Le “field service management”, une bonne gestion des pannes fidélise le client
Les sociétés de “field service” cherchent des moyens pour améliorer et optimiser la maintenance des équipements de leurs clients. La digitalisation et la technologie offrent de belles perspectives de revenus. Quelques PME belges sont à la pointe dans ce domaine.
Les logiciels de gestion de services sur site (field service management) sont considérés comme une niche en croissance qui pèsera plus de 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires à l’échelle mondiale en 2026, soit une augmentation annuelle de 16%, selon Mordor Intelligence.
Quand on parle de services sur site, de quoi s’agit-il précisément? “Le field service concerne les tâches liées à l’installation, la réparation ou la maintenance d’équi- pements ou de machines sur site, des tâches qui nécessitent le déplacement et l’intervention de techniciens”, résume Dominique Vaes, fondateur de Field Service in Motion, une société de consultance belge spécialisée dans le domaine et qui conseille entre autres Electrolux, Kone et Elia. Le terme est apparu il y a quelques années et concerne des entreprises, publiques ou privées, tant en B to B qu’en B to C, et relevant de domaines aussi variés que la maintenance d’électroménagers, de l’air conditionné, d’installations électriques ou d’ascenseurs. “Dès l’instant où un technicien se déplace pour une intervention sur un équipement, en propre ou pour le compte d’un client, on parle de field service. Ces activités sont cruciales car si elles s’interrompent, les pannes s’accumulent et le monde s’arrête de tourner”, explique-t-il.
Si un appareil tombe en panne et que l’intervention est rapide, efficace et cordiale, le client s’en souviendra.”
Dominique Vaes (Field Service in Motion)
Le coût de l’après-vente
Les entreprises ont donc tout intérêt à s’intéresser de près à ce qu’il se passe après la vente. “Les organisations de field service réalisent le potentiel en termes de satisfaction du client, de fidélisation et de nouvelles ventes si leurs interventions sur site sont bien pensées, optimisées et de qualité“, constate Dominique Vaes. De plus, les contrats de garantie, les contrats de service après-vente et les équipes de techniciens à envoyer sur place pour des réparations représentent des coûts phénoménaux. Les entreprises vont chercher à optimiser la gestion et la maintenance de leurs équipements.
Pour gérer les opérations de services sur site, une solution informatique spécifique est un must. “Ce type de programme permet de planifier les interventions des techniciens, d’assurer la disponibilité des pièces de rechange, de générer des rapports et de suivre l’avancement d’un travail en temps réel, précise Dominique Vaes. La digitalisation permet de minimiser les temps d’interruption d’une machine et d’améliorer la communication entre le client et le back office.”
7 milliards d’euros
Le chiffre d’affaires qu’atteindra le secteur du “field service management” en 2026.
A côté des machines de guerre comme Salesforce, Microsoft ou IFS, d’autres occupent également le terrain, comme l’entreprise belge Odyssee Field Service. Active depuis une quinzaine d’années, notamment chez Engie, Veolia et Kiloutou, elle a développé une solution SaaS (software as a service) pour organiser, dynamiser et réduire les coûts du service sur site, voire pour créer de nouvelles sources de revenus. “L’utilisation d’une solution informatique dotée d’un bon module de planning permet d’augmenter de 33% la capacité d’un technicien, assure Charles Convent, CEO d’Odyssee. L’analyse des rapports d’intervention peut également mettre en évidence le besoin de maintenance régulière et générer de nouveaux contrats d’entretien.”
Le programme informatique offre un fil rouge au technicien qui suit un protocole pour chacune de ses interventions: valeurs à mesurer, étapes à suivre, rapport à rédiger. Il effectue ces différentes tâches via une tablette ou un smartphone, même hors ligne. “Les systèmes de rapports automatiques validés par le client permettent d’éviter les discussions, ajoute le patron d’Odyssee Field Service. Les processus donnent plus de clarté aux interventions et garantissent leur qualité.” Qui dit qualité, dit satisfaction du client. Deux paramètres intrinsèquement liés qui se répercutent sur les ventes. “L’excellence du service a un impact indiscutable, relève Dominique Vaes. Si un appareil tombe en panne et que l’intervention est rapide, efficace et cordiale, le client s’en souviendra. Chaque panne est une opportunité de se positionner comme un partenaire fiable et de fidéliser un client.”
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Supprimer les déplacements
On l’a compris, l’efficacité des activités de field service passe par l’optimisation du travail des techniciens. Poussée à son paroxysme, l’économie de moyens va jusqu’à la suppression des déplacements. “Avec des données collectées sur les équipements et analysées à distance, il est possible d’identifier plus rapidement les causes d’un problème, d’arriver avec la bonne pièce de rechange, de réparer plus rapidement, voire même d’éviter d’aller sur site”, explique Piet Vandaele, cofondateur de Waylay. Cette entreprise technologique gantoise a développé un logiciel qui analyse de façon effective et automatique les données collectées par des capteurs connectés à internet. Une approche très prometteuse. Le marché ne s’y trompe pas: Waylay, qui compte une quarantaine de salariés, est en pleine croissance. Avec entre autres, de gros clients industriels, un partenariat avec la solution digitale Salesforce Field Service et l’ouverture récente d’un bureau aux Etats-Unis.
Monitorer les équipements et éviter des temps d’interruption représente des économies de coûts énormes. “Prenons une ligne de production dans l’industrie automobile: si l’équipement tombe en panne, cela peut coûter entre 50.000 et 100.000 euros par heure, assure le cofondateur de Waylay. Dans le domaine de l’air conditionné et du smart building (construction intelligente, Ndlr), un bon système de détection de pannes permet de réaliser une économie de plus de 100.000 euros par an par bâtiment.”
Le fil vert sur le bouton vert
Même démarche technologique avec le logiciel Help Lightning. L’entreprise américaine a développé une application permettant l’assistance à distance grâce à la réalité fusionnée. Sur site, un technicien ayant besoin d’assistance filme la machinerie avec son smartphone tandis qu’au bureau, un collègue observe et intervient. Grâce à la fusion de deux flux vidéo, le technicien sur site voit précisément l’outil ou la main de son collègue lui indiquant quel bouton activer ou quelle pièce remplacer. Une solution qui permet une fois encore d’épargner temps et argent.
Le field service est donc le nouveau terrain de jeu des entreprises qui cherchent la profitabilité. Et plus uniquement en termes de ventes d’équipements. “Les entreprises constatent que les marges sur les ventes d’équipements sont faibles, tandis que les marges sur les services sont bien plus rentables, observe Piet Vandaele. Elles cherchent donc davantage à construire la relation avec le client sur le long terme, de cinq à quinze ans, particulièrement sur la maintenance de l’équipement industriel.” De quoi engranger des revenus récurrents sur de longues périodes, voire même le remplacement de la machine par une nouvelle lorsque celle-ci arrive en fin de vie. Un changement de paradigme qui devrait inciter les entreprises de services sur site à se pencher davantage sur les services à offrir et leur automatisation.
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