ministre finlandaise avait été critiquée à cause de sa participation à une fête entre amis. Elle a défendu, à raison, son droit à une vie privée. S’inspirant de cet incident, on peut se demander si une entreprise a le droit de sanctionner un travailleur suite à un comportement peu approprié en dehors des heures de travail.

Le travailleur dispose de droits fondamentaux, dont ceux à la liberté d’expression et à la vie privée. Mais ces droits sont-ils absolus? Le droit à la liberté d’expression permet-il au travailleur de tout dire et tout écrire?

Si le droit à la liberté d’expression est consacré tant par la Constitution belge que par la Convention européenne des droits de l’homme, il connaît cependant des limites. L’article 10 de la Convention prévoit que l’exercice de la liberté d’expression comporte des devoirs et des responsabilités et peut être soumise, sous conditions, à certaines restrictions et sanctions, par exemple pour la protection de la réputation ou les droits d’autrui. Dans notre pays, la loi sur le contrat de travail précise qu’employeur et travailleur se doivent “le respect et les égards mutuels”. Un travailleur n’est donc pas libre de déclarer tout et n’importe quoi même en dehors de ses heures de travail.

Et la vie privée?

Le droit à la vie privée est également consacré par des dispositions législatives européennes ainsi que par la Constitution belge. Cependant, le droit à la vie privée est tempéré quand le travailleur décide lui-même de rendre celle-ci publique par le biais des médias sociaux.

Par conséquent, un travailleur qui publie des propos calomnieux sur les réseaux sociaux consultables pour tout un chacun pourra plus difficilement se prévaloir de son droit à la vie privée qu’un travailleur qui se retrouve sur les médias sociaux à son insu, par exemple par la publication d’une vidéo.

L’employeur peut-il prévoir des sanctions?

Tout en respectant les droits fondamentaux du travailleur, un employeur peut mettre en place des outils dans son entreprise afin de modérer, voire sanctionner, le comportement de certains travailleurs, par exemple en imposant à ses travailleurs une police destinée à réglementer l’utilisation des médias sociaux.

Ces sanctions devront obligatoirement être reprises au règlement de travail et respecter les principes de transparence, de finalité et de proportionnalité. A ce titre, un comportement sanctionnable pour le porte-parole d’une entreprise ne sera pas le même que pour l’employé administratif qui n’est pas en contact avec la clientèle.

Cela peut-il aller jusqu’au licenciement?

Si la jurisprudence admet que les faits relevant de la vie privée peuvent constituer un motif grave de rupture du contrat de travail, encore faut-il, pour ce faire, que ces faits soient de nature à entacher la confiance présidant à la poursuite de la relation de travail.

C’est pour cette raison que les faits liés à des infractions (même graves) commises dans la sphère privée ne sont pas jugés de manière unanime par la jurisprudence, ces faits devant être appréciés au regard de l’impact concret qu’ils ont pu avoir sur la relation de travail.

Un article de Amandine Boseret, experte juridique chez Acerta Consult.

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