Emmanuel Faber perd les pleins pouvoirs chez Danone

Emmanuel Faber, PDG de Danone

Le conseil d’administration de Danone a voté lundi soir pour dissocier les postes de président et de directeur général du géant de l’agroalimentaire, une défaite pour Emmanuel Faber qui en gardera la présidence, et ne restera PDG que jusqu’à ce qu’un nouveau directeur général soit trouvé.

Emmanuel Faber était directeur général depuis 2014 et PDG depuis 2017, et faisait face à une fronde d’actionnaires depuis plusieurs semaines, qui avaient notamment exigé la dissociation des deux fonctions afin de redonner une nouvelle vigueur au groupe, malmené par la pandémie de Covid-19.

Une réunion du conseil d’administration a tranché lundi, et l’information a été annoncée par communiqué de presse, plus de trois heures et demie après le début de la réunion.

La direction exécutive du groupe échappera donc à M. Faber, qui en tant que président du conseil d’administration sera chargé des orientations stratégiques.

“Le processus de sélection d’un directeur général commence à partir de maintenant, ça va prendre plusieurs mois”, a indiqué à l’AFP une source proche de la direction.

Deux fonds d’investissement avaient fait du départ de M. Faber un préalable au redressement des performances du groupe, dont les volumes de ventes s’érodent depuis plusieurs années, un mouvement aggravé par la crise sanitaire.

Ces fonds – entrés récemment au capital à la faveur de la baisse de l’action – ont enfoncé le clou en fin de semaine dernière.

Artisan Partners, troisième actionnaire avec 3% du capital, a répété qu’il trouvait “urgent de s’occuper de la structure du conseil et de la direction de la société” et réclamait un changement de direction pour la “réinvention” de Danone.

Danone travaille sur un plan de réorganisation mondiale prévoyant jusqu’à 2.000 suppressions de postes parmi ses managers.

Artisan Partners disait vouloir la désignation d’un nouveau président et d’un nouveau directeur général, dotés d’une “expertise extérieure pertinente”.

Danone Le holding Sofina en détient un gros pour cent.
Danone Le holding Sofina en détient un gros pour cent.© BELGAIMAGE

Il n’a pas eu entièrement gain de cause. Les administrateurs ont rejeté – à l’unanimité, a pris soin de préciser la direction -, une proposition qui consistait à interrompre Local First, le plan de réorganisation mondiale lancé par Emmanuel Faber.

Le fonds activiste Bluebell Capital Partners, basé à Londres et d’envergure plus modeste, demandait aussi qu’un directeur général soit cherché en dehors de Danone.

Selon lui, les actionnaires du groupe étaient “massivement” en faveur de la séparation des fonctions de président et directeur général. Il menaçait de mettre le sujet à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale, fin avril, si le conseil d’administration ne s’en saisissait pas.

Patron connu pour défendre un capitalisme libéré du court-termisme, plus vert et plus social, Emmanuel Faber était le premier dirigeant de Danone non issu de la famille Riboud.

Il s’était jusqu’ici contenté de dire qu’il n’était “pas dogmatique” sur la dissociation des fonctions.

“Je suis vraiment très heureux que nous ayons pris les dispositions de gouvernance permettant déjà d’anticiper la phase suivante du développement de cette entreprise unique qu’est Danone”, a assuré M. Faber, cité dans le communiqué.

Gages aux actionnaires

Le groupe paraissait en tout cas soucieux de montrer qu’il n’oubliait pas de rétribuer ses actionnaires.

Le 19 février, lors de la présentation des résultats, Emmanuel Faber a annoncé que la rémunération des principaux dirigeants de Danone, dont la sienne, serait désormais en partie subordonnée à l’évolution des dividendes et du cours de Bourse.

Et dimanche, à la veille de la réunion du conseil, le groupe a annoncé qu’il allait se désengager du géant chinois des produits laitiers Mengniu et que les fruits de l’opération seraient reversés “dans leur majorité” aux actionnaires.

Selon Danone, sa participation dans Mengniu est actuellement valorisée à hauteur de 850 millions d’euros.

Inquiets de voir les fonds d’investissement dicter la stratégie du groupe, plusieurs syndicats du groupe (CFDT, FO et CGC) avaient apporté leur soutien à la gouvernance actuelle.

“Moi que ça soit machin, tartempion ou bidule qui gère l’entreprise, à partir du moment où ils appliquent la même politique qu’on a aujourd’hui, ça nous va bien. Ce n’est pas l’homme qu’on défend, c’est la gouvernance”, a déclaré à l’AFP Bruno Largillière, coordonnateur CFDT chez Danone, tout en précisant préférer que M. Faber reste en place.

“On ne comprendrait pas du tout qu’il soit remis en cause pour apporter plus de bénéfice aux actionnaires qui aujourd’hui arrivent, ne pèsent que 3% et viennent révolutionner l’entreprise”, a-t-il ajouté.

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